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L’éclairage par fluorescence

Les progrès de l’éclairage ont été constants, et nous avons déjà eu l’occasion de signaler, en particulier, les perfectionnements apportés aux lampes électriques à incandescence. Mais nous avons déjà noté qu’un nouveau principe est de nature, tout au moins dans un grand nombre de cas, à modifier complètement la technique, et surtout la pratique de l’éclairage, tant en ce qui concerne les résultats obtenus, que l’économie réalisée. Il s’agit de l’éclairage par fluorescence, déjà signalé sommairement dans un précédent article.

Lorsqu’on considère une source d’éclairage, il faut avant tout étudier son rendement ou efficacité, qui est le rapport du flux lumineux total obtenu, à la puissance totale dépensée, évaluée en watts, s’il s’agit d’une source électrique. Nous savons ainsi qu’il existe des ampoules « monowatt » ou « demi-watt ». Il faut également considérer la qualité de la lumière, c’est-à-dire la proportion de rayons colorés de diverses couleurs simples ou de rayons invisibles entrant dans la lumière produite.

Nous avons noté les progrès des ampoules électriques à incandescence, dont le rendement a été constamment augmenté, en particulier pour les ampoules au krypton, mais il faut considérer, en réalité, l’effet des radiations visibles sur notre œil. Ces radiations ne représentent qu’une faible partie des radiations émises, par suite de la production de radiations inutiles, dont le rôle est uniquement calorifique ; l’énergie transformée en radiations visibles dans les modèles à incandescence les plus perfectionnés est seulement de 12 à 13 p. 100.

Depuis un quart de siècle également, on a employé, sous des formes particulières, des tubes à luminescence et des lampes à vapeur de mercure ou de sodium. L’efficacité de ces dispositifs est élevée, mais leur emploi était assez difficile ; un autre inconvénient de ces appareils consistait dans une coloration généralement accentuée et différente, suivant les types des radiations émises.

Une source de lumière idéale devrait nous permettre d’obtenir un éclairage analogue à celui que nous assure la lumière solaire, et émettre ainsi des radiations de lumière blanche. Ce terme est très vague, en réalité, et la composition de la lumière solaire elle-même varie suivant les saisons, et les heures de la journée.

Pourtant, une lumière est d’autant plus agréable pour notre œil, que certaines conditions sont remplies. Il n’y a pas un éclairage de lumière blanche optimum, il y a plusieurs compositions possibles suivant l’éclairement considéré. En pratique, les spécialistes considèrent, à l’heure actuelle, deux catégories de lumière blanche. La tonalité, dite lumière du jour, a pout but de conserver aux objets éclairés la couleur naturelle observée pendant l’éclairage diurne ; la tonalité, dite blanc du soir, est beaucoup plus chaude que la première, et la coloration obtenue permet d’obtenir une ambiance lumineuse et chaude dans les salons, les salles de réunion, de spectacle, et cafés-restaurants.

Entre ces deux nuances blanches, on a étudié une coloration intermédiaire, dont les caractéristiques sont définies dans l’intervalle des précédentes et correspondent à un ensemble de préférences de la majorité des consommateurs.

On peut noter que l’œil s’est habitué à une modification progressive des teintes considérées comme blanches. La bougie et la lampe à pétrole émettaient surtout des radiations jaunes ; avec le bec Auer, la proportion des rayons bleus était déjà plus grande. Les premières ampoules à incandescence produisaient des rayons rougeâtres ; ce sont maintenant les ampoules au krypton qui émettent des radiations méritant le plus réellement le nom de blanches.

La meilleure solution consiste sans doute à pouvoir modifier rationnellement la composition de la lumière blanche fournie, et c’est là justement le grand avantage de l’éclairage par fluorescence.

On a déjà cherché à obtenir de la lumière blanche à l’aide de filtres supprimant les radiations inutiles, ou encore par addition, en associant deux sources de lumière de coloration différente. L’emploi des ampoules à fluorescence est beaucoup plus rationnel ; il permet, à l’aide d’un dispositif émetteur de lumière colorée, d’obtenir de la lumière blanche, dont la composition spectrale est choisie rationnellement à l’avance.

La fluorescence est un phénomène particulier produit sur certains corps par l’absorption de certaines radiations de longueurs d’onde déterminées, et par l’émission correspondante de radiations de longueurs d’onde plus grandes, qui peuvent être choisies dans le spectre visible.

Au phénomène de la fluorescence, s’ajoute souvent un phénomène de phosphorescence. Cette dernière se distingue en ce que la lumière produite par elle continue à être émise pendant un temps réduit, même lorsque l’action des radiations excitatrices a cessé.

Dans les nouvelles lampes d’éclairage à fluorescence affectant la forme de tubes cylindriques, le système excitateur est constitué par une lampe à vapeur de mercure à basse pression, qui produit des radiations invisibles ultra-violettes. Un mélange de poudres fluorescentes est appliqué en couches minces sur la paroi interne d’un tube de verre, et il est soumis à l’action directe de ces radiations. Le composé entre alors en fluorescence et émet une lumière visible, dont la coloration dépend de la composition de l’enduit. On obtient ainsi le résultat demandé : produire une lumière blanche de composition rationnelle pouvant être choisie presque à volonté.

Les lampes de ce genre que l’on peut déjà voir, et utiliser en France, ont la forme de tubes de 1 mètre de longueur au maximum et de quelques centimètres de diamètre ; elles fonctionnent avec un dispositif auxiliaire très simple, sous la tension du secteur. La partie la plus délicate est justement l’enduit fluorescent ; il faut obtenir un bon rendement, une couleur convenable, un fonctionnement stable et durable. Les qualités physiques et chimiques utiles rendent le produit coûteux, mais la quantité utilisée est très faible. La paroi interne du verre est recouverte d’une pellicule très mince de cristaux fluorescents minuscules, fixés par une petite quantité de ciment.

Les premières lampes avaient un rendement très faible et la couche fluorescente n’était pas durable ; une longue et délicate mise au point a été nécessaire pour réaliser des tubes robustes constituant des sources de lumière blanche efficace.

L’étude des enduits fluorescents a donc pris une très grosse importance industrielle, et les progrès réalisés sont de nature à amener une véritable transformation des méthodes d’éclairage.

P. HÉMARDINQUER.

Le Chasseur Français N°613 Avril 1947 Page 461