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Chiens terriers et déterrage

Toutes les races de chiens terriers peuvent être utilisées à la chasse sous terre. Seul, empêché par sa taille, l’airedale n’est pas susceptible d’y être employé. Par contre, le tekel, ou dachshund, s’y montre souvent parfait.

Dans les autres races de chiens de petite taille, il s’en trouve parfois qui y excellent. À mes débuts, j’ai utilisé un caniche nain aussi mordant et tenace qu’il est nécessaire ; plus tard, un basset d’Artois qui était également très bon. Mais le chien le plus souvent employé, et qui donne généralement satisfaction, est le fox-terrier à poil ras. Celui à poil dur, quoique souvent plutôt trop mordant, est quelquefois chiche de voix.

Qu’il soit de race plus ou moins pure, cela n’a guère d’importance.

Les meilleurs que j’aie connus étaient d’un modèle s’éloignant assez de celui d’exposition. Près de terre, crâne large, membres forts, tels ils étaient généralement. Quand on voudra se livrer à cette chasse, ou plutôt à ce sport, il sera bon de se procurer au moins deux chiens, car si le déterrage demande plusieurs heures, ou même une journée, comme cela arrive quelquefois, un seul chien pourra se fatiguer et à un moment abandonner son animal pour se reposer ; celui-ci, si c’est un blaireau, en profitera pour se contreterrer et, si c’est un renard, abandonner son accul pour un autre, d’où le terrassement déjà fait devient inutile. Si l’on possède un chien ayant déjà déterré, le jeune, attaché près de la gueule du terrier, voyant son camarade y entrer et entendant les abois, ne demandera généralement pas mieux que de le remplacer quand il sera fatigué, mais, s’il ne le fait pas de lui-même, il ne faudra jamais essayer de le faire entrer de force. Il ne faudra pas non plus faire pénétrer deux chiens ensemble, certains ne tolèrent pas d’être accompagnés et, au lieu de s’en prendre au fauve, se jettent sur l’autre chien. Il en est bien qui le tolèrent, mais en ce cas, quand l’un est aux abois et vient à être chargé, il est empêché de reculer par l’autre et une prise avec le fauve est inévitable, ce qui est toujours à éviter, surtout s’il s’agit d’un blaireau, dont les morsures sont souvent graves, quelquefois mortelles.

Pour les débuts d’un jeune chien, il sera, autant que possible, préférable de lui faire attaquer un renard, ou même des renardeaux.

Si l’on peut se procurer un de ceux-ci vivant, ou, à défaut, un adulte, on pourra organiser un terrier artificiel qui sera d’une grande utilité pour le dressage et l’entraînement des jeunes chiens.

Ce terrier artificiel pourra être aussi réduit qu’on le voudra.

Une tranchée de 5 à 6 mètres, faite à la bêche, suffira. Recouverte de vieilles planches, elle sera peu coûteuse et peu encombrante. On aura soin de pratiquer, à l’extrémité, un carrefour où viendra s’acculer le renard et où l’on pourra le reprendre. Pour les vieux chiens, on pourra employer un blaireau, mais le maniement de celui-ci est bien plus difficile et dangereux. L’emploi des pinces est tout indiqué pour lui, tandis que le renard peut être pris à la main par la peau du cou.

Un bon chien terrier n’est pas nécessairement très mordant : son rôle consiste à aboyer son animal d’assez près pour le forcer à lui faire tête et, par conséquent, l’empêcher de gratter ou de fuir.

Il faudra toujours éviter de mettre un jeune chien dans un terrier où l’on supposera exister une portée de jeunes blaireaux. La mère de ceux-ci n’attendra pas l’arrivée du chien, elle ira au-devant de lui et l’attaquera, lui faisant souvent de terribles blessures, ce qui pourra le dégoûter pour un temps.

J’ai vu une femelle faire sortir du terrier trois bons chiens que l’on avait lâchés successivement et aucun ne vouloir y retourner.

À propos de la mise bas du blaireau, il a été écrit bien des erreurs. Mon ami Ludovic Ridet, qui a pu inscrire à son livre de chasse près de deux mille animaux, majorité en blaireaux, m’a souvent affirmé avoir trouvé des jeunes blaireaux à partir du 5 janvier et jamais de nouveau-nés après le 15 février. J’ai moi-même constaté la véracité de cette assertion.

Le déterrage en terrain plat se fait souvent au moyen de tranchées pratiquées au-dessus de l’endroit où sont entendus les abois du chien.

Ce système a l’inconvénient de bouleverser les terriers et d’en éloigner les animaux pour assez longtemps.

Dans la forêt de Fontainebleau et dans les environs d’Étampes, les terriers à fauves sont sous les rochers de grès. Là, le système des tranchées est impraticable, on est obligé de suivre les galeries en les agrandissant, ce qui nécessite quelquefois une équipe de travailleurs assez importante.

Il en est de même pour les terriers à flanc de coteau, mais, par ce moyen, l’extérieur reste intact et les animaux y reviennent assez vite.

Dans la chasse de Ridet, un terrier situé à mi-côte donnait l’occasion de deux et quelquefois trois déterrages chaque année, pratiqués en galerie. Après chaque déterrage, il sera bon de faire prendre un bain de Barèges avec séchage au feu de la cheminée aux chiens qui y ont participé, car souvent les vieux blaireaux sont atteints de maladies de peau contagieuses.

Avant l’emploi des gaz asphyxiants, le déterrage était un bon moyen de destruction pour les renards et blaireaux, mais actuellement ne s’y livrent plus que ceux qui considèrent cette chasse comme un sport, et réellement c’en est un, et des plus intéressants.

A. ROHARD.

Le Chasseur Français N°617 Décembre 1947 Page 620