L’hiver que nous avons subi, particulièrement long et
rigoureux, n’a pas permis partout de faire les plantations projetées en temps
convenable.
Nombreux sont, en effet, les endroits où, l’eau ayant quitté
très tardivement les terrains, la préparation de ceux-ci n’a pu être entreprise
que fort tard, fin février ou même début mars.
Il a fallu attendre encore, avant de planter, que le sol se
soit quelque peu raffermi à la suite du défoncement.
Pourtant, on avait, en temps voulu, passé commande au pépiniériste ;
celui-ci avait expédié les arbres dès l’automne, et leur transport s’était
effectué dans des conditions parfaites, les racines n’ayant nullement eu à
souffrir de la gelée. On avait, dès réception, placé les arbres en jauge dans
un endroit bien sain, espérant pouvoir faire une bonne plantation.
Malheureusement, les intempéries ayant considérablement
retardé le travail, la plantation s’est faite, finalement, alors que les
bourgeons des arbres commençaient à éclater.
On a bien, il est vrai, praliné les racines en les
trempant dans une bouillie formée d’argile, de bouse de vache et d’eau. On a
donné, en plantant, un bon arrosage pour faciliter l’adhérence de la terre aux
racines, puis remis, dans l’excavation produite par l’eau, une petite quantité
de terre fine.
Pour les arbres de plein vent, on a muni chaque sujet d’un
bon tuteur destiné à l’immobiliser absolument pendant la période de reprise.
Toutes ces précautions sont, certes, d’une grande utilité, mais elles ne sont
pas toujours suffisantes à assurer une bonne reprise dans le cas de plantation
tardive.
Les arbres nouvellement plantés n’ont, en effet, pas eu le
temps de prendre possession du terrain avant leur entrée en végétation. En
particulier, les poils absorbants, détruits lors de la déplantation, ne se sont
pas encore reformés. Il en résulte que la circulation de la sève, dans les
tissus du jeune arbre, est très peu active, ce qui prédispose l’écorce à être
altérée facilement par des coups de soleil survenant en mai et juin.
Des personnes peu averties croient trouver, dans l’arrosage
fréquent des nouvelles plantations, le moyen de pallier cet inconvénient. Il
n’en est rien malheureusement, car les racines, privées d’organes d’absorption,
sont tout à fait incapables de profiter de l’eau que l’on met ainsi à leur
disposition.
Une trop grande fréquence des arrosages peut même avoir pour
effet de déterminer la pourriture des racines et aller ainsi exactement à
l’encontre du but poursuivi.
La solution est bien, plutôt, dans la préservation du tronc
et des principales branches de l’arbre contre les rayons solaires, au moyen
d’un écran interposé.
Un lait de chaux assez épais, dont on recouvre l’écorce,
constitue déjà un bon mode de protection. La couleur blanche de la chaux
s’oppose, en effet, à la pénétration des rayons caloriques et préserve ainsi
les parties protégées de la dessiccation.
Mais, pour les arbres déjà forts, il existe un moyen plus
efficace, quoique un peu plus long à mettre en œuvre. Il consiste à entourer le
tronc, depuis le niveau du sol jusqu’à la hauteur des premières branches, d’une
torsade de foin ou de paille. Celle-ci est arrêtée, en haut et en bas, au moyen
d’une ligature d’osier.
Si l’été est particulièrement sec et chaud, on humidifie, de
temps à autre, à l’aide d’une seringue ou d’un pulvérisateur cette torsade, qui
communique ainsi aux écorces une fraîcheur bienfaisante.
On pourra la laisser une ou deux années. Pour l’enlever, on
choisira une saison où le soleil a beaucoup perdu de sa force, fin
septembre-octobre par exemple. La paille ou le foin ayant pu servir de refuge à
un certain nombre d’insectes, il est très indiqué de brûler immédiatement la
torsade dès qu’elle ne sert plus.
Si l’été est assez sec et chaud, on évitera la perte d’eau
par évaporation à la surface du sol en couvrant celui-ci d’un bon paillis de
fumier gras, fumier de bêtes à cornes à demi décomposé par exemple. Sur une
plate-bande longeant un mur d’espalier récemment planté d’arbres, le paillis
pourra être étendu sur toute la surface. Pour un arbre isolé, on établira une
légère dépression dont celui-ci occupera le centre et, au fond de cette
dépression, préalablement bien ameublie, on disposera le paillis. À défaut de
fumier, on pourra utiliser de la paille hachée, du foin avarié, de la mousse ou
des débris divers d’origine végétale, de coloration autant que possible
foncée ; ces matières, couvrant le sol, l’empêcheront de se battre sous
l’influence des pluies et de durcir ensuite, s’opposant à la pénétration de
l’air. D’autre part, on pourra, par ce moyen, se dispenser d’arroser aussi
souvent.
De toute façon, et surtout en terrain froid, il ne faudra
pas placer trop tôt le paillis, car il risquerait, en cas de retour du temps
pluvieux, de faire aux arbres plus de mal que de bien. Le début de juin sera,
dans la plupart des cas, l’époque la plus convenable.
De même, on ne laissera pas le paillis après la mi-octobre,
à moins que le temps ne reste sec après cette date. À cette époque, on
l’incorporera au sol par un léger labour à la fourche-bêche. Il se décomposera alors
plus ou moins rapidement et contribuera ainsi à augmenter la richesse du sol en
humus.
E. DELPLACE.
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