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Du beurre au maximum

La question du rapport.

— De toutes les matières grasses utilisables aux apprêts culinaires, le beurre est l’une de celles dont la pénurie se fait le plus sentir auprès des ménagères chargées d’assurer le service de la table familiale. Cette carence vivrière peut être attribuée au rationnement anormal des vaches laitières, du fait de la sécheresse qui a réduit les ressources fourragères en foin, paille, betteraves, ainsi qu’en résidus industriels, notamment en tourteaux.

En outre, du fait des prélèvements effectués sur une production amenuisée au profit des prioritaires, et de la préférence marquée accordée à l’industrie fromagère, apparemment plus rémunératrice que l’industrie du beurre, les stocks consacrés à la beurrerie sont extrêmement faibles.

Si on ajoute à cela les pertes imputables à une mauvaise technique, écrémage et barattage défectueux, on comprend que les fabrications beurrières soient de plus en plus délaissées.

En réalité, le beurre, exigeant une main-d’œuvre supplémentaire, devrait faire ressortir le litre de lait à un prix supérieur à celui de la vente en nature. Il suffirait, pour cela, de ne pas abandonner de matière grasse dans le lait maigre et dans le babeurre, afin d’obtenir un rendement maximum, et d’utiliser intelligemment le lait écrémé à l’élevage des veaux, des porcs et des volailles.

Les raisons du déficit.

— Les anciens procédés d’écrémage à l’air libre n’ayant d’intérêt que si on veut utiliser le lait écrémé à la fabrication des fromages demi-gras, susceptibles d’affinage, la centrifugation devra toujours être poussée à fond, et l’on évitera les pertes par entraînement dans le babeurre.

En premier lieu, lorsqu’on passe au centrifuge un lait refroidi au-dessous de 30°, la séparation des globules gras est toujours incomplète. Il en est de même quand l’écrémeuse est mal réglée, ou que l’on cherche à obtenir une crème très épaisse. Dans un cas comme dans l’autre, au lieu d’un pourcentage d’extraction de 96 à 97 p. 100, on réalisera difficilement 88 à 90 p. 100 de la matière grasse, d’où une perte sèche de 7 à 8 p. 100.

D’autre part, la maturation des crèmes a une influence marquée sur le rendement et la qualité des beurres. Les crèmes douces donnent un beurre fade et sans arôme, et les petits globules se soudent difficilement ; ils restent emprisonnés dans le petit-lait et ils sont perdus pour le producteur. Cependant la maturation ne doit pas être trop poussée, car, au delà d’une certaine acidité lactique, le beurre est mou, difficile à délaiter, sujet à la rancissure.

Les règles de la bonne technique.

— Pour obtenir des beurres surfins, de bonne garde, ni secs ni mouillés, le lait étant à la température de 30 à 35°, on l’écrémera à 12 et même 15 p. 100 de son volume, et l’on poussera la fermentation de la crème à 60° Dornic en été et à 65° Dornic en hiver.

On fera précéder leur introduction dans la baratte d’un rinçage à l’eau froide pendant les chaleurs, ou d’un rinçage à l’eau chaude par temps froid. Suivant le type de baratte en usage, on réglera la vitesse entre 50 et 60 tours à la minute, s’il s’agit de normandes, ou entre 120 et 130 tours avec les danoises, de manière à obtenir la soudure des globules au bout de trente-cinq à quarante minutes.

Dès que le beurre commence à se faire, on cesse de tourner, puis, après avoir ajouté un peu d’eau, douce ou froide, suivant la saison, on donne quelques tours de manivelle pour amener le grain à la grosseur d’un pois. On soutire ensuite le plus gros du babeurre, que l’on remplace par la même quantité d’eau froide ou tempérée, et l’on tourne lentement pour amener le beurre à la grosseur d’une noix. On continue les soutirages et les lavages jusqu’à ce que l’eau sorte bien claire de la baratte. Il n’y a plus qu’à passer le beurre sous le malaxeur, et l’on attend qu’il soit raffermi pour le mettre en pains.

Calcul de rendement.

— Un bon beurre, comme celui d’Isigny, possède une composition qui se rapproche de la suivante :

Matières grasses 863 grammes.
Eau 126
Caséine et sels 7
Sucre de lait 4
 
Total
———
1.100
 
grammes.

Admettons que ce beurre provienne d’un lait contenant 4 p. 100 de graisse, turbiné à 15 p. 100 ; le rendement, rapporté au poids du lait, devrait donner 4kg,353 de beurre par quintal, soit 4kg,483 par hectolitre. Ce rendement serait évidemment plus faible si la teneur du lait n’était que de 3,5 p. 100 ou de 3 p. 100 seulement. Il lui serait supérieur si sa richesse butyrique était de 4,5 p. 100 et de 5 p. 100.

Les facteurs de rendement sont donc variables suivant la richesse des laits. Ils ont été établis par Dornic. On peut donc savoir ce que doivent rendre des laits dosant respectivement :

Graisse 3 p. 100 3,5 p. 100 4 p. 100 4,5 p. 100 5 p. 100
Facteurs 1,10 1,11 1,12 1,13 1,14

En multipliant le facteur 1,12 par 100 litres de lait contenant 4 p. 100 de graisse, le rendement minimum devra être de :

4 x 1,12 = 4kg,480.

Des laits titrant 3,5 p. 100 et 4,5 p. 100 rendraient respectivement 3kg,885 et 5kg,085, etc.

Dans le cas où les rendements seraient inférieurs à ces chiffres, on en rechercherait la cause et on y remédierait en réformant la technique de l’écrémage et du barattage.

C. ARNOULD.

Le Chasseur Français N°618 Février 1948 Page 35