Il est naturel que le vigneron ait cherché les moyens
d’obtenir de beaux raisins.
Une ancienne méthode consiste à incurver le long bois de
façon à lui faire exécuter un tour complet ; ce procédé, qui rappelle un
peu la taille en archet, a pour résultat d’aplatir ou de briser les vaisseaux
du liber, situés entre l’écorce et le bois, vaisseaux qui canalisent la
sève élaborée destinée au développement de la partie herbacée et du
raisin ; la sève, ralentie dans son trajet, dirige son trop-plein dans la
jeune rafle.
Mais ce procédé ne vaut pas l’incision annulaire.
Une définition en a été donnée par Chancrin, il nous semble préférable de la
citer en entier : « L’incision annulaire consiste à enlever un anneau
d’écorce de 3 millimètres de largeur à la base des rameaux fructifères
au-dessous des raisins, soit sur les sarments de l’année, soit sur les sarments
de l’année précédente. »
Nous faisons toutefois une réserve sur la largeur de 3 millimètres
indiquée par l’auteur et qui nous semble un peu faible. En pratique, il faut
compter de 5 à 10 millimètres ; trop courte, les tissus incisés se
soudent au bout d’un certain temps ; trop longue, elle peut provoquer le
dessèchement du bois.
Écrivons que la longueur de l’incision sera d’autant plus
grande que le climat est plus froid et plus humide et le sarment plus gros et
plus vigoureux.
Du reste, les incisions doivent toujours se pratiquer sur
des ceps vigoureux.
Au début de ce siècle, des expériences sur la ciselure ont
établi que, pratiquée avant ou au moment de la floraison, elle atténue la
coulure, régularise la floraison, avance la maturité, grossit les raisins et la
grappe.
L’incision doit, en principe, se pratiquer dans les régions
où le climat est humide et froid ; elle est à déconseiller dans les
climats chauds et secs, où elle risquerait de diminuer la vigueur du cépage.
Elle est recommandée pour l’obtention du raisin de table, où
on recherche la perfection de la forme de la grappe autant que sa qualité.
On a également observé que, dans les grappes incisées,
l’aération était meilleure et empêchait le développement du champignon donnant
la pourriture grise.
Sur le bois de taille, on peut la faire de trois semaines
avant la floraison, jusqu’à un mois avant la maturation, lorsque le grain a
atteint la grosseur d’un pois.
L’incision peut se pratiquer sur tous les systèmes de
taille, mais principalement sur les tailles longues, devant disparaître l’année
suivante ; elle se fait à la base des longs bois, au-dessous du premier
pampre qu’ils portent.
Sur les vignes à taille courte, à courson ou côt, l’incision
se fera immédiatement au-dessous de la pousse supérieure (pousse fruitière). Si
l’incision est pratiquée par du personnel féminin, leurs cheveux seront
emprisonnés, car il suffirait qu’un cheveu touche la surface d’un grain pour y
provoquer une altération.
Pour pratiquer l’incision, on prend l’outil d’une main et,
de l’autre, on saisit le brin à inciser. Puis ce dernier est pris entre les
lames de l’outil, auquel on imprime un tour complet de façon à faire une coupe
régulière.
Cette opération demande une certaine habileté, surtout si on
opère sur des sarments herbacés ; il faut bien se garder d’atteindre le
bois, il ne faut détacher que l’écorce.
Les outils à inciser sont nombreux et de formes variables,
beaucoup rappellent celle d’une cisaille dont les parties coupantes sont
taillées en arc de cercle.
Nous conseillons aux débutants de commencer d’inciser sur
les longs bois, appelés aussi taille Guyot, lattes, pisse-vins ... selon
les régions.
V. ARNOULD,
Ingénieur agronome.
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