La seconde émission (1) des chiffres penchés (inclinados),
d’un format plus normal que précédemment, vit le jour en 1844-1846. C’est
probablement la série la plus intéressante pour l’étudiant, parce que la moins
connue. Les blocs et multiples sont rares, tout particulièrement dans les
grosses valeurs. Ce n’est que depuis peu que l’on sait que les timbres de cette
émission étaient imprimés non pas par feuilles de 200 comme supposé, mais par
feuilles de 153 (9 x 17), ce nombre bizarre et imprévu s’adaptant
exactement aux feuilles de papiers précédemment utilisés pour l’impression des
« œils-de-bœuf ».
Malgré leur rareté indéniable, les blocs de cette émission
n’atteignent pas des prix extraordinaires. Récemment, l’on vendait à New-York
un superbe bloc de six du 180 R, présumé la pièce la plus importante de ce
timbre. Il ne fit que 1.550 dollars, soit seulement le prix de dix unités.
Des pièces uniques faisant des primes aussi faibles, c’est dire s’il faut être
prudent dans les évaluations de variétés secondaires de peu d’intérêt !
Rareté des lettres originales, en particulier celles portant
les grosses valeurs. Les gens serviables désireux de remédier à cette pénurie
naturelle ne manquant pas, il convient de prendre toutes ses précautions avant
d’acheter de pareilles pièces. La même vigilance sera de mise à l’égard des
blocs et multiples, lesquels ont souvent subi des rafistolages pour les mêmes
raisons que ceux de la première émission et qui, encore, ont été quelque peu
« améliorés » sur les bords, le mauvais alignement des timbres ayant
souvent amené des coups de ciseaux malencontreux.
Pas mal de faux, peu dangereux, sauf une imitation
particulièrement réussie des tirages sur planches usées, ce qui permit
astucieusement d’esquiver la reproduction délicate du fond guilloché de
sécurité.
La série des chiffres se termine par les émissions des
petits chiffres droits, noirs et couleurs, lesquelles ne constituent pas
précisément une réussite artistique. C’est probablement pourquoi, malgré de
nombreuses variétés de planches, retouches et autres, ces timbres sont plutôt
délaissés. Les blocs importants ne sont pas rares et ne valent qu’une prime
médiocre, sauf pour les grosses valeurs. L’étude des oblitérations sur timbres
détachés est pratiquement impossible, car elles continuent d’appartenir au même
type d’origine de grand format, alors que celui des timbres tend de plus en
plus à la réduction.
Les lettres originales deviennent moins rares et offrent
souvent des variétés de tarifs ou d’usage très intéressantes à étudier. Notons,
en passant, que les lettres portant des chiffres d’émissions différentes sont
aussi rares que recherchées, malgré leur absence de signification particulière.
Et, pour en finir avec les chiffres, signalons l’utilisation du 20 reis de
1850 en compagnie des timbres don Pedro des émissions suivantes, et cela
aussi tard que 1870 : problème philatélique non encore élucidé.
Avec les timbres des émissions suivantes, à l’effigie de don Pedro,
nous abordons un genre nouveau. Timbres gravés, de la fabrication américaine de
la grande époque et encore aux trois quarts artisanale, d’une technique jamais
dépassée et offrant toutes les variétés de planches habituelles aux premières
émissions gravées. Comme, d’autre part, ces vieux classiques sont encore d’un
prix abordable aux petites bourses, ils offrent un champ remarquable pour des
études de planchage plus ou moins spécialisées.
C’est du moins ainsi qu’on le comprend à l’étranger. Car, en
France, ces timbres sont plutôt recherchés pour les oblitérations, ce qui se
comprend beaucoup moins. Si celles-ci présentent une grande variété de dessins
(en grande partie du type des motifs des oblitérations américaines de la même
époque), leur rareté est médiocre et leur beauté artistique à démontrer. Sans
doute faut-il voir là les effets d’une mode, peut-être pas très spontanée. Quoi
qu’il en soit, bien peu d’oblitérations soi-disant rares méritent seulement une
mention, sauf sur lettres, lesquelles posent souvent des problèmes
philatéliques très intéressants.
Parmi les lettres originales les plus recherchées, indiquons
entre autres : celles portant des timbres coupés utilisés pour partie de
leur valeur (très rares et très imitées), les transits maritimes, les
oblitérations de chemins de fer, les affranchissements combinés, etc. Notons en
passant que les lettres brésiliennes portant des don Pedro sont beaucoup
plus rares que l’époque pourrait le faire supposer, bien davantage que bien des
lettres provenant d’autres républiques sud-américaines, même d’émissions antérieures.
À noter aussi le nombre relativement important de lettres adressées en
Allemagne et correspondant sans doute aux premiers établissements allemands au
Brésil et qui devaient tellement se multiplier par la suite.
Contrairement aux différents chiffres, les don Pedro ne
présentent pour ainsi dire aucune imitation notable : les timbres gravés
de la grande époque n’ont jamais constitué une matière facile à imiter. Se
méfier toutefois de certaines pièces à grandes marges, très finement gravées,
sur différents papiers, en différentes nuances ; ce ne sont point des
tirages sur coins de graveurs, mais uniquement des pièces découpées dans des
feuilles d’échantillons de timbres-poste de l’American Bank-Note Cy, où
elles figuraient comme spécimens en compagnie d’autres productions de la
firme : timbres de New-York, divers Canada, New-Brunswick et Terre-Neuve,
Nicaragua, Mexique, etc. ...
M.-C. WATERMARK.
(1) Voir Le Chasseur Français de février-mars
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