La récolte par l’apiculteur s’effectue dès que le miel est
operculé, vers la fin de la miellée. Elle varie selon la région où est situé le
rucher.
En plaine, on peut généralement récolter après la floraison
des tilleuls, vers fin juin ou début juillet ; tandis qu’en montagne et
dans les contrées de bruyères et de sarrasins, le mois de septembre convient
mieux. À moins que l’on ne préfère opérer aux deux époques pour séparer les
miels, ceux de printemps étant plus clairs et plus appréciés.
Avant de procéder à cette opération, il faut bien se dire
que les abeilles ont amassé des provisions pour leur hivernage ; aussi
soyons modérés dans les prélèvements pour ne pas avoir la désagréable surprise
de trouver des colonies mortes de faim par notre faute pendant la mauvaise
saison. Il faut au minimum 15 à 20 kilogrammes de réserves. Un cadre
Dadant bien plein pèse environ 4 kilogrammes.
En conséquence, nous laisserons la part nécessaire à la
colonie et nous prendrons le reste ... s’il y en a.
Il y a toujours intérêt à assurer de larges provisions, la
colonie se développera plus rapidement aux beaux jours. Comme la consommation
est la même, il n’y a rien à perdre de procéder ainsi.
Vérifier si le bas, ou nid à couvain, contient suffisamment
de miel avant d’enlever la hausse, sinon il faudra nourrir ou laisser quelques
cadres de hausse garnis.
Cette question entendue, venons-en à la récolte proprement
dite qui peut se faire, comme nous l’avons déjà vu, lorsque le miel est
operculé, c’est-à-dire recouvert d’une mince pellicule de cire qui l’abrite du
contact de l’air, ce qui indique qu’il est arrivé à maturité.
Le prélèvement doit être exécuté rapidement, mais non
brutalement ; les abeilles ne trouvant plus grand’chose à butiner sont
facilement portées à piquer. De plus, il faut éviter le pillage, en laissant
les ruches découvertes le moins de temps possible.
L’enlèvement des rayons peut s’opérer de trois façons :
1° En enlevant la hausse débarrassée auparavant des
butineuses par le plateau chasse-abeilles.
2° En prenant cadre par cadre et en brassant les abeilles
devant la ruche au fur et à mesure.
3° En refoulant les occupants de la hausse dans le bas au
moyen de la fumée.
Nous ne conseillons pas la première méthode qui exige le
placement du plateau chasse-abeilles la veille. De plus, la propolis colle
souvent le plateau à la hausse, d’où opération inutile.
La deuxième façon d’opérer est déjà préférable pour celui
qui a peu de cadres à enlever, mais elle excite vite les abeilles et il faut se
méfier du pillage en abritant les cadres dans une caisse dès qu’ils sont
brossés.
Notre préférence va à l’enlèvement de la hausse d’un bloc,
après avoir fait descendre les abeilles dans le nid à couvain par un copieux
enfumage. Ce procédé est rapide. Avec un peu d’habitude, la colonie n’a pas le
temps de se fâcher, n’étant pas importunée par les pillardes. Évidemment, il
faut refermer la ruche aussitôt la hausse prélevée. Il reste bien quelques
abeilles dans cette dernière, mais c’est un petit inconvénient. Avec un plateau
chasse-abeilles placé sur le dessus, elles s’envoleront vite pour rejoindre
leur ruche.
Pour les petits ruchers, nous employons une variante de la
troisième méthode. Après avoir enfumé et fait descendre les abeilles dans le
bas, mettre le plafond entre la hausse et le nid à couvain. Ainsi, on n’est
plus en contact avec le gros des abeilles pour prélever les cadres un par un en
les brossant avant de les poser dans la caisse à cadres.
Les hausses sont ensuite portées au laboratoire pour
l’extraction qui doit se faire le plus tôt possible, le miel tiède coulant plus
facilement que lorsqu’il est refroidi.
Cette opération sera exécutée dans une pièce bien
close ; sinon, les abeilles, attirées par l’odeur du miel, auraient vite
fait de l’envahir et de rendre le travail impossible.
On procède d’abord à la désoperculation des cadres au moyen
d’un couteau spécial chauffé à la vapeur d’eau. Le cadre est posé sur un
chevalet pour avoir les mains libres. La cire d’opercules est enlevée d’un côté
seulement, puis le cadre est placé dans l’extracteur, le côté ouvert vers
l’extérieur. Lorsque la cage de l’extracteur est garnie de cadres, placer un
récipient précédé d’un tamis devant le robinet ; puis tourner d’abord
lentement la manivelle pour ne pas briser les rayons. Désoperculer ensuite
l’autre côté des cadres. Dès ce moment, il faut tourner un peu plus vite, le
temps nécessaire pour vider les rayons.
Une fois vides, on les remet dans les hausses, lesquelles
sont replacées le soir seulement sur les ruches pour éviter le pillage. Elles y
resteront jusqu’aux premiers froids. Les abeilles les lécheront et la cire sera
protégée du papillon de la fausse teigne, particulièrement à craindre à cette
saison.
Le miel extrait est transféré dans un maturateur où il
s’épure pendant quelques jours. Les impuretés et débris de cire montent à la
surface et sont faciles à écumer.
En ouvrant le robinet à clapet à la base du maturateur, le
miel limpide est transvasé dans les récipients dont on dispose : seaux ou
bocaux, qui devront fermer hermétiquement pour éviter la fermentation.
Les apiculteurs professionnels emploient un matériel spécial
afin de faciliter le travail. Les rayons sont désoperculés avec une machine
soit à vapeur, soit électrique, qui permet de traiter plus de 100 cadres à
l’heure. L’extracteur, du type radiaire, qui évite le retournement, contient 20
à 50 cadres et se meut à l’aide d’un petit moteur électrique. Le miel est
transvasé de l’extracteur aux maturateurs, et de là dans les emballages au
moyen de pompes et tuyauteries. Le laboratoire est lui-même agencé
rationnellement avec un quai au niveau du plateau du camion pour le chargement
ou le déchargement à l’aide d’un diable.
Ce n’est pas tout de produire, il faut savoir vendre ce
qu’on ne désire pas consommer soi-même. Pour cela, nous emploierons comme
emballages des récipients de bonne présentation avec notre marque. Seul, le
miel de bonne qualité est vendu à la clientèle. Le deuxième choix, s’il y en a,
sera utilisé pour la nourriture des colonies faibles ou employé à la
fabrication de pain d’épice et d’hydromel.
Dans les relations commerciales, un peu de publicité ne nuit
pas ; cependant, l’honnêteté est aussi une excellente réclame. Un client
content revient et en amène d’autres ; c’est ainsi que se font les bonnes
réputations.
Roger GUILHOU,
Expert apicole.
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