Les années sèches que nous avons traversées ont été très
favorables à la multiplication, dans nos plantations fruitières, de diverses
espèces de cochenilles ou Kermès.
L’attaque de ces insectes est, la plupart du temps,
insidieuse. Elle provoque un dépérissement progressif, souvent rapide, que
l’observateur non averti ne sait trop comment expliquer, et qui se termine par
la mort des branches et parfois de l’arbre tout entier.
En regardant de près les écorces, on s’aperçoit qu’elles
sont, par endroits, recouvertes de croûtes qui se soulèvent lorsqu’on les
gratte, croûtes constituées par des carapaces dont les cochenilles sont
recouvertes. La forme de ces carapaces, de même que leur couleur, permettent de
différencier les espèces dont le mode de vie varie assez sensiblement et dont
certaines sont beaucoup plus redoutables que d’autres.
Parmi les plus dangereuses pour nos arbres fruitiers, il
convient de citer :
La cochenille virgule qui, comme son nom l’indique, a
une carapace ou bouclier, de couleur brune, de 3 à 4 millimètres de
long, affectant la forme d’une virgule. Cette espèce s’attaque surtout au
pommier, quelquefois cependant au poirier.
La cochenille ostréiforme, dont le bouclier est rond,
gris ardoisé, de 2mm,5 de diamètre. On la trouve sur toutes les essences
fruitières, mais surtout sur le pommier et le poirier. Les œufs, pondus au
printemps par les femelles qui ont hiverné, donnent naissance à des larves
pendant l’été, le plus souvent au mois de juin.
La cochenille rouge du poirier, très répandue et dangereuse,
dans le centre de la France, sur les pommiers, poiriers et pruniers. Le
bouclier circulaire, gris sale, de 2 millimètres de diamètre, recouvre une
femelle d’un rouge vineux qui, pondant au printemps de nombreux œufs, propage
rapidement l’espèce. Les jeunes larves apparaissent en juin.
Le pou de San José, originaire de la Chine, qui a
déjà causé des dégâts extrêmement importants en Californie et s’est également
répandu en différentes régions de l’Europe. En France, on a constaté sa
présence sur le littoral méditerranéen, dans la région lyonnaise et plus
récemment dans la Nièvre. La femelle se trouve sous un bouclier circulaire de 1 millimètre
à 1mm,5 de diamètre, de couleur ardoise. Elle-même est jaune-citron
et présente peu de différence avec la cochenille ostréiforme. Elle s’attaque à
tous les arbres fruitiers et même à certains arbres forestiers et d’ornement.
Les espèces les plus redoutables sont la cochenille rouge du
poirier et le pou de San José. En pompant la sève des arbres qu’elles attaquent,
elles les affaiblissent et, d’autre part, les empoisonnent par certaines
toxines qu’elles injectent dans leurs vaisseaux.
La multiplication de ces insectes est rapide, beaucoup plus
encore pour le pou de San José, qui peut avoir plusieurs générations par an,
que pour les autres cochenilles, qui n’ont qu’une génération.
On a pu remarquer que les invasions sont plus graves dans
les vergers habituellement traités avec des bouillies bordelaises riches en
chaux. De sorte qu’on peut conseiller de recourir de préférence aux
oxychlorures de cuivre pour effectuer les traitements préventifs contre les
maladies causées par des cryptogames.
Traitements recommandés.
— Les traitements peuvent être effectués soit en été,
au moment où les larves viennent d’éclore et ne sont pas encore protégées par
un bouclier, soit en hiver. Toutefois, les traitements d’hiver ne peuvent avoir
d’efficacité que contre la cochenille ostréiforme, la cochenille rouge du
poirier et le pou de San José. La cochenille virgule, très bien protégée par sa
carapace, ne peut être atteinte par les traitements d’hiver.
Les produits les plus efficaces sont les huiles blanches
ou huiles de pétrole. Elles s’utilisent en hiver à la dose de 3
p. 100 environ et pendant le cours de la végétation à 1 p. 100. Elles
recouvrent la carapace de l’insecte d’une couche très mince, mais continue,
l’isolant complètement de l’air extérieur et provoquant une asphyxie rapide.
En juin, l’huile blanche peut être simplement ajoutée aux
bouillies cupro-arsenicales qu’on utilise à cette époque contre la tavelure et
le carpocapse. Par contre, elle ne doit pas être mélangée avec les produits de
traitement renfermant du soufre, comme, par exemple, les bouillies
sulfocalciques. Il convient d’observer, en outre, un intervalle d’une quinzaine
de jours entre le traitement aux huiles blanches et celui avec un produit
soufré, ou vice versa.
En résumé, on peut affirmer que, bien faits, les traitements
contre les cochenilles donnent, à l’heure actuelle, d’excellents résultats et
permettent d’atténuer considérablement les dégâts de ces dangereux parasites.
E. DELPLACE.
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