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Philatélie

Les timbres des États-Unis

Émission de 1861 (suite) (1).

— Le 24 cents violet avait été arbitrairement retiré de l’émission régulière par les théoriciens des « premières gravures ». En fait, ce n’est que la première nuance employée pour les timbres, et aussi l’une des plus recherchée. Il en est de nombreuses autres, fort jolies, quelques-unes très rares, et qui se rattachent soit aux violets, soit aux gris-lilas, la variété bleu-acier, d’ailleurs magnifique, étant l’une des plus cotées. Mais, comme pour tous les anciens timbres de nuances violettes, jusqu’à quel point toutes les variétés de teintes que nous enregistrons aujourd’hui sont-elles naturelles, ou plus exactement sont-elles d’origine ? Les avis sont très partagés. Ce timbre est assez difficile à trouver réellement bien centré, avec tout le dessin intact. Lavages assez fréquents.

Peu de choses à dire sur le 30 cents, si ce n’est qu’il est habituellement mal centré, lourdement oblitéré et de couleur passée.

Le 90 cents, qui termine la série, est aussi un timbre très difficile à trouver bien centré, quoique son décentrage ne soit pas toujours néfaste pour le dessin. Comme pour le précédent, peu de variétés intéressantes, nuances ou autres.

Le 2 cents noir vit le jour en 1863. Ce timbre, très populaire, offre d’assez nombreuses variétés de planches qui sont plus recherchées que pour les valeurs précédentes. On rencontre aussi plusieurs variétés de papiers, dont un vergé faisant une forte prime et un papier de sûreté brun, qui offrait la particularité de changer de couleur à l’humidité. Cette valeur est comme usée, coupée pour 1 cent. Les timbres lavés se rencontrent quelquefois.

Le 15 cents fut émis, en 1866, pour les besoins des lettres recommandées. Il fut aussi très employé pour le courrier étranger, en particulier vers la France. Ce timbre est probablement le plus mal centré de toute la série ; d’autre part, il est souvent très mal oblitéré. Ce qui revient à dire qu’il y a fort peu de premier choix. Il y a de très intéressantes variétés de planches, qui commencent à être un peu mieux appréciées. Enfin, faire très attention aux timbres lavés, qui sont très nombreux pour cette valeur et, souvent, très difficiles à déceler.

Avec l’émission de 1861, nous abordons la seconde série des « classiques » américains, série plutôt délaissée des spécialistes, particulièrement de ceux s’occupant de ce qui concerne la fabrication du timbre. Contrairement aux émissions de 1847 et de 1851-1857, le planchage est, pour ainsi dire, inexistant, et les variétés de planches, pourtant très intéressantes, ne rencontrent que peu d’amateurs. Cela vient sans doute de ce que ces timbres ne sont pas rares et existent en très grands blocs, rendant inutiles les patientes recherches des spécialistes. C’est un point qu’il ne faut jamais perdre de vue, surtout si l’on achète du timbre en vue d’un placement, et qui doit rendre très exigeant au point de vue qualité, sans pour cela accepter de payer les prix exagérés que l’on demande quelquefois pour de beaux exemplaires : car, nous le répétons, ces timbres ne sont pas rares. Si, pour cette émission, les variétés de planches sont peu prisées, il n’en est pas de même en ce qui concerne certaines variétés de nuances. Dans ce domaine particulier, l’acheteur français doit être très prudent, car presque toutes les nuances rares voisinent avec des teintes presque identiques, dont la valeur est bien moindre. Sans parler, bien entendu, des truquages chimiques qui foisonnent, comme chaque fois que certaines teintes sont synonymes de fortes plus-values. Les timbres de cette série sont aussi très recherchés pour les oblitérations, qui, en particulier sur le 3 cents, sont excessivement variées, de nombreuses d’entre elles présentant un caractère humoristique certain : diable et sa fourche, chope de bière, têtes de mort, etc., sans parler d’insignes divers, d’oiseaux, d’insectes, etc. Là aussi, avant de payer la forte prime qui est souvent demandée, il est prudent de s’entourer de toutes les précautions utiles, énormément d’oblitérations de fantaisie ayant été créées après coup. Un autre domaine aussi très à la mode est celui des enveloppes avec dessins de propagande, émis pendant la guerre civile (patriotic covers). Avant d’acheter, ne pas oublier que les prix sont très variables et que, si certaines, de ces patriotic covers sont très rares, il en est des centaines d’autres qui le sont beaucoup moins. Enfin, pour terminer, quelques mots sur les timbres avec grilles, et dont le nombre est bien plus grand que notre catalogue ne l’indique. L’expertise d’une grille est presque toujours une chose très difficile. D’abord, le sujet n’est pas entièrement connu, et il semble bien que plusieurs variétés très rares ne sont que des essais n’ayant jamais été mis en circulation. Comme la rareté de ces pièces implique un prix élevé, l’acheteur peut toujours se demander si, un jour, de nouvelles découvertes de l’érudition philatélique ne mettront pas ces pièces, actuellement très prisées, dans la même situation délicate que les premières gravures de 1861. D’autre part, les faux abondent, particulièrement dans les collections européennes, au point que cette origine, pour un expert américain, constitue, par elle seule, un mauvais point. Si certains de ces faux sont assez faciles à déceler par le spécialiste — mais par lui seulement, — il en est d’autres, par contre, qui mettent sa perspicacité à une rude épreuve. Nous connaissons ainsi plusieurs pièces sur lesquelles, honnêtement, personne n’a jamais pu se prononcer. Aussi croyons-nous que le collectionneur moyen sera plus sage de laisser ce domaine spécial de côté. Pour celui que le risque n’effraie pas, rappelons que les timbres neufs avec gomme d’origine sont ceux qui offrent le plus de garanties, la gomme, très souvent, ayant imprégné le papier au point de montrer le dessin de la grille, sur la face du timbre, en très fines lignes grises. Rappelons aussi qu’il existe d’assez nombreux exemplaires neufs qui, passés sous la lampe, font ressortir une légère marque en croix au crayon et effacée par la suite. Enfin, ne pas trop vouloir absolument des exemplaires de premier choix, car les timbres avec grilles sont probablement les plus mal centrés de tous, au point de croire qu’on les a choisis. Quant aux oblitérations de couleurs, elles sont de peu de rareté, à l’exception des vertes.

M. L. WATERMARK.

(1) Voir Le Chasseur Français, no 611, p. 367

Le Chasseur Français N°612 Février 1947 Page 415