La présente étude comporte l’examen des dispositions
spéciales relatives aux immeubles sinistrés du fait de la guerre, aux locaux
administratifs, aux locations et sous-locations en meublé, aux habitations à
bon marché.
I. Immeubles sinistrés par faite de guerre reconstruits
ou réparés.
Report du bail sur l’immeuble reconstruit.
— Le bail à loyer des locaux d’habitation ou à usage
professionnel ou affectés soit à une administration publique, soit à l’exercice
d’une fonction publique, situés dans des immeubles détruits ou endommagés par
suite de faits de guerre est reporté sur l’immeuble réparé ou reconstruit même
sur un autre terrain, en remplacement de l’immeuble primitif.
Report des prorogations sur l’immeuble reconstruit.
— Les personnes qui, au moment du sinistre, occupaient
les lieux en vertu de prorogations légales ou de dispositions concernant leur
maintien dans les lieux peuvent prendre possession des locaux réparés ou
reconstruits et s’y maintenir dans les conditions fixées par la présente loi.
Insuffisance des locaux reconstruits.
— Si des modifications sont intervenues dans la surface
ou la disposition des lieux qui mettent obstacle à la réintégration de tous les
locataires et occupants ayant fait connaître leur intention d’occuper les
lieux, la préférence sera donnée aux locataires ou occupants dont la famille
est la plus nombreuse et, à égalité de charges familiales, aux plus anciens.
Droit de priorité du propriétaire.
— Le report du bail ou de la prorogation susvisé n’est
pas opposable au propriétaire sinistré immobilièrement justifiant d’un motif
légitime d’habiter par lui-même l’un des locaux réparés ou reconstruits ou de
le faire habiter par son conjoint, ses ascendants, ses descendants ou ceux de
son conjoint.
Ce report du bail ou de la prorogation n’est pas non plus
opposable au propriétaire sinistré dont l’habitation personnelle a été détruite
et qui, par application de la loi du 28 octobre 1948, reconstruit une
habitation personnelle de même importance en transférant sur celle-ci d’autres droits
à indemnité de dommages de guerre.
Prix du loyer.
— L’article 71 de la loi du 1er septembre
1948 dispose que, à compter du 1er janvier 1949, les loyers des
locaux ainsi réparés ou reconstruits seront déterminés conformément aux
dispositions de ladite loi. Ce texte paraît donc abroger l’article 5 de la
loi du 18 juillet 1942, qui laissait toute liberté au propriétaire pour la
fixation du loyer de ces locaux.
Toutefois, cet article 71 autorise, sous certaines
conditions, les propriétaires à majorer le loyer légal.
Il dispose, en effet, que, lorsque la part des dépenses de
reconstruction, d’amélioration ou de réparation restant à la charge des
propriétaires dépasse en moyenne 3.000 francs par pièce principale, les
propriétaires sont autorisés à percevoir, en sus du loyer légal, une majoration
de loyer pouvant atteindre au plus l’intérêt calculé au taux de 6 p. 100
des sommes correspondant à la quote-part des dépenses de reconstruction, de
réparation ou d’amélioration, laissées à leur charge ou non encore remboursées
par l’État au titre des dommages de guerre.
Dans ce cas, la majoration autorisée de l’ensemble des
loyers doit être répartie entre toutes les personnes qui habitent l’immeuble au
prorata du nombre de pièces principales qu’elles occupent. Mais, en cas
d’améliorations, cette répartition ne joue qu’à l’égard des personnes qui ont
bénéficié des travaux exécutes.
II. Locations de locaux administratifs.
1° Soumises au régime des locaux d’habitation.
— L’article 1er de la loi
dispose : « L’occupation des locaux affectés à l’exercice d’une
fonction publique dans lesquels l’habitation est indivisiblement liée au local
utilisé par ladite fonction est régi, après l’expiration du bail écrit ou
verbal, par les dispositions suivantes » (celles du régime des locaux
d’habitation).
Cependant, par exception à ce principe et en vertu de
l’article 33, les prix résultant de la mise en vigueur de la présente loi
s’appliqueraient, à compter du 1er janvier 1949, aux baux en
cours comme pour les locaux d’habitation.
2° Soumises à des dispositions spéciales.
— L’article 2 de la loi stipule, au contraire,
que : dans toutes les communes, à l’expiration des baux conclus entre les
parties, l’occupation des immeubles ou parties d’immeubles par les
administrations publiques de l’État des départements et des communes et par les
établissements publics, ainsi que celle des locaux affectés à l’exercice d’une
fonction publique dans lesquels l’habitation n’est pas indivisiblement liée au
local utilisé pour cette location, est soumise aux dispositions des articles 9
et 37 ci-dessous. Ces articles sont relatifs au maintien dans les lieux et au
prix des loyers.
a. Maintien dans les lieux.
— Les preneurs de ces baux venus à expiration sont
maintenus dans les lieux jusqu’au terme d’usage qui suivra le 1er janvier
1949 (à Paris, 1er avril 1949).
Les locaux ainsi rendus vacants ne peuvent être affectés
qu’à l’habitation. Sont nulles de plein droit les locations et sous-locations
ayant pour objet de donner à ces locaux une destination autre que l’habitation.
Mais cette disposition n’empêche nullement les bailleurs de
renouveler ou de reconduire, à leur expiration, les contrats de location qu’ils
ont souscrits aux administrations publiques.
b. Prix du loyer.
— Le prix de location est celui indiqué dans le
bail : pour les baux à venir, il sera fixé, à défaut d’accord amiable, par
le juge à l’aide de tous éléments d’appréciation.
III. Locations et sous-locations en meublé.
1° Du maintien dans les lieux.
Principe du maintien.
— Les locataires, sous-locataires et occupants de bonne
foi d’un local meublé bénéficient du maintien dans les lieux aux mêmes
conditions que les locataires de locaux loués nus et sont exposés, comme ces
derniers, au même droit de reprise de la part des propriétaires.
Reprise des locaux.
a. Domicile du bailleur.
— Le bénéfice du maintien dans les lieux n’est pas
cependant opposable au propriétaire ou au locataire principal qui justifie
avoir loué ou sous-loué un local constituant son domicile.
b. Logement indivisible.
— En cas de sous-location partielle, ce maintien ne
peut pas non plus être invoqué contre le locataire principal lorsque les locaux
occupés forment avec l’ensemble des lieux un tout indivisible, sauf en ce qui
concerne les sous-locataires rentrant dans les catégories visées à l’article 28
de l’ordonnance du 11 octobre 1945 (chefs de famille ayant quatre enfants,
engagés volontaires, personnel des services de l’État, etc.) et lorsque le
locataire principal habite un logement insuffisamment occupé aux termes de cette
ordonnance. Ce maintien n’est opposable au propriétaire que pendant la durée du
maintien dans les lieux du locataire principal.
c. Location provisoire.
— Le bénéfice du maintien dans les lieux ne peut pas
être opposé au bailleur si celui-ci peut prouver qu’il avait accueilli le
preneur en raison de circonstances exceptionnelles pour une location
provisoire ; cette dernière disposition ne peut toutefois être invoquée
contre ceux dont le domicile a été détruit par faits de guerre et n’a pas
encore été reconstruit.
Reprise du mobilier.
— Dans tous les cas, à l’expiration du bail ou de la
location verbale, le bailleur peut, à l’encontre du locataire ou du
sous-locataire bénéficiaire du maintien dans les lieux, reprendre son mobilier,
s’il justifie qu’il en a besoin pour sa propre installation ou celle de ses
ascendants ou descendants.
2° Prix des locations et sous-locations.
Locations totales.
— L’article 43 de la loi du 1er septembre
1948 dispose que le bailleur qui, n’exerçant pas la profession de loueur en meublé,
loue exceptionnellement en totalité un local normalement meublé est autorisé à
demander au preneur :
Le montant du loyer déterminé comme s’il s’agissait d’un local nu ;
Le prix de location des meubles, qui ne pourra dépasser le montant du loyer principal ;
Le montant des prestations, taxes et fournitures visées à
l’article 38 de la loi pour les locations de locaux nus, et tous impôts et
taxes perçus à l’occasion des locations en meublé.
Sous-locations partielles.
— Pour les sous-locations partielles en meublé,
existant au 1er septembre 1948 et pour les sous-locations
partielles en meublé autorisées en application des dispositions de l’article 78
de la loi du 1er septembre 1948, le prix de location est
déterminé tout d’abord comme s’il s’agissait d’un local nu.
À cet effet, il est tenu compte de l’importance des locaux
sous-loués et d’un prorata de prestations, taxes et fournitures payées par le
locataire principal. Le principal du loyer ainsi obtenu peut être majoré de 20
p. 100 et du prix des prestations particulières que le locataire principal
est appelé à fournir.
Au prix du loyer sous-loué nu ainsi déterminé, il est ajouté
le prix de location des meubles, qui ne peut dépasser le principal dudit
loyer ; il peut être exigé en sus le montant de tous impôts et taxes
perçus à l’occasion des locations en meublé.
IV. Habitations à bon marché.
— Les dispositions de la loi du 1er septembre
1948 sur les loyers ne sont pas toutes applicables aux habitations à bon
marché.
Ces habitations ne sont régies que par certaines
dispositions de ladite loi, notamment celles relatives au maintien dans les
lieux, au droit de reprise, aux meublés, à l’interdiction de céder et de
sous-louer, à la procédure, aux sanctions.
Par contre, elles ne sont pas soumises aux règles de ladite
loi relatives au calcul des loyers. Les prix de location de ces maisons sont
régis par les dispositions de l’article 5 de la loi du 3 septembre
1947 et de l’arrêté du 31 décembre 1948.
Quant aux loyers des logements à loyer moyen, ils ne peuvent
dépasser la valeur locative des locaux similaires déterminée suivant le système
du reclassement.
L. CROUZATIER.
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