Les éléments de fertilité.
— Il n’est guère de culture dont on se soit si peu
occupé, au point de vue des engrais, que celle des arbres fruitiers. Isolé en
tête des champs, planté en bordure des chemins, dans la cour de ferme, des
exploitations rurales, au voisinage des maisons d’habitations, dans le jardin
de la ferme, l’arbre fruitier glane en quelque sorte ses aliments, allant les
chercher bien plus qu’on ne les lui apporte. C’est du moins ainsi qu’il est le
plus souvent traité dans les exploitations rurales, où il n’a d’autre but que
celui de fournir du fruit pour les besoins de la famille. Mais, dans les
régions où il sert de base à de véritables spéculations, la culture fruitière
est devenue une industrie productive où l’arbre crée et transforme. Le
cultivateur doit se pénétrer de cette réalité que, pour fonctionner, l’arbre a
besoin de matières premières assurant la formation et la nutrition de ses
divers organes, remplaçant les éléments que les fruits extraient du sol et que
la vente sur les marchés exporte du domaine.
Ces éléments, comme pour toutes les plantes, sont les
suivants : l’azote, dont la présence en quantité convenable excite
la végétation ; en excès, cet élément exagère la poussée des rameaux, des
feuilles, et nuit à la formation des fleurs, partant, à la
fructification ; les essences fruitières ne fructifient normalement
qu’avec une végétation moyenne ou faible. Dès lors, cet agent doit être regardé
comme un agent essentiel de la floraison, de la nouaison des fleurs et de la
fructification.
La potasse n’a pas son rôle si nettement défini, mais
sa présence en quantité importante dans les tissus même des fruits, dans ceux
de la feuille, du bois, dans les noyaux, etc., indique suffisamment son
importance. Les sols riches en potasse rendent les arbres non seulement très
fertiles, mais fournissent des fruits sucrés et savoureux : la potasse
aide à la formation du noyau des fruits, empêche leur chute prématurée ;
elle favorise la formation du sucre, de l’amidon, et contribue à
la maturité du bois, à l’augmentation de sa densité, par suite de la
formation dans ses tissus de réserves plus copieuses.
Quantités d’éléments de fertilité à mettre dans le sol.
— La détermination des quantités d’éléments de
fertilité nécessaires aux arbres fruitiers pour leur production annuelle est
des plus délicate ; elle exige des recherches minutieuses.
Depuis longtemps, nous avons adopté une formule qui, dans
nos sols spéciaux, paraît satisfaire aux exigences de nos plantations
fruitières et qui est ainsi composée, par mètre carré : azote, 5 grammes ;
acide phosphorique, 5 grammes ; potasse, 15 grammes, dans
laquelle la proportion relative de l’azote est plutôt faible, mais il est
facile de modifier les quantités suivant les besoins du sol et de la
plante ; si la végétation est trop intense, on diminue l’azote ; on
la réduit de moitié ou même on la supprime si le sol peut en fournir assez. Les
proportions précédentes sont convenables pour les fruits à noyau, mais, pour
les fruits à pépins, l’azote peut être doublée et se rapprocher du chiffre de
la potasse. Il est facile de comprendre que les mêmes produits ne sauraient
convenir à tous les terrains. C’est ainsi que, là où l’on craint la sécheresse
estivale, où la terre est chaude, nitrifie bien, on emploiera le fumier de
ferme bien décomposé ou les engrais organiques : tourteaux, sang desséché,
corne torréfiée capable de faire de l’humus dans la terre.
Dans les terres fortes, compactes, fraîches, riches en
humus, on donnera peu de fumier, les éléments nutritifs seront fournis surtout
sous la forme minérale. L’azote se demande au nitrate de soude ou au sulfate
d’ammoniaque. Le premier de ces produits sera toujours employé au printemps, à
la volée, en couverture ; le second sera incorporé au labour d’automne. Dans
les sols pauvres en chaux, riches en humus, on préférera, pour restituer
l’acide phosphorique, les scories et les phosphates naturels, les poudres d’os
et les phosphates précipités. Les superphosphates seront réservés aux terres
plus légères et un peu calcaires.
La potasse est empruntée au chlorure de potassium ou au
sulfate de potasse, au carbonate de potasse, aux cendres de bois.
Dans les sols pauvres en acide phosphorique et riches en
potasse, on forcera plutôt la dose du premier, alors qu’on pourra diminuer
celle du second.
Fumures spéciales.
— Les arbres jeunes, ou ceux qui végètent mal,
recevront une copieuse fumure, principalement en azote : 70 à 100 kilos
de nitrate de chaux.
Les plantations trop vigoureuses, donnant peu de fruits et
beaucoup de bois, recevront une dose d’azote moindre, mais les engrais
phosphatés et potassiques seront augmentés.
E. DÉAUX.
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