Produisez vos semences.
— Vous savez combien il est difficile, actuellement, de
se procurer de bonnes graines potagères, malgré leur prix élevé. Souvent même
vous ne trouvez pas les espèces et les variétés que vous désirez semer dans
votre jardin, sans compter les ennuis qui résultent de leur mauvaise levée,
imputable, le plus souvent, à la perte de leur faculté germinative,
relativement courte chez certaines plantes.
Dans ces conditions, pourquoi ne produiriez-vous pas la
majeure partie des semences nécessaires à vos emblavures, ce qui n’est pas bien
compliqué ? Il suffit de choisir comme porte-graines des légumes
bien conformés, présentant les caractères types des variétés à reproduire, en
poursuivant la sélection dans le sens de leur comestibilité et de leur
productivité.
Sans doute, il y a des précautions à prendre pour éviter l’hybridation,
surtout s’il s’agit de crucifères visitées par les abeilles, lesquelles
transportent sur leur corps poilu la poussière fécondante d’une fleur à une
autre.
Le meilleur moyen d’éviter le croisement des plantes d’une
même famille, c’est de ne cultiver au même endroit, tous les ans, qu’une seule
variété de chou, de navet, de radis, etc. Il en est de même des cucurbitacées
(melons, cornichons, courges, etc.), des légumineuses (haricots, pois,
lentilles), des oignons, poireaux et autres plantes fréquentées par les
butineuses.
Il n’est d’ailleurs pas nécessaire de produire tous les ans
les graines dont on a besoin dans le cours d’un exercice, puisque celles-ci ont
une faculté germinative s’échelonnant entre deux et sept ans. Il vous suffira
de pratiquer la culture des porte-graines suivant vos besoins et de conserver
les semences dans de bonnes conditions pour assurer votre ravitaillement
complet en graines de bonne levée, dont vous connaîtrez l’origine.
Chaque espèce ayant des besoins propres et exigeant des
soins spéciaux, il convient de les étudier séparément, en commençant par les
plantes sarclées.
Betteraves.
— Qu’il s’agisse de betteraves fourragères
destinées aux lapins (demi-sucrière à collet vert, globe jaune, etc.) ou de betteraves
à salade (crapaudine, plate d’Égypte), la marche à suivre reste la même.
Choisissez toujours les plus belles racines, les mieux
conformées, dont le collet a été respecté à l’arrachage, pour les hiverner en
silo ou dans le sable. Plantez ces racines au printemps, d’assez bonne heure,
dans une terre meuble et fertile, en les espaçant de 50 centimètres, sur
des lignes distantes de 60 à 70 centimètres. En cours de saison, effectuez
les binages nécessaires, puis coupez les tiges à la faucille, lorsque la moitié
des graines sont bien mûres, c’est-à-dire lorsque les amandes sont devenues
blanches et farineuses. Rassemblez les tiges en bottillons que vous dressez en
chaîne pour les faire sécher. La dessiccation terminée, battez les bottillons
et passez au crible, de façon à éliminer les turots. Le rendement par mètre
carré est d’environ de 200 à 300 grammes de graines, dont la durée
germinative est au moins de cinq ans.
Carotte.
— La carotte est une ombellifère également
sujette à l’hybridation. Les variétés potagères sont courtes ou longues, rouges
et sans cœur, précoces ou tardives. Tous les ans, vous pouvez repiquer, en les
espaçant le plus possible, une couple de variétés recommandées (rouge
parisienne à forcer, courte de Hollande, demi-courte de Guérande, demi-longue
nantaise, etc.).
Les porte-graines, choisis à la récolte, sont habillés sans
toucher au collet et mis en stratification dans le sable sec. Mettez-les en
place à la fin de mars, dans une terre ameublie, saine et riche, à la distance
de 50 centimètres sur 50, mais ayez soin de supprimer toutes les carottes
sauvages qui pourraient naître dans le voisinage, pour empêcher l’hybridation,
et évitez de rapprocher des variétés différentes. Binez, tuteurez les tiges
florales et supprimez les inflorescences chétives. Récoltez à maturité, en
coupant les ombelles que vous suspendez dans un grenier. Battez et frottez
énergiquement les semences à la main, de façon à briser les crochets (persillage).
La durée de la faculté germinative est de quatre ans. Les graines de deux ans
ont une meilleure levée que celles d’un an.
Navets.
— Dans un petit jardin, ne plantez tous les ans qu’une
seule et même variété de porte-graines, toujours pour éviter l’hybridation par
les insectes mellifères, en faisant alterner les variétés à votre choix
(demi-long des vertus, navet marteau, de Meaux, rave d’Auvergne, etc.). Ne
touchez pas au collet des racines et conservez-les en silo, jusqu’au mois de
mars, époque où vous repiquerez vos navets en terre saine, meuble et fertile,
en les espaçant de 50 centimètres en tous sens. Effectuez les binages en
cours de saison. Pincez l’extrémité des hampes florales lorsque la fleur est
passée, afin de hâter le développement et la maturité des siliques inférieures.
Coupez les tiges à la faucille, sans trop attendre, aussitôt que les siliques
commencent à jaunir, puis portez-les au grenier, afin que la dessiccation se
termine à l’ombre. Égrenez sur une bâche et passez au crible. La graine de navet,
très petite, 500 ou 600 au gramme, peut se conserver pendant quatre à cinq ans.
Radis.
— Les racines précitées se traitent comme plantes
bisannuelles, c’est-à-dire par repiquages au printemps suivant, tandis que les radis
précoces fournissent leur graine l’année même de leur culture. Mais les radis
tardifs se multiplient après leur hivernage en silo, comme les navets.
Dans un cas comme dans l’autre, repiquez les plus beaux
radis et les mieux conformés dans une terre bien meuble, à l’espacement de 40 centimètres
sur 40, en avril s’il s’agit de radis précoces, au début de mars pour les
variétés tardives. La récolte à lieu en juillet ou en août-septembre, suivant
l’époque de la mise en place. Mais attention aux oiseaux, qui sont friands des
graines de radis aux approches de la maturité. Récoltez, faites sécher les
siliques sur le grenier ; battez, criblez et ensachez les graines bien
sèches ; elles se conserveront pendant quatre ans au moins.
Contrôle des semences.
— Les graines récoltées par vos soins, qu’il s’agisse
de légumes racines, de légumes foliacés (salades, choux), de légumes
fruits (potirons, melons), etc., auront toujours une levée satisfaisante
dès l’instant que vous aurez sélectionné vos porte-graines. Vous pouvez même améliorer
la valeur comestible de vos variétés en triant méthodiquement les semences
récoltées, en éliminant les grains légers, ridés ou mal venus. Il est encore
possible de créer des variétés nouvelles par l’hybridation.
Pour contrôler la valeur germinative des semences achetées,
il suffit de les placer dans une assiette, entre deux feuilles de buvard
maintenues constamment humides, après avoir compté 25, 50 ou 100 graines.
L’assiette étant maintenue à la température de 20° à 25°, on peut compter, au
bout de quelques jours, le pourcentage de germination.
Adonis LÉGUME.
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