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Viticulture

Insecticides

Les insectes font à la vigne des dégâts moins importants que les maladies cryptogamiques ; toutefois, quand les conditions de température s’y prêtent, ces dégâts peuvent être redoutables.

Nous allons voir rapidement quels sont les principaux insectes nuisibles ; à dessein, nous laisserons de côté le fameux phylloxéra, avec lequel la vigne se trouve constamment à l’état de paix armée.

Parmi les Coléoptères, nous trouvons : l’eumolpe, désigné couramment sous le nom de gribouri ou écrivain (Adoxus Vitis) ; l’altise ou puce de terre (Altica ampelophaga) ; le hanneton vert de la vigne (Anomala Vitis) ; l’otiorhynque ou coupe-bourgeon (Otiorhyncus tenericosus) ; la grisette coupe-bourgeon (Peritelus familiaris) ; le cigarier (Rhynchites Betuleti) ; enfin, le vespère de Xatart, qui est un longicorne et dont la larve cause beaucoup de dégâts.

Dans le groupe des Lépidoptères, nous trouvons l’écaille (Chelonia), dont la larve est très dangereuse ; la pyrale (Tortrix pilleriana) ; la cochylis (Tinea ambiguella) et l’eudémis, analogue aux deux précédents.

Ces trois derniers papillons ont une façon de vie à peu près semblable, mais, alors que la larve de la pyrale hiverne sous forme de chenille, les deux autres passent l’hiver sous forme de chrysalide.

Les Hémiptères nous fournissent la grisette de la vigne (Lopus sulcanus) et les Diptères la cécidomie (Cecidomia œnophila).

Le but de cette étude n’est pas de décrire le cycle évolutif de ces insectes, mais les moyens de lutte pour limiter leurs dégâts.

Chaque insecte se développe dans sa région de prédilection ; on ne les trouve donc pas tous à la fois dans un lieu donné.

Beaucoup d’insectes produisent leurs dégâts à l’état larvaire, exemple : l’eumolpe, le hanneton vert, l’otiorhynque, la grisette, le vespère, la pyrale, la cochylis et l’eudémis.

Les insectes, comme tout être vivant, ont leurs ennemis naturels ; ce sont d’abord d’autres insectes carnassiers.

Parmi ceux-ci, le groupe des Carabes. Qui n’a pas aperçu, dans les jardins, le carabe doré, appelé communément, dans certaines régions, jardinière, qui semble être le plus répandu ?

Ce sont des insectes coureurs, dont la tête est armée de solides mandibules.

À côté d’eux, les calosomes, les cicindèles et les coccinelles sont aussi d’utiles auxiliaires des vignerons.

Mais les grands consommateurs de vers et de chenilles sont les oiseaux, les insectivores s’entend.

Au lieu de les détruire, on ferait mieux de les protéger et de leur placer des nichoirs sur les arbres avoisinant les vignobles.

Il y a une quarantaine d’années, les moyens de lutte n’étaient pas aussi complets que maintenant. On préconisait le ramassage, qui doit se continuer pour le cigarier ; la désinfection des souches par l’eau bouillante, celle des piquets et échalas par une émulsion de chaux caustique.

En effet, si la plupart des larves des coléoptères hivernent dans le sol, comme celle du doryphore, celles des papillons passent la saison froide dans les fentes des piquets ou des échalas et sous l’écorce des arbres.

Il y a donc lieu de continuer à désinfecter, l’hiver, à la chaux, piquets, échalas et tronc d’arbres.

Quant aux larves hivernant dans le sol et dont on en ramène un certain nombre à la surface lors des labours de printemps, on pourrait à la rigueur les détruire au moyen des insecticides puissants mis aujourd’hui à notre disposition, mais on risquerait de supprimer les insectophages. La désinfection des sols est donc une arme à deux tranchants ; mais, dans certains cas, il est indispensable de la pratiquer, pour la destruction du ver blanc, par exemple.

Parmi les insecticides extraits des végétaux, le plus anciennement connu est la pyrèthre, obtenue par broyage des inflorescences de la plante du même nom. On s’en est servi longtemps avec succès.

Après, nous avons connu l’extrait du derris, employé dans un solvant, insecticide des plus énergiques agissant par contact. Nous l’avons utilisé avec succès contre le doryphore et sa larve.

À côté de lui, on trouve un autre produit qui est à base de roténone.

Il est probable que la liste des insecticides tirés des végétaux n’est pas encore close.

À côté des produits naturels, sont venus s’ajouter ceux obtenus par synthèse, qui permettent, par leurs propriétés, le traitement sur d’importantes surfaces, tels que ceux entrepris contre la maladie du sommeil par la destruction de la mouche tsé-tsé, fléau de l’Afrique équatoriale.

Nous avons d’abord le dichlorodiphényltrichloréthane, plus connu sous le nom de D. D. T. Ses formules d’application sont multiples, depuis celle de la lutte contre les parasites humains jusqu’à celle de la protection des grains en passant par celle des végétaux et des sols ; il s’emploie par poudrage ou émulsion.

À côté du précédent, il nous faut citer l’hexachlorocyclohexane, ou H. C. H. Il s’emploie en poudrage ou en émulsion.

Ce dernier insecticide a une odeur caractéristique, aussi doit-on suivre attentivement son mode d’emploi.

Les dérivés sulfurés du H. C. H. ont donné naissance à des insecticides d’égale valeur, désignés sous les lettres S. P. C. et vendus sous différents noms.

Enfin, on parle actuellement d’un produit appelé « Sulphos », et dont le nom chimique se compose de trente-cinq lettres ! ...

Le vigneron a maintenant à sa disposition toute une gamme de produits qui lui permettent de n’employer l’arsenic que dans les cas exceptionnels, produit très actif mais dangereux à manipuler, et à proscrire pour les raisins de table.

S’il traite ses arbres fruitiers par les produits de synthèse, il devra protéger les abeilles en traitant à la naissance du bouton et à la chute des pétales.

Nous terminons en conseillant aux vignerons de s’abonner à la station d’avertissement la plus proche ; ils feront une économie de temps et ... d’argent.

V. ARNOULD,

Ingénieur agronome.

Le Chasseur Français N°628 Juin 1949 Page 512