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Le nouveau régime des loyers d'habitation

Le nouveau régime des loyers d’habitation vient d’être institué par la loi du 1er septembre 1948, qui comporte 103 articles et 30 colonnes du Journal Officiel.

1° Champ d’application de cette loi.

— Les dispositions de cette loi ne s’appliquent, en principe (quelques articles seulement ont une portée générale), que dans les communes suivantes :

    a. Paris ;

    b. Dans le département de la Seine ;

    c. Dans un rayon de 50 kilomètres de l’emplacement des anciennes fortifications de Paris ;

    d. Dans les communes de plus de 4.000 habitants ou distantes de moins de 5 kilomètres de villes de 10.000 habitants ;

    e. Dans les communes où le dernier recensement accuse une augmentation de population municipale d’au moins 5 p. 100 sur le dernier recensement ;

    f. Dans les communes figurant sur les listes de localités sinistrées.

Ces dispositions ne concernent que :

    a. Les locaux d’habitation ;

    b. Les locaux à usage professionnel sans caractère commercial ou industriel, ou ne relevant pas du statut du fermage ;

    c. Les locaux affectés à l’exercice d’une fonction publique dans lesquels l’habitation est indivisiblement liée au local utilisé pour ladite fonction.

Elles ne visent en principe que les logements construits ou achevés avant la promulgation de la loi, c’est-à-dire avant le 1er septembre 1948.

2° Du maintien dans les lieux des locataires.

— La loi du 1er septembre 1948 accorde de plein droit et sans l’observation d’aucune formalité aux occupants de bonne foi leur maintien dans les lieux.

Ce maintien dans les lieux, qui constitue un régime permanent de stabilisation des locataires remplace le régime des prorogations successives et de courte durée qui avait fonctionné jusqu’ici.

Sont réputés de bonne foi les locataires, sous-locataires, cessionnaires de baux à l’expiration de leur contrat, ainsi que les occupants qui, habitant dans les lieux en vertu ou en suite d’un bail écrit ou verbal, d’une sous-location régulière, d’une cession régulière, d’un bail antérieur ou d’un échange, exécutent leurs obligations.

Le maintien dans les lieux est également reconnu, en cas de décès de l’occupant, aux membres de sa famille vivant habituellement, avec lui depuis plus de six mois.

Toutefois cet avantage du maintien dans les lieux des locataires peut être contrarié par les restrictions que comporte ce principe ou annulé par le droit de reprise conféré, dans certains cas, au propriétaire.

3° Restrictions au maintien dans les lieux.

— N’ont pas droit au maintien dans les lieux, notamment, les locataires se trouvant dans l’un des cas suivants :

    a. Ayant fait l’objet d’une décision judiciaire d’expulsion devenue définitive ;

    b. Qui n’ont pas assuré par eux-mêmes ou par les membres de leur famille vivant habituellement avec eux l’occupation effective des lieux loués ; cette occupation doit durer au moins huit mois par an ;

    c. Qui ont plusieurs habitations, sauf pour celle constituant leur principal établissement ;

    d. Qui occupent des locaux de plaisance, pour lesdits locaux ;

    e. Qui, dans les communes visées par l’ordonnance du 11 octobre 1945 relative à la crise du logement, n’occupent pas suffisamment les lieux ;

    f. Dont le titre d’occupation est l’accessoire du contrat de travail ;

    g. Qui, dans les stations balnéaires, thermales, climatiques, occupent des locaux habituellement affectés, avant le 2 septembre 1939, à la location saisonnière ou occupés pendant la saison par leur propriétaire ;

    h. Qui ont à leur disposition ou peuvent recouvrer par l’exercice du droit de reprise un logement correspondant à leurs besoins et à ceux des membres de leur famille vivant habituellement avec eux.

4° Droit de reprise du propriétaire.

— Le droit de reprise du propriétaire se trouve facilité par rapport à ce qu’il était sous la législation antérieure.

Ce droit est reconnu, dans les trois cas suivants, au propriétaire qui veut reprendre son immeuble pour l’habiter lui-même ou le faire habiter par son conjoint, ses ascendants ou descendants ou ceux de son conjoint. Toutefois, dans le troisième cas, le droit de reprise ne peut jouer qu’au profit du propriétaire seulement.

Premier cas.

— Le propriétaire doit mettre à la disposition du locataire contre lequel il exercera le droit de reprise un logement en bon état d’habitation, équivalent à celui qui fait l’objet de la reprise et correspondant aux besoins et aux possibilités du locataire.

Deuxième cas.

— Le propriétaire doit prouver que le bénéficiaire de la reprise ne dispose pas d’une habitation correspondant à ses besoins normaux et à ceux des membres de sa famille vivant habituellement avec lui.

Pour que ce droit de reprise puisse s’exercer, il faut aussi que l’immeuble loué n’ait pas été acquis à titre onéreux par le bailleur après le 1er septembre 1939.

De plus, le bénéficiaire de ce droit de reprise est tenu de mettre à la disposition du locataire dont il reprend les locaux le logement qu’il pourrait laisser lui-même.

Troisième cas.

— Ce droit de reprise peut être exercé par les propriétaires :

    a. Fonctionnaires, employés, ouvriers, logés par l’administration ou leur entreprise, qui justifient de leur mise à la retraite ou de la cessation de leurs fonctions ;

    b. Français ayant exercé leur activité hors de France pendant cinq ans et rejoignant la métropole ;

    c. Sinistrés, réfugiés, prisonniers, déportés, sous certaines conditions.

Le droit de reprise prévu aux deuxième et troisième cas ci-dessus ne peut jouer pour des locaux occupés professionnellement au 1er septembre 1948.

5° Du prix des loyers.

1° LOYER PRINCIPAL.

— À partir du 1er janvier 1949, le prix du loyer pourra être fixé à l’amiable entre le propriétaire et le locataire, ou, à défaut d’accord, par application des règles suivantes :

La valeur locative d’un logement est égale au produit de la surface corrigée par le prix de base du mètre carré de chacune des catégories de logements. Ces deux éléments de calcul (surface corrigée et prix de base du mètre carré) doivent être fixés par deux décrets.

La surface corrigée sera obtenue en affectant la surface réelle des pièces et autres parties du logement de taux correctifs qui tiennent compte notamment de la hauteur du plafond, de l’éclairement, de l’ensoleillement, de la vue de chacune de ces parties du local.

Le prix de base du mètre carré est déterminé, pour les différentes catégories de logement, en fonction de la qualité de leur construction et, le cas échéant, suivant la localité dans laquelle ils sont situés.

Indépendamment de ce prix de base du mètre carré, le décret fixera un prix du mètre carré tel que le loyer au 1er janvier 1949 d’un logement de deux pièces, d’un confort réduit et situé dans un immeuble de cinquante années d’âge, de qualité ordinaire, atteigne 4p. 100 du salaire servant de base au calcul des prestations familiales.

Le prix du mètre carré sera majoré chaque semestre d’une somme telle que le loyer du logement visé ci-dessus soit augmenté de 0,8 p. 100 du salaire de base, et ce pendant cinq ans. Les taux de majoration seront fixés par décret.

En aucun cas, ce calcul ne pourra avoir pour effet de porter le loyer à un chiffre supérieur à la valeur locative définie au deuxième alinéa ci-dessus du présent titré.

Le propriétaire devra, avant le 1er janvier 1949, faire connaître à chaque locataire, par lettre recommandée avec accusé de réception ou par exploit d’huissier, avec justifications à l’appui, la valeur locative des locaux qu’il occupe.

Le locataire devra, s’il y a lieu, contester cette valeur locative dans les deux mois de cette notification, à peine de forclusion.

Observation importante.

— Les parties pourront, d’un commun accord, ne pas appliquer les règles précitées et fixer le loyer en prenant pour base celui pratiqué au 1er juillet 1948 et en majorant chaque semestre d’une somme égale au tiers du prix pratiqué au 1er juillet 1948.

Le total de ces majorations successives ne devra pas dépasser 400 p. 100 de ce prix pratiqué au 1er juillet 1948.

Cet accord pourra être dénoncé.

2° PRESTATIONS.

— À partir du 1er janvier 1949, le propriétaire aura également le droit de demander à ses locataires le remboursement, sur justifications :

    a. Des prestations (tapis, ascenseur, éclairage et chauffage des parties communes de l’immeuble, frais de vidange) ;

    b. Des taxes locatives (taxes de balayage, de déversement à l’égout et d’enlèvement des ordures ménagères) ;

    c. Des fournitures individuelles (eau chaude et eau froide, chauffage, ramonage des cheminées, etc.).

N.-B. — Lorsque les décrets d’application auront été publiés nous reviendrons sur cette question un peu confuse du prix des loyers.

(À suivre.)

L. CROUZATIER.

Le Chasseur Français N°623 Décembre 1948 Page 277