Les plants de pommes de terre, qu’ils soient contrôlés ou
non, sont, cette année, d’un prix excessif. Pour certaines variétés, ils
atteignent 20 francs le kilo et davantage. La question d’économie des
plants paraît donc d’actualité. Pour tenter de le résoudre, il nous faut
étudier successivement la densité de la plantation, le calibrage des plants, la
fragmentation et certains procédés particuliers d’économie.
Densité de la plantation.
— Cette densité, autrement dit la quantité de pieds à
l’hectare, dépend de divers facteurs, pour la plupart climatiques. Dans notre
pays, il est notoire que les lignes de plantation sont plus serrées en montagne
qu’en plaine ; dans les zones basses, en raison d’une insolation plus
forte, les plantes ont un feuillage plus ample, d’où la nécessité de les
écarter davantage.
La longitude joue également un certain rôle ; sous les
climats méridionaux, où l’été est souvent sec, on écarte d’habitude les plantes
pour qu’elles souffrent moins du manque d’eau ; d’où une quantité moindre
de pieds à l’hectare.
Enfin, les cultures de sélection offrent une densité plus
forte que la normale en raison de la nécessité où l’on se trouve de produire
beaucoup de tubercules moyens et petits.
Pour nous résumer, on peut dire que l’écartement des lignes
varie en France de 0m,35 à 0m,80 ; de même, la
distance des plantes sur les lignes varie entre 0m,40 et 0m,70.
Calibrage des plants.
— Qu’il s’agisse de plants français ou de plants
étrangers, la livraison par les services officiels de contrôle s’effectue
toujours avec un calibrage déterminé. Le plus commun de ces calibrages est le
40-120, ce qui signifie que le poids des plants fournis varie entre 40 et 120 grammes ;
il y a aussi le 120-150 ; pour certaines sortes, on utilise le
40-80 ; pour les variétés potagères, le poids minimum peut descendre à 20 grammes.
Les prix varient légèrement avec les calibrages ; les gros tubercules sont
payés moins cher, en moyenne 150 francs de moins par quintal.
Fragmentation des plants.
— En grande culture, le nombre de pieds à l’hectare
s’élève entre 30.000 et 50.000. Par l’emploi de tubercules entiers d’un poids
moyen de 100 grammes, il faudrait donc 3.000 à 5.000 kilogrammes de
plants, ce qui est excessif. Force est donc, si on veut réduire le coût des
plants, d’employer des tubercules petits et de fragmenter les moyens et les
gros.
Les inconvénients de la fragmentation sont bien connus. La
coupure des plants est une porte ouverte aux champignons, aux bactéries et aux
virus. Si la levée est lente à se produire par suite d’un temps froid et humide
au printemps, des irrégularités s’observent dans les plantations en raison de
la pourriture de certains tubercules coupés. On modère, nous l’avons expliqué,
ces inconvénients en prenant deux précautions : en désinfectant la lame du
couteau ; en fragmentant quelque temps à l’avance sans enlever
immédiatement les morceaux ; ces derniers sont séparés au moment de la
plantation,
Signalons que certaines variétés de grande culture résistent
assez bien au coupage ; d’autres, au contraire, notamment les sortes
potagères, y sont très sensibles.
En culture de sélection, la fragmentation tend à se
restreindre de plus en plus ; on préfère payer plus cher et utiliser des
tubercules entiers d’un calibrage faible.
La fragmentation transversale.
— Un procédé permettant une économie de portions de
tubercules pour des fins alimentaires consiste dans le coupage transversal. La
fragmentation normale, on le sait, se pratique dans le sens de la longueur,
c’est-à-dire du sommet à la base ou talon. Mais, si on veut économiser une
partie du tubercule, on peut sectionner toute la base, laquelle est réservée à
l’alimentation ; le sommet seul sert de plant, car les yeux y sont plus
nombreux et mieux développés. À la condition qu’aucune altération ne se développe
dans la suite, le procédé ne nuit guère au rendement global.
Dans quelques régions françaises, le Midi en particulier, et
avec des variétés robustes telles que la Flourbal et l’Institut de
Beauvais, on utilise les gros tubercules de la façon suivante : on
fragmente dans tous les sens, de façon que chaque morceau soit pourvu d’un œil
bien visible ; on obtient ainsi du même tubercule quatre à six fragments
pesant chacun de 25 à 40 grammes. On arrive à planter un hectare avec
1.000 kilogrammes de plants.
Quelques procédés particuliers.
— Les horticulteurs utilisent parfois d’autres procédés
assez délicats. Le plus commun consiste à enlever chaque œil avec une rondelle
de chair d’un diamètre de 1cm,5 à 2 centimètres et autant de
profondeur. La partie restante du tubercule peut être consommée ; les
yeux, avec leur talon de chair, servent à la plantation.
De simples pelures de pommes de terre, à la condition
qu’elles soient coupées un peu épaisses, peuvent encore servir à la plantation.
Ces pelures donnent de nombreuses plantules. Si la densité de ces plantules est
trop élevée, on peut en arracher quelques-unes délicatement avec leurs racines
pour les planter à demeure dans un terrain frais et bien fumé.
J’ai même vu des germes blancs allongés, récoltés sur des
tubercules conservés en cave, prendre en terre par bouturage. Ce fait nous
montre combien la pomme de terre est une plante rustique.
Cl. PERRET.
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