La Colombie est un pays peu connu des philatélistes
français. Ce qui n’empêche que c’est l’un des plus intéressants à spécialiser
qui soient, le plus intéressant peut-être aux prix actuels, qui ne reflètent
que de très loin la rareté indéniable de nombreuses pièces.
L’histoire postale, en particulier, est passionnante et
encore très peu connue, le champ étant libre pour les étudiants spécialistes.
La position géographique de ce pays, en plein centre du continent américain et
à cheval sur les deux océans principaux, marquait à l’avance la Colombie comme
voie de passage et de transit. Et aussi malheureusement d’ennuis politiques
graves, dont le brigandage de Panama n’est que le plus connu. Depuis toujours,
pourrait-on dire, l’isthme servit de voie de passage vers le Pacifique. Un
service postal officiel, par mules, assurait tant bien que mal le
transbordement du courrier, et ceci pendant toute la première partie du XIXe siècle.
Les aléas de ce service étaient tels que le gouvernement britannique obtint en
1845 le droit d’employer ses propres messagers. Les lettres étaient alors
affranchies aux tarifs britanniques et payaient en plus un droit de transit de
2 réales par once, soit un franc or environ. Ces lettres sont très rares,
et d’autant plus recherchées qu’elles comportent en outre des marques postales
d’arrivée des divers pays du Pacifique.
Après la construction du chemin de fer, des services postaux
de transit français et américains entrèrent en compétition avec les
britanniques, mais, dans l’ensemble, malgré de longues controverses avec les
autorités de Colombie et des mesures discriminatoires de la part de celles-ci,
le courrier anglais resta le plus important ; et cela jusqu’à l’adhésion
de la Colombie à l’Union postale en 1881.
Les bureaux anglais de Colombie furent approvisionnés en
timbres britanniques : Panama de 1865 à 1884 ; oblitérés C35, Carthagena,
C56 ou C65 et Santa-Martha, C62, de 1865 à 1881 ; Colon (Aspinwall)
seulement de 1870 à 1881 ; oblitérés E88 et enfin Savanilla, F69, de 1872
à 1881. Comme ailleurs, timbres de 1 penny, quatre et six pence et de un
shilling. L’oblitération Panama est l’une des moins rares d’Amérique latine et
vaut de quatre à six shillings de prime. Colon vient ensuite avec une valeur
double. Les autres bureaux, qui étaient en dehors de la voie de transit
proprement dite, n’ont laissé que très peu de lettres. Savanilla, dont
l’activité fut courte, fut la voie normale vers Barranquilla et la capitale
lors de l’achèvement du chemin de fer en 1871. Malgré cela, ses oblitérations
ne sont pas communes et valent une demi-livre pour le 4 d.,le double
environ pour le 1 d. et le shilling, et au moins deux livres pour le six
pence. Carthagena est de la même rareté que Colon pour les grosses valeurs,
mais très difficile à trouver en petits timbres, lesquels font prime de deux
livres au moins pour le 1 d. et de dix shillings pour le 4 d. Le plus
rare de tous est Santa-Martha, alors bien plus proche du village que de la
ville. Le 4 d. ne vaut guère que quinze shillings, mais les autres valeurs
dépassent largement la livre, surtout le 1 penny, qui est quasi
introuvable.
Toutes ces primes sont à multiplier par trois ou quatre pour
les oblitérations semi-rares, par sept ou huit et davantage pour les bureaux
rares, lorsque timbres sur lettres originales, oblitération complète bien
lisible. Par ailleurs, les marques anglaises de transit ont une certaine valeur
par elles-mêmes.
La grande île de Cuba fut longtemps convoitée par les
Anglais, qui s’y implantèrent de très bonne heure. Un centre postal fonctionna
dès 1762, et il fut sans doute très important, car les marques postales de
cette origine, malgré la date éloignée, ne sont considérées que comme
demi-rares. Un bureau consulaire anglais fonctionna dans la première partie du
XIXe siècle à La Havane. Le volume du courrier fut très
important, car il centralisa non seulement celui de l’île, mais aussi transita
celui du Mexique et du Honduras.
Ce bureau fut approvisionné en timbres britanniques de 1867
à 1877, oblitération C 58. Les 4 d. et 1 shilling, qui
correspondaient aux tarifs courants, ne sont pas très rares et, en détachés, ne
valent guère que dix shillings de prime. Par contre, le 1 d. et 6 d.
furent peu utilisés et valent au moins deux livres en détachés, cinq ou six
fois cette prime sur lettres. Un bureau secondaire fonctionna à Santiago de
Cuba, oblitération C 88. Au contraire de La Havane, les basses valeurs
sont les moins rares et valent un peu moins que la livre. Le 6 d. est
vraiment rare plus de deux livres de prime et le shilling encore davantage, et
rarement rencontré. Ces deux timbres sur lettres sont très rares, pour ne pas
dire introuvables.
M. C. WATERMARK.
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