Historique de la question.
— Le mode de calcul des fermages, tel qu’il a été
institué par la loi du 4 septembre 1943 relative à la stabilisation des
prix des baux à ferme, dont les dispositions ont été validées et complétées par
l’ordonnance du 3 mai 1945, aurait dû cesser d’être applicable le 1er janvier
1947.
À cette date devait entrer en vigueur le nouveau régime du
calcul du prix des baux à ferme institué par le statut du fermage (ordonnance
du 17 octobre 1945, modifiée et complétée par la loi du 13 avril
1946).
Mais une loi du 22 décembre 1946 est venue retarder
d’une année encore l’application du régime du prix des baux à ferme tel que le
prévoit le statut du fermage.
Donc, jusqu’au 31 décembre 1947, le payement des
fermages reste toujours réglé par le régime de la stabilisation des baux à
ferme (ordonnance du 3 mai 1945, qui a remplacé la loi du 4 septembre
1943), régime qui n’a cessé d’être appliqué depuis le 4 septembre 1943.
Prix de base au 1er septembre 1939.
— Le principe fondamental de cette réglementation
relative à la stabilisation des baux à ferme, c’est que les fermages doivent
être stabilisés sur la base des baux en cours au 1er septembre
1939.
Malgré cette stabilisation, le prix des baux à ferme varie,
comme on va le voir, en fonction du cours des produits.
Voici d’après quelles règles s’opère cette stabilisation, en
distinguant suivant que les baux en cours au 1er septembre 1939
étaient payables soit en fonction du prix de certains produits agricoles, soit
en nature, soit en une somme forfaitaire d’argent.
Fermages payables d’après le cours des produits.
— Lorsque le fermage de 1939 était stipulé payable en
argent d’après le cours d’une certaine quantité de produits agricoles, par
exemple d’après le cours du blé à raison de 2 quintaux à l’hectare, cette
clause du bail doit être respectée, c’est-à-dire que la quantité de denrées
convenue en septembre 1939 ne peut être augmentée ou diminuée.
Il importe de remarquer que le cours du produit à retenir
pour le calcul du fermage est le cours moyen de ce produit. Ce cours moyen
s’obtient en prenant la moyenne du cours dudit produit pendant la période
comprise entre l’échéance précédente et l’échéance actuelle, déduction faite du
dernier mois de cette période, durant lequel s’effectue la constatation du
cours moyen.
Fermages payables en nature.
— Lorsque le bail était payable en nature, par exemple
sur la base de 2 quintaux de blé à l’hectare, cette livraison n’est
permise que si elle est autorisée par les règles du Ravitaillement.
Dans le cas contraire, le fermage doit être acquitté en
argent d’après le cours moyen de ces denrées à chaque échéance.
La loi du 22 décembre 1946 vient cependant de prévoir
que, lorsque le preneur a opté pour le payement en nature lors de la conclusion
du bail, il pourra effectuer ce règlement en nature, à condition que la
quantité de denrées livrées corresponde à la valeur espèces déterminée par le
calcul légal ci-dessus, sans qu’il puisse en résulter un préjudice pour lui.
Ce passage de la loi est assez obscur et donnera lieu à des
difficultés d’interprétation.
Fermages payables en une somme forfaitaire d’argent.
— Lorsque le bail au 1er septembre 1939
était payable en une somme forfaitaire d’argent, par exemple 400 francs à
l’hectare, il faut rechercher alors ce que cette somme d’argent représentait de
produits agricoles à cette époque d’après le cours moyen desdits produits
pendant l’année civile 1939.
Les produits agricoles à retenir pour cette conversion
fictive sont ceux en usage dans le pays, ou, à défaut d’usages locaux, l’une ou
l’autre des principales productions, ou la proportion de ces principales
productions que les partis arrêteront d’un commun accord.
Ensuite, il convient de multiplier la quantité de denrées
ainsi obtenue par le cours moyen de ces denrées à chaque échéance.
Exploitations non louées en 1939.
— Lorsque les biens ruraux n’étaient pas loués au 1er septembre
1939, le fermage à cette époque doit être déterminé par référence aux quantités
de denrées constituant à cette date, dans la région, le fermage de biens
similaires.
Révision des prix des fermages.
— En stabilisant les prix des fermages sur la base des
baux en cours au 1er septembre 1939, la loi du 4 septembre
1943 avait cependant prévu la possibilité de demander la révision de ce prix
lorsqu’il était inférieur ou supérieur à la valeur locative du bien loué. Cette
révision s’opérait d’après la même règle que pour le calcul (indiqué ci-dessus)
des biens ruraux non encore loués au 1er septembre 1939.
L’ordonnance du 3 mai 1945 avait ensuite supprimé
purement et simplement cette possibilité de réviser les prix des baux au 1er septembre
1939 lorsqu’ils ne correspondaient pas à la valeur locative équitable des lieux
loués à cette époque.
La loi du 22 décembre 1946 vient de la rétablir telle
que l’avait instituée la loi du 4 septembre 1943.
Réduction du prix des baux.
— Les prix des baux à ferme, établis normalement
d’après les règles qui précèdent, peuvent comporter cependant des réductions
suivant les distinctions ci-après.
Tout d’abord, par application de l’article 1er
de la loi du 27 février 1946, qui a modifié l’ordonnance du 3 mai
1945, le prix des baux à ferme est, en ce qui concerne la part représentative
des produits autres que le blé et les céréales secondaires, diminué de 15
p. 100.
Cette même loi a emprunté une disposition au décret-loi du 1er juin
l940 réglant pendant la guerre les rapports entre bailleurs et preneurs de baux
à ferme, décret qui est venu à expiration dans le courant de 1946.
Aux termes de cette disposition, qui continue donc à être
applicable, des réductions pourront être accordées aux preneurs qui
justifieront, par suite de circonstances résultant de l’état de guerre
survenues postérieurement au contrat, soit ne pouvoir assurer normalement
l’exploitation en vue de laquelle les biens ont été loués, soit être privés
d’une notable partie des ressources provenant de l’exploitation du fonds et sur
lesquelles ils pouvaient compter pour faire face aux payements de leur loyer.
Enfin, la diminution de 5 p. 100 des prix, qui a été
portée à 10 p. 100, atteint les produits agricoles dont certains servent
au calcul des fermages. Il semble, si l’on s’en tient à la seule interprétation
juridique des textes, que cette diminution cause une répercussion sur le prix
des fermages ; mais les pouvoirs publics ne se sont pas nettement
prononcés à ce sujet.
L. CROUZATIER.
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