Le cinématographe n’a pu prendre naissance, en 1895,
qu’après l’apparition de la photographie ; mais, par un juste retour, la
technique photographique a bénéficié des progrès accomplis en cinématographie,
et l’on peut retrouver sur les modèles d’appareils photographiques les plus
récents les principes des dispositifs utilisés pour les prises de vues
cinématographiques. Cette évolution n’est, d’ailleurs, pas terminée ; pour
les usages professionnels et semi-professionnels, et, plus encore, pour les usages
d’amateur, on utilise désormais des films étroits, de 16, de 9,5, ou
même de 8 millimètres de large seulement, employés dans des caméras, et
des projecteurs très réduits.
On discerne déjà également l’influence du cinématographe
réduit sur la construction et l’emploi des appareils photographiques de
l’avenir. « De plus en plus petit, de plus en plus précis, de plus en plus
automatique », tels sont les trois slogans de la photographie d’amateur.
Sa diffusion est due à l’avènement des appareils foldings
à pellicules, faciles à charger en plein jour et à transporter, et dont le
prototype était constitué par le fameux Vest-Pocket. « Pressez sur le
bouton, et nous ferons le reste », telle était la devise de la plus grande
des sociétés photographiques américaines.
Cette tendance a amené la création d’appareils assurant un
maximum de facilité et de rapidité de manœuvre, et permettant des résultats
pouvant satisfaire même les professionnels.
C’est vers 1925 qu’a été créé, pour la première fois,
l’appareil miniature de petit format, dont le prototype était le Leica, et dont
la caractéristique essentielle consistait dans l’emploi du film
cinématographique standard de 35 millimètres. Seul, ce film pouvait
permettre à un appareil de petit format de fournir de grandes épreuves
positives par agrandissement, en partant de petits négatifs. L’émulsion
sensible utilisée pour la prise de vues animées se distingue, en effet, des
plaques et des pellicules ordinaires par son grain excessivement fin,
qui permet des agrandissements considérables exigés pour la projection
cinématographique. Le format de l’image cinématographique muette est 18 X 24
millimètres ; les promoteurs des appareils miniatures se décidèrent à
adopter le double de l’image cinématographique en largeur, soit 24 X 36
millimètres, mais il fallait résoudre différentes questions, et, en
particulier, celle du chargement du film en plein jour.
Les appareils miniatures actuels, qui peuvent se mettre en
poche facilement, et dont le poids ne dépasse guère 500 grammes, en
général, sont chargés avec du film cinématographique en cartouche, sans bobine
de papier protecteur.
Le film de 35 millimètres de largeur, avec des
perforations latérales, est ainsi placé dans un chargeur magasin ou cartouche,
en forme de tambour cylindrique contenant une bobine, dont le moyeu fait
saillie à une extrémité, pour permettre le déroulement et le réenroulement du
film avant qu’on le sorte du boîtier en plein jour. Le film sort de la
cartouche dans une fente, suivant une génératrice, avec des lèvres de velours
formant joints. L’autre extrémité, formant amorce, est engagée dans un
logement, et, quand toutes les vues ont été prises, le film est ramené dans la
cartouche en agissant simplement sur un bouton de réembobinage. La longeur
normale de 1m,80 correspond à 36 vues 24 X 36 millimètres.
Les appareils modernes de petit format sont généralement de
haute précision et ont un boîtier entièrement métallique aux extrémités
arrondies, recouvert de maroquin ou de caoutchouc ; le dos est
généralement amovible.
Les émulsions ont été constamment perfectionnées et sont de
plus en plus sensibles, malgré la nécessité souvent incompatible de maintenir
la finesse du grain. On utilise normalement, cependant, des objectifs à grande
ouverture et très lumineux, de F : 3,5 à F : 1,5, et les nouveaux
procédés de traitement des lentilles par une couche fluorurée extrêmement
mince, diminuant les pertes de lumière, augmentent encore le contraste et la
luminosité.
Étant données les petites dimensions des négatifs, les
distances focales de ces objectifs sont cependant réduites. La valeur normale
est de 50 millimètres pour le format de 24 X 36 millimètres, par
exemple ; elle s’abaisse à 40 millimètres pour le 24 X 24.
Cette distance focale très courte conserve le bénéfice d’une grande profondeur
de champ, malgré la grande ouverture des objectifs.
Cependant, pour obtenir l’extrême précision de la prise de
vues, nécessaire surtout lorsqu’on utilise une grande ouverture de diaphragme,
il est devenu indispensable d’effectuer une mise au point absolument précise
pour les objets rapprochés. Cette opération est facilitée sur un grand nombre
de modèles perfectionnés par l’emploi d’un télémètre ou d’un système réflex
à miroir, avec objectif supplémentaire ou non.
Toutes les manœuvres pour l’armement de l’obturateur et
l’avancement du film ont été également simplifiées ; il suffit désormais
de tourner une manivelle ou un bouton, de presser sur un levier, ce qui évite
toute perte de temps et tout risque de surimpressions. Il existe même des
appareils complètement automatiques à mécanisme à ressort faisant fonctionner
l’obturateur et avancer le film sans intervention de l’opérateur.
De très nombreux modèles ne comportent pas un seul objectif,
mais peuvent permettre l’adaptation très rapide d’objectifs interchangeables de
différentes focales, et, par conséquent, à champ variable, suivant la nature du
sujet considéré. D’autres modèles permettent la prise de vues stéréoscopiques,
c’est-à-dire l’examen des vues en relief.
Ces appareils de haute précision n’exigent pas pour leur
manœuvre des connaissances techniques approfondies ; des indicateurs
automatiques facilitent la tâche de l’amateur. C’est ainsi que des posemètres à
cellules photo-électriques indiquent parfois d’une façon approximative la durée
du temps de pose, choisie en fonction de l’ouverture du diaphragme.
L’évolution des appareils de petit format n’est pas
terminée ; nous voyons déjà apparaître des appareils ultra-miniatures de
poche qui ne sont guère plus encombrants que de gros briquets, et qui
comportent cependant la plupart des perfectionnements des appareils
modernes : obturateur à vitesse variable, télémètre couplé avec
l’objectif, etc. Pour le moment, le développement de ces
« micro-caméras » reste pourtant lié aux perfectionnements des émulsions
photographiques des films de format réduit, et leur emploi paraît limité encore
à des usages particuliers.
P. HÉMARDINQUER.
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