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L’arbre fruitier

La partie aérienne

Nous continuons l’étude présentée dans le dernier numéro du Chasseur Français par l’examen de la partie aérienne de l’arbre, comprenant tous les organes se développant au-dessus du sol.

Le tronc s’élève verticalement jusqu’à la naissance des branches charpentières ; sa jonction avec les racines constitue une zone difficile à distinguer, désignée sous le nom de collet.

En se ramifiant, le tronc donne des branches et des rameaux. Tous ces organes proviennent de l’évolution d’un œil. Celui-ci, en se développant, donnera des feuilles, ayant aussi à leur aisselle un œil. Lorsqu’il se développe au printemps, il porte le nom de bourgeon, jusqu’à la chute des feuilles ; l’année suivante, il constituera un rameau. La feuille est attachée au bourgeon sur un petit renflement désigné coussinet ou nœud ; la partie comprise entre deux bourgeons s’appelle entrenœud ou mérithalle.

En arboriculture, en viticulture, on a remarqué que les rameaux dont les entrenœuds sont longs se transforment plus difficilement à fruits que ceux portés sur des entrenœuds courts, qui, parce que plus fructifiés, donneront rapidement une récolte.

Application pratique.

— Un rameau à bois de poirier poussant sur une couronne située dans la partie moyenne d’une charpentière sera taillé : a. à trois yeux s’ils sont portés sur des entrenœuds courts ; b. sur son empattement si les entrenœuds sont longs.

Sur un cordon de vigne, les sarments à mérithalles longs seront coupés à cinq yeux. Au contraire, si les sarments ont des intervalles courts, les tailler à deux yeux. Dans ce dernier cas, l’œil supérieur donnera la fructification, l’œil inférieur le remplacement, le bois pour la taille de l’année suivante.

Ce qui précède est mis en application dans nombre de cas. Pour une vigne dont on ne connaît pas le mode de taille à appliquer, la longueur des mérithalles donnera la solution. À mérithalle long, taille de trois à cinq yeux selon la vigueur ; à entrenœuds courts, taille à deux yeux.

L’œil supérieur portera le fruit, l’inférieur donnera le remplacement pour l’année suivante.

Quand une couronne porte trois ou quatre rameaux à bois, supprimer, dans un poirier, tous les rameaux à entre-nœuds longs ; réserver celui qui porte des entrenœuds courts, parce que plus fructifies, et le couper à trois yeux.

Le sommet du bourgeon se termine par des feuilles de plus en plus petites et donne à sa partie terminale un œil recouvert d’écailles protégeant le point végétatif. Dans cette zone, la végétation est très active, les cellules se multiplient avec d’autant plus d’activité qu’elles reçoivent le maximum de sève. À l’aisselle de chaque feuille se trouve un œil dit axillaire capable de donner un rameau, plus tard une branche, ou de fournir une production fruitière.

Chaque œil est accompagné de petits yeux situés à l’aisselle des stipules, désignés pour cette raison yeux stipulaires. La plupart du temps, ils sont à peine visibles ; leur rôle est de remplacer l’œil axillaire, dans le cas où il viendrait à manquer ou disparaître. Dans les arbres à fruits à pépins, ces yeux peuvent rester latents pendant plusieurs années dans les rides de l’écorce. Ils se développent quand, par la taille, on rabat le rameau sur ride ou sur empattement. Dans les arbres à fruits à noyau, les yeux stipulaires sont annulés s’ils ne se développent pas la première année de leur formation.

Les yeux adventifs apparaissent en des points quelconques de la tige, des branches, par suite d’un rapprochement, d’une taille courte, une plaie en des points quelconques. Ils sont précieux pour reconstituer la charpente, pour garnir les parties dénudées de productions fruitières.

Le gourmand est un rameau à large base, se développant avec vigueur verticalement, sur les parties supérieures des branches. Cette production est rebelle à la fructification. En le taillant sur empattement, on fait développer sur les rides les yeux latents et stipulaires, qui, mal formés, se transforment en production fructifère. C’est sur ce principe que sont basés la taille Lorette et le traitement des poiriers, pommiers, pêchers, conduits par des pincements en vert répétés.

Les yeux situés sur les rameaux d’un an se développent au printemps suivant. Il arrive souvent que, sur les arbres vigoureux, les yeux se développent la même année de leur formation ; ils sont dits : bourgeons anticipés. Ces formations se transforment en productions fructifiées par le pincement à deux feuilles. Quant aux yeux restés latents pendant la période sèche d’août, les pluies survenant provoquent leur allongement. Ces pousses sont inutiles, elles utilisent la sève formée par les feuilles adultes qui devait être canalisée sur les fruits ; ceux-ci, privés de cette nourriture, voient leur croissance diminuée. Ces bourgeons retardataires n’ont pas le temps de s’aoûter, ils sont donc sans utilité. Pour tous ces motifs, un deuxième pincement est utile à deux feuilles pour rétablir l’équilibre.

Aoûtement.

— Le rameau jeune est vert ; en août, il se colore en brun, durcit, et ses cellules se chargent de réserves d’amidon.

La tige.

— Sur la section d’une tige coupée horizontalement, on rencontre l’écorce, dont la partie extérieure, épiderme, possède des lenticelles, permettant des échanges gazeux entre la plante et l’atmosphère ; au-dessous, une couche herbacée, formée par un tissu mou verdâtre, qui disparaît sur les tiges âgées pour être remplacé par une couche de liège. Immédiatement au-dessous de l’écorce se trouve le liber, composé de longues cellules séparées par des parois percées de trous (tubes criblés) et des fibres. C’est par ces tubes criblés que la sève élaborée circule. Les fibres du liber, très résistantes, forment la plupart de nos matières textiles.

Entre le liber et le bois se trouve le cambium, ou couche génératrice, tissu composé de cellules qui se divisent pour former tous les ans une couche de bois vers l’intérieur et de liber à l’extérieur. Le bois est constitué de couches circulaires concentriques correspondant chacune à la végétation d’une année. Par ce dispositif, il est facile de calculer l’âge d’un arbre coupé transversalement.

Au centre, on rencontre la moelle et, à travers le bois, des rayons médullaires qui partent de l’intérieur, traversant le bois et le liber.

Reprise de la greffe.

— Cette reprise est due à la soudure du greffon et du sujet qui, en établissant la parfaite continuité de leurs tissus, assure le passage de la sève dans le greffon, dont les yeux peuvent se développer.

Cette soudure se produit par une union provisoire du greffon et du sujet, par l’agglutination des membranes déchirées et de leur contenu cellulaire. Par résorption, ces matières disparaissent, et il se forme des tissus jeunes (méristèmes).

L’union définitive a lieu par la multiplication des cellules des assises génératrices du greffon et du sujet. L’activité de ces assises met en communication définitive du bois et du liber des deux individus. De ce qui précède, concluons : la reprise d’une greffe dépend : 1° du contact intime entre les couches génératrices du sujet et du greffon ; 2° d’une température variable selon l’essence fruitière greffée (10° C pour le cerisier et prunier ; 12° C pour le pommier et poirier ; 15° C pour l’abricotier, pêcher, et 18 à 20° C pour la vigne).

Influence des facteurs sur le fonctionnement de la partie aérienne.

— Chaleur. La croissance de la partie aérienne est fonction de la somme de chaleur reçue par l’arbre. Cette température part d’un minimum pour passer par un optimum variable selon les essences fruitières. Les arbres d’origine méridionale sont plus exigeants en chaleur que les espèces indigènes.

L’humidité favorise le développement de tous les organes aériens. La sécheresse ralentit la croissance ; les branches, les rameaux restent courts, mais sont plus ligneux, la floraison plus abondante et la fructification plus rapide. Les essences fruitières se défendent de l’excès d’eau en augmentant leur surface foliacée. En année pluvieuse, les rameaux feuilles sont plus abondants et la production fructifère plus faible. Le manque d’eau diminue leur surface respiratoire, la peau du fruit s’épaissit, et le revêtement pileux se renforce.

E. DEAUX.

Le Chasseur Français N°614 Juin 1947 Page 491