Dans un article précédent, nous avons traité de
l’augmentation immédiate de la production forestière et, comme palliatif à la
main-d’œuvre très rare, de la mécanisation de l’exploitation.
Voyons maintenant comment, avec modernisation également,
peut être effectué le débardage.
Mécanisation de l’abatage, mécanisation aussi du débardage.
Y a-t-il travail plus dur que celui du débardeur forestier ? Pluie ou
soleil ardent, travail dans la boue, chevaux énervés par les piqûres de taons,
fourrés d’épines à traverser, fossés, zones mouilleuses, pentes raides à
franchir, souches à contourner, arbres réservés à éviter, bêtes à soigner au
départ et au retour, accidents fréquents survenus aux chevaux lors de ce
travail, tout en à-coups, tel est le lot du débardeur forestier. L’introduction
des tracteurs en forêt, quand elle est compatible avec l’avenir du peuplement,
est déjà une première amélioration.
Il y a lieu d’insister sur quelques points. Nous ne croyons
pas, d’abord, qu’il soit souhaitable d’utiliser en forêt d’énormes tracteurs à
allure de chars lourds qui gaspillent toute leur énergie, moteurs poussés à
fond, à vaincre une souche ou à arracher une butte de terre qui calent la tête
d’une grume. Quelle désolation aussi, quelquefois, de voir, après une exploitation,
une forêt lacérée de griffures de chenilles de tracteurs ayant déchiqueté les
jeunes brins du futur peuplement ! Nous croyons que l’avenir est aux
tracteurs à faible voie (1 mètre à lm,40) pour lesquels on pourra,
même en montagne, faire des routes à peu de frais. Pour compenser la puissance
plus faible de ces engins, il faut améliorer les véhicules portant les grumes,
diables ou triqueballes, généraliser l’emploi des pelles de traction qui
permettent aux grumes d’éviter les obstacles, multiplier les tracteurs-treuils
qui se halent eux-mêmes jusqu’à un point fixe pour traverser un mauvais passage
ou qui, ancrés solidement sur un bon terrain, tirent à eux une grume le long
d’une pente. Avec ces tracteurs, la chenille convient à tous les sols, le gros
pneu à fortes nervures va bien sur les terrains caillouteux et secs. La jante
métallique avec coins d’adhérence permet les débardages en mauvais sols
argileux ; la jante métallique, coins enlevés, le gros pneu peuvent aller
sur route. La chenille est vue d’un mauvais œil par ceux qui ont la charge
d’entretenir les chaussées.
À côté des tracteurs, il y a bien d’autres engins modernes
de débardage, mais nous n’avons pas, dans ce court article, la possibilité de
nous étendre longuement à cet égard. Les câbles sont de plus en plus
répandus : câbles légers, facilement démontables, pour le débardage de
bois de chauffage ou d’étais (comme on peut en voir en Alsace) ; câble
pour grume : soit tricâble fonctionnant sur une pente entre une station de
départ et une station d’arrivée (tels ceux d’Allarmont, de La Roche-des-Arnauds,
etc.), ou soit encore câbles allant chercher les grumes en forêt, tout le long
et de part et d’autre d’un porteur unique (tels certains câbles suisses).
De nombreux articles ont été écrits au sujet des câbles dans
diverses revues forestières : auxquelles nous prions nos lecteurs de bien
vouloir se reporter (1).
En conclusion, nous pensons que ces modernisations de
l’exploitation forestière : scie mécanique palliant le manque de bûcherons
et rendant cette profession plus moderne et plus lucrative, tracteurs étroits
passe-partout avec engins de traînage ou de roulement améliorés, câbles légers
à chauffage ou câble à grumes augmentant les possibilités d’exploitation,
peuvent permettre d’éviter une raréfaction des produits forestiers sur le
marché, où ils sont extrêmement demandés.
Dans un prochain article, nous passerons en revue les
principaux produits de nos exploitations forestières et nous étudierons pour
chacun d’eux leur avenir et leur économie.
LE FORESTIER.
(1) Revue des Eaux et Forêts et Revue du Bois.
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