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Météorologie

Grésil, rosée, gelée blanche

Le grésil a un peu l'apparence de la grêle, mais d'une grêle bénigne. Il tombe sous forme de petites sphères de glace, très friables, spongieuses, et dans lesquelles on remarque un très grand nombre de petites bulles d'air. Les grains de grésil sont beaucoup plus petits et surtout beaucoup moins durs que les grêlons. Ce sont très probablement des gouttes de pluie qui se sont congelées en traversant une zone froide, mais la traversée n'a heureusement pas duré assez longtemps pour que les petits glaçons deviennent dangereusement durs.

La rosée ne descend pas du ciel, comme certains le croient peut-être. Sa formation n'a rien de commun avec celle du serein ou de la pluie ; au contraire, chaque goutte de rosée se forme à l'endroit précis où on la trouve.

La formation de la rosée est la même que celle de la « buée » sur une carafe contenant de l'eau très fraîche (le terme « buée » est impropre, bien que toujours employé ; il s'agit en réalité d'un grand nombre de gouttelettes). Ce n'est pas la présence du liquide qui provoque cette « buée » c'est la température de l'ensemble par rapport à celle de l'air ambiant.

Le même phénomène se produirait avec un bloc d'acier ou de marbre, par exemple, suffisamment refroidi. On le constate du reste fréquemment en hiver sur les vitres qui séparent une pièce chauffée du froid extérieur. Donc, chaque fois qu'une « paroi froide » est en contact avec de l'air humide de température supérieure, cette paroi se mouille.

Que se passe-t-il donc !

L'air qui nous environne contient de l'eau sous forme de vapeur. Quand cette quantité de vapeur est telle que le moindre abaissement de température entraînerait sa condensation, on dit que l'air est saturé.

À une température donnée, l'air est toujours saturé lorsqu'il contient une certaine quantité d'eau, toujours la même ; ainsi à 40° l'air est saturé lorsqu'il contient 49 grammes de vapeur ; à 30°, il est saturé avec 30 grammes, et, à 10° de température, 9 grammes suffisent. Si, dans chacun des cas ci-dessus, l'air est mis en contact avec un corps plus froid que lui, il y a immédiatement condensation sur le corps froid.

À la fin du jour, tout est à peu près à la même température. À mesure que les heures passent et que la nuit s'avance, tout se refroidit, mais à des vitesses différentes, car certains corps « rayonnent » plus que d'autres, c'est-à-dire qu'ils perdent leur chaleur plus vite que d'autres. Ils sont donc, en fin de nuit, plus froids que tout ce qui les entoure, et surtout que l'air ambiant. Si cet air est saturé, cette différence de température suffit à provoquer la condensation de la vapeur d'eau sur la surface froide sous forme de rosée.

Les gouttes de rosée se forment donc bien aux points où on les trouve le matin.

Un abri même rudimentaire empêche la formation de la rosée. De même, en général, un ciel nuageux limitant le rayonnement est un autre empêchement.

Si un temps clair et calme est un temps idéal pour la formation de la rosée, une très légère brise en augmentera sensiblement la quantité. En effet, les masses d'air en contact avec les surfaces froides sont déplacées lentement et ce renouvellement constant amène de nouvelles quantités d'humidité appelées à se condenser. Par contre, un vent un peu fort empêche toute formation de rosée, car l'air en mouvement trop rapide ne reste pas assez longtemps au contact des parties froides pour que puisse s'amorcer une condensation.

On a remarqué que la rosée se forme dans les creux du terrain plutôt que sur les parties hautes, et sur les herbes et les plantes basses plutôt que sur les branches élevées des arbres.

Ceci se comprend facilement. Au moment de la formation de la rosée, l'air est relativement chaud par rapport aux végétaux et au sol ; il se refroidit à leur contact. Quand cela se passe sur une colline, l'air refroidi devenu plus lourd, dévale jusque dans la plaine et, ne pouvant aller plus bas, il se refroidit là en plein, s'y condense et forme la rosée. Il en est de même pour l'air en contact avec le sommet des arbres qui vient achever la condensation de sa vapeur d'eau au pied de ceux-ci sur les herbes et les plantes basses.

Les rosées se produisent surtout au début de l'automne, car il fait encore chaud dans les journées, ce qui donne de l'air humide, et les nuits longues favorisent le refroidissement des végétaux et du sol. Puis au printemps, pour des raisons analogues. L'été, où la chaleur diurne favorise l'évaporation, donc l'humidification de l'air, serait évidemment la saison la plus favorable pour la formation de la rosée ... si les nuits étaient plus longues, ce qui favoriserait la condensation par refroidissement aux dernières heures nocturnes. Quant à l'hiver, comme il y a très peu d'évaporation et que, d'autre part, les différences de température sont peu marquées entre le jour et la nuit, il n'y a pratiquement pas de rosée.

Malheureusement cette rosée, un tantinet poétique parce qu'elle évoque les belles nuits printanières et automnales, peut parfois céder la place à la gelée blanche.

Gelée blanche.

— Si on s'en souvient, ce n'est qu'une différence de température au moment de la condensation qui fait qu'un nuage donné apporte la pluie ou la neige. De même, si la température des objets sur lesquels se condense la vapeur d'eau est zéro, ou inférieure à zéro, la condensation se fera directement à l'état de glace. Ce sera la gelée blanche.

Remarquons bien que la vapeur d'eau s'est transformée directement en glace, ce n'est pas la rosée qui s'est congelée à la suite d'un refroidissement ultérieur.

Cette infortunée gelée blanche (comme la lune, du reste) est accusée de méfaits, de destructions de récoltes en particulier dont (pas plus que la lune, encore) elle n'est responsable.

Ce sont les plantes qui, par suite de l'absence totale d'abri, par un ciel très clair, les nuits où le thermomètre est déjà assez bas, ce sont les plantes qui rayonnent, qui gaspillent la totalité de leur chaleur jusqu'à aller plus bas que zéro. Alors l'eau contenue dans les tissus se dilate en se congelant et les feuilles, les tiges et tout particulièrement les bourgeons délicats et fragiles se fendent et éclatent !

La gelée blanche, qui n'existe que parce que les plantes ont une température négative, n'est pour rien dans le désastre, elle n'est qu'un linceul qui se pose sur des bourgeons déjà morts.

Quant à la lune, qu'elle soit pleine, aux quartiers ou même rousse, elle ne brille au ciel que parce qu'il n'y a pas de nuages. C'est cette absence qui cause le mal et non la présence de la lune, témoin irresponsable que tout le monde accuse.

PYX.

Le Chasseur Français N°635 Janvier 1950 Page 59