Comme bien d’autres modes, celle des allées formées de
dalles de pierres nous est venue, quelque temps avant la deuxième guerre
mondiale, d’outre-Manche ...
Très rapidement, cette façon de traiter terre-pleins et
allées avait pris une grande vogue, et il est vraisemblable que, dans un proche
avenir, lorsque les matériaux de construction, et notamment le ciment, seront
redevenus produits d’usage courant, on ne créera plus guère de jardins neufs
sans y faire une place plus ou moins importante à cette nouvelle formule. Aussi
pensons-nous que quelques données sur la façon d’établir et de planter allées
et terre-pleins dallés, peuvent être utiles à nos lecteurs.
Tout d’abord, il ne faut pas perdre de vue que le chemin
dallé doit être spécialement établi pour recevoir des plantes.
Ceci exclut la possibilité de poser les dalles sur une
couche uniforme de béton de ciment, ne laissant entre elles qu’un joint de
quelques centimètres de largeur et de profondeur égale à l’épaisseur de la
dalle. En effet, dans de telles conditions, les racines des plantes ne
pourraient s’enfoncer suffisamment pour leur permettre de résister aux grands
froids de l’hiver et à la sécheresse de l’été.
Comme dalles, on peut utiliser des pierres plates, provenant
de carrières de schistes, ayant de 5 à 10 centimètres d’épaisseur. Mais il
ne faut pas que ces pierres soient gélives, c’est-à-dire sujettes à se
désagréger sous l’influence des fortes gelées. On peut aussi employer des
briques de teintes diverses, assorties aux plantes qui garnissent les
interstices, et posées à plat ou sur champ.
Mais, le plus souvent, les dalles sont en ciment.
On réalise sur le terrain le dessin du dallage à l’aide de
lattes de bois, de 5 à 10 centimètres de large, qui occupent la place des
interstices, puis on place entre ces lattes, qui forment par leur ensemble
coffrage, du ciment teinté à volonté. Une fois le ciment bien pris, on enlève
les lattes et l’on met à la place de la bonne terre de jardin.
On peut aussi fabriquer en atelier des dalles en ciment armé
que l’on emploie de la même façon que s’il s’agissait de pierres.
En terrain humide, chaque dalle doit reposer sur une petite
assise en béton, en mâchefer, ou simplement sur quelques pierres plates bien
calées. Cette précaution n’est pas utile en terrain sain et ferme, où la dalle
peut reposer directement sur le sol.
Pour planter une allée ou un terre-plein dallés, il faut
disposer les plantes, dans les interstices, par groupes de même variété. On
associe les espèces de telle façon que leurs tailles et leurs couleurs
s’harmonisent aussi parfaitement que possible.
Les plantes à port gazonnant, retombant ou étalé, sont les
plus convenables pour garnir les dallages. Les plus naines et les plus
résistantes sont placées vers le milieu de l’allée, où l’on marche le plus
souvent, et où elles risquent d’être piétinées, celles de taille plus élevée
étant plantées sur les bords et dans les encoignures, où l’on circule beaucoup
moins.
De nombreuses espèces trouvent leur emploi dans ces
conditions. L’une des plus usitées et des plus naines est la Sagine (Sagina
subulata), qui forme un véritable gazon, très fin et moelleux, débordant
sur les dalles et se couvrant à la belle saison d’une multitude de fleurettes
blanches.
Les Sedum gazonnants, à fleurs roses, rouges ou
blanches, le Veronica prostrata aux très nombreuses fleurs bleues, les Aubrietias
aux jolies teintes bleu pâle, bleu foncé ou roses selon les variétés, la Corbeille
d’or, la Corbeille d’argent sont autant d’espèces à floraison de
printemps qu’il convient de placer dans les endroits où l’on ne marche que
rarement.
À la fin du printemps et au début de l’été fleurissent à
leur tour le Gazon d’Espagne (Statice armeria), aux innombrables
capitules roses, les Campanules naines à fleurs bleues, puis, un peu
plus tard, la Camomille romaine, le Lippia canescens, la Gypsophile
naine.
Du mois de mai aux gelées fleurissent encore d’autres
espèces : les Violettes cornues, aux fleurs bleu foncé ou violet
rougeâtre, l’Erigeron quercifolius ou Vittadinia triloba, aux
nombreux et légers capitules blanc rosé ; le Nepeta Mussini, aux
petites corolles bleu d’azur.
Dans la plantation peuvent encore être comprises des plantes
qui ne fleurissent guère, mais dont le feuillage, généralement blanchâtre,
persiste en toute saison. Tels sont : le Céraiste tomenteux, l’Antennaria
dioica, le Stachys lanata, la Joubarde toile d’araignée et la
Joubarde tomenteuse.
Beaucoup d’autres espèces sont encore utilisables. Citons,
parmi les plantes vivaces, la Corydalle jaune, aux belles grappes jaune
d’or, la Linaire cymbalaire, aux mignonnes fleurettes bleu clair, les Phlox
setacea et amœna, le Thym à odeur de citron, le Pyrèthre
gazonnant, etc., et, parmi les plantes annuelles, l’Eschcholtzia nain
compact, la Ficoïde tricolore, l’Oxalis pourpre, le Pourpier
à grande fleur, etc.
La plupart des espèces citées ci-dessus, présentent une
grande résistance à la sécheresse, croissant spontanément dans les rocailles,
sur les vieux murs ou en bordure des chemins.
Il est cependant nécessaire, en période d’été, de les arroser
de temps à autre. Il faut aussi pratiquer des sarclages pour empêcher les
plantes adventices qui ne présentent pas d’intérêt de prendre possession du
terrain et de concurrencer les plantes ornementales.
Mais ces soins, qui ne donnent guère plus de travail que
ceux ordinairement consacrés aux allées, permettent, en revanche, de s’assurer,
en toute saison, des floraisons abondantes et variées susceptibles de
dédommager largement du travail supplémentaire nécessité par la réalisation des
allées et terre-pleins dallés.
E. DELPLACE.
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