Certains animaux couramment piégés ont moins d’odorat que
d’autres ; pour ceux-là, il y a quand même des précautions à prendre pour
enlever les odeurs des pièges susceptibles d’éveiller la méfiance des animaux.
Le chat, animal domestique, habitué aux odeurs de ferraille, donne évidemment
tête basse dans les pièges, mais les autres y donneront d’autant moins qu’ils
vivent loin de l’homme et que leur odorat est moins développé.
Il est par exemple élémentaire, lorsqu’on veut employer un
piège neuf, de le faire bouillir pendant une demi-heure dans de l’eau contenant
la moitié de son volume de cendres de bois, puis de le rincer à grande eau, et
de renouveler l’opération s’il y a encore des traces de graisse. On peut
ensuite le faire bouillir dans de l’eau contenant des coques vertes de noix, de
l’écorce de noyer, de chêne ou de hêtre, ou des copeaux d’érable. Puis on le
sort avec des pinces et on le laisse sécher à l’air.
On peut procéder différemment, en flambant le piège sur un
feu vif, comme on flambe un poulet, ce qui brûle la graisse, on passe alors le
piège chaud (pas rouge surtout) sous un robinet, et on enlève la croûte noire
avec un morceau de bois taillé en biseau. Mais attention à ne pas prolonger
l’opération pour détremper le ressort.
S’il s’agit d’un piège très rouillé, on le passe à la brosse
métallique ou au tampon métallique, puis on le flambe et le trempe dans l’eau
froide ; on le fait bouillir ensuite avec des coques vertes de noix, qui
bleuissent le piège.
Le piège ainsi préparé peut servir pour les animaux à odorat
peu développé : chat, putois, fouine, martre, hermine. Si on veut, par
scrupule, pousser plus loin les précautions, surtout si on ne piège pas tout de
suite après ces opérations, on pourra, avant emploi, soit :
— fumer les pièges avec des genêts, du tilleul, des
fougères ;
— placer les pièges trois jours dans une eau très
courante ;
— brûler de l’herbe sur les pièges ;
— enduire le piège de chaux si on piège dans la neige,
en faisant bouillir dix minutes dans un demi-litre de chaux vive (pour douze
pièges) ;
— placer les pièges, pendant trois jours au moins, dans
des matériaux identiques à ceux qui serviront à les couvrir : crottin sec,
fumier, aiguilles de résineux, poussier de foin. Il est bon, avant cette
opération, de les graisser légèrement avec de l’huile de paraffine.
Pour les animaux à odorat très développé : renard,
blaireau, on redoublera de précautions au moment de l’emploi en appliquant les
indications suivantes :
— se frotter les mains avec une herbe odorante prise
sur les lieux (genêts, fougère, thym, menthe sauvage, etc.), puis frotter
sérieusement les pièges avec ces mêmes plantes (piège et chaîne) ;
— ne pas manipuler les appâts ou odeurs avant de
toucher au piège ;
— si on ne veut pas frotter les pièges d’herbes
odorantes, faire toutes les manipulations avec des gants réservés à cet effet
et s’aider d’un ou deux bâtonnets.
Enfin observer, dans la tendue des pièges, les points
suivants :
— exécuter loin du placeau l’armer du piège et sa mise
à la sûreté, pour rester le moins longtemps possible sur le placeau et éviter
de piétiner aux alentours ;
— n’opérer la pose du piège qu’en se plaçant sur une
toile ou un sac ;
— tendre les pièges le matin ;
— éviter le plus possible d’écraser les herbes, de
casser ou couper des branches sur et autour du placeau ;
— laisser les lieux, après la pose, identiques à ce
qu’ils étaient avant, en particulier ne jamais laisser de débris de bois coupés
ou cassés, d’herbes foulées, de feuilles arrachées, de parties de la terre
enlevée pour faire le placeau ;
— par la suite, réviser les pièges de bonne heure et du
plus loin possible, en évitant de couper les coulées et à plus forte raison de
les suivre.
Pour ce qui touche à la conservation des pièges contre la
rouille, on a le choix entre les procédés suivants :
— Les pièges étant bien décapés, passer dessus une
couche de vernis à la gomme laque et laisser sécher à l’air. Faire cette
opération trois mois avant d’employer les pièges.
— Plonger les pièges décapés dans de l’eau bouillante
contenant de la paraffine fondue. On place un petit bâton entre les mâchoires
avant l’opération. La paraffine surnage, on retire doucement les pièges, qui se
chargent d’une pellicule de paraffine en se refroidissant. Il suffit de les
plonger dans l’eau bouillante avant l’emploi.
Quant au graissage des pièges en activité, je n’en suis pas
du tout partisan ; on ne graisse pas un piège, on met simplement deux
gouttes d’huile de paraffine parfumée trois mois avant par macération de menthe
sauvage, thym ou autre plante, aux articulations des mâchoires et de la
languette de détente.
Il est à remarquer que la rouille fraîche est la plus
mauvaise et néfaste au piégeur. J’ai vu piéger avec des engins couverts d’une
vieille rouille, mais fermant bien, et avoir de bons résultats, mais je
conseille cependant d’éviter cette oxydation. La confection de placeaux avec
matériaux secs est à recommander à cet effet.
A. CHAIGNEAU.
|