La danse de Saint-Guy, chorée ou paralysie rythmique, est
une complication fréquente et des plus graves de la « maladie des
chiens ». C’est une affection caractérisée par des mouvements continuels,
irréguliers et involontaires, des organes mus par le système locomoteur
volontaire. On l’appelle danse de Saint-Guy, du nom d’une chapelle près
d’Ulm-en-Souabe, dédiée à saint Guy, parce que là, vers la fin du XVe siècle,
les habitants venaient implorer, contre cette maladie, l’intervention du saint.
Toutes les causes qui produisent la méningite, la myélite,
les paralysies, peuvent engendrer la chorée. Le nom de paralysie rythmique lui
convient mieux, car ses lésions présentent les plus grandes analogies avec la
paralysie infantile, ou maladie de Heine-Médin, et sa forme épidémique, la
poliomyélite antérieure aiguë.
C’est chez les jeunes chiens qu’elle est le plus fréquemment
observée. Le virus filtrant de la « maladie du jeune âge », ou
maladie de Carré, fixant ses toxines sur les diverses parties de la moelle et du
système nerveux central, est la seule cause précoce ou tardive de cette
encéphalomyélite. Les chiens de race pure, les setters notamment, y sont
particulièrement exposés.
C’est souvent au cours de la maladie des chiens, alors que
celle-ci avait été particulièrement grave et s’acheminait vers la
convalescence, qu’on voit apparaître, en certaines régions du corps, des
mouvements insolites qui inquiètent les propriétaires.
Tantôt les malades sont d’abord atteints de parésie des
membres postérieurs, de paraplégie ou de paralysie des quatre membres ;
puis les convulsions apparaissent. Tantôt celles-ci se montrent d’emblée,
d’abord légères, et s’accentuent avec une rapidité variable. Elles sont
étendues à la totalité du corps, limitées à plusieurs membres ou à un seul,
notamment à un membre antérieur ; parfois celui-ci fait le geste de jouer
du violoncelle sur l’autre membre au repos. La tête, l’encolure ou un autre
groupe de muscles peuvent aussi être atteints. Ces régions sont le siège de
secousses ordinairement rythmiques dont le nombre varie de dix à quarante par
minute, plus nombreuses et plus fortes pendant le repos, et qui persistent
durant le sommeil. Pendant les premières semaines, les malades éprouvent, la
nuit surtout, des douleurs accusées par des plaintes et des cris. Les
convulsions sont parfois limitées aux muscles de la tête, de la face ou de la
mâchoire inférieure, d’où la production de grimaces, de tics, qui
donnent à la physionomie du malade un aspect bizarre.
En dehors de ces mouvements anormaux, le chien ne paraît pas
malade : la sensibilité est conservée, les organes sensoriels sont
indemnes, les troubles psychiques nuls ou insignifiants. Dans quelques rares
cas, les chiens choréiques deviennent peureux, craintifs ; quelquefois ils
perdent l’attachement qu’ils avaient pour leurs maîtres.
Dans la règle, la chorée a une évolution lente, une marche
chronique. Sa durée varie de quelques mois à plusieurs années. Avec le temps,
les muscles atteints s’émacient par troubles trophiques et, s’il s’agit d’un
sujet en croissance, les os de la région restent moins volumineux que ceux du
côté opposé.
Nombre de malades conservent l’appétit, maigrissent peu et
s’habituent à leur mal. Les convulsions, surtout si elles sont localisées à une
partie du corps, à un membre, à la tête, à la face, peuvent s’atténuer peu à
peu au point de disparaître presque entièrement. Mais, chez la grande majorité
des sujets, elles persistent à un degré variable et, si elles siègent sur les
membres, elles rendent le chien moins apte à assurer son service, surtout s’il
s’agit d’un chien de chasse.
La mort est exceptionnelle quand la chorée existe seule,
mais la forme grave, avec convulsions généralisées et paralysie, entraîne vite
l’épuisement et la mort.
Le traitement doit être surtout hygiénique, le régime étant
plus efficace que les agents thérapeutiques (Cadéac). Il faut donner au
malade une alimentation riche, de la viande de bœuf ou de cheval crue, 100 à
500 grammes par jour, en deux fois, suivant le poids du sujet. Utiliser
les toniques, en particulier l’huile de foie de morue, une cuillerée à café ou
à dessert par jour, et la liqueur de Fowler, deux à dix gouttes par jour, une
semaine sur deux.
Dès l’apparition des troubles nerveux, de la paralysie des
membres postérieurs, des premières secousses choréiques, faire sur la région dorso-lombaire,
après avoir tondu les poils, des applications révulsives au liniment ammoniacal
ou à la pommade stibiée. Atténuer les convulsions par l’administration des calmants
du système nerveux : bromures de potassium ou de sodium, chloral, etc.
Combattre les lésions dès centres nerveux par les iodures de potassium ou de
sodium, l’urotropine, etc. Donner comme boisson de l’eau de La Bourboule.
Enfin, ce qu’il faut en pareil cas, c’est s’armer de patience et bien se
pénétrer de cette idée que le temps agit aussi utilement que la plupart des
médicaments. La vie au grand air ou dans une cour, un exercice modéré ou une
promenade quotidienne sans aller jusqu’à la fatigue, en favorisant l’hématose,
en luttant contre l’atrophie musculaire, aideront au rétablissement du malade.
MOREL,
Médecin vétérinaire.
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