De toutes nos cultures légumières, celle de la pomme de
terre est, de beaucoup, la plus importante. D'ailleurs, dans l'économie
mondiale, la pomme de terre tient la seconde place parmi les plantes
alimentaires, après le riz et avant le blé. Chacun sait cependant que la
propagation de la culture de ce légume se heurta à une certaine méfiance qui
n'était pas, d'ailleurs, absolument injustifiée. La qualité des tubercules
était alors très médiocre et, d'autre part, une regrettable erreur voulait
qu'on les plantât beaucoup trop rapprochés (à 15 ou 20 centimètres tout au
plus), ce qui nuisait au développement de la plante et accusait encore les
défauts.
À l'heure actuelle, les améliorations successives apportées
dans tous les domaines à cette culture font que les craintes d'antan sont
depuis longtemps disparues.
Toutefois il est encore certaines particularités dans le
mode d'évolution de la pomme de terre qui gagneraient à être mieux connues du
cultivateur et dont il pourrait, dans certains cas, tirer partie. C'est ainsi
que la formation et le développement des tubercules sont influencés par certains
facteurs extérieurs. Ils sont, en particulier, favorisés par l'obscurité. De
diverses expériences, il résulte que, pendant les longues fournées ensoleillées,
les tubercules se développent lentement, mais, par contre, leur volume augmente
rapidement lorsque les jours deviennent plus courts. De même une température
voisinant entre 15 et 18 degrés leur est plus favorable que la forte chaleur.
Ces constatations expliquent que l'on préfère cultiver dans les pays chauds (Algérie,
Maroc et même Midi de la France) les variétés hâtives qui profitent pour leur
développement de la température modérée du printemps, et dans les pays du Nord
les variétés tardives qui profitent, au contraire, d'une température suffisante
au début de l'été pour leur première croissance et trouvent, en automne, les
conditions favorables au développement des tubercules.
La période de végétation des variétés hâtives étant
relativement courte, elles ne produisent qu'une récolte moyenne. Elles sont,
d'autre part, sensibles à l'action du froid. Pour ces divers motifs, elles
prospèrent particulièrement bien en terrain léger et sain, à condition, bien
entendu, d'avoir à leur disposition des éléments nutritifs rapidement
assimilables et en quantité suffisante. Les variétés de précocité moyenne se
trouvent déjà dans des conditions meilleures pour donner une récolte, même dans
des sols de qualité inférieure. Leur période de végétation étant plus prolongée,
elles sont moins sensibles aux agents extérieurs défavorables.
Quant aux variétés tardives, ce sont celles qui procurent
les plus forts rendements, mais elles sont aussi les plus exigeantes quant à la
qualité du terrain et à sa richesse en éléments fertilisants.
Le choix des variétés et l'origine des tubercules utilisés
comme plants ont également une très grande importance. Le climat et la nature
du sol de certaines régions sont particulièrement favorables à la production de
tubercules sains offrant une plus grande résistance aux maladies.
Les régions qui réunissent ces conditions sont les terrains
granitiques de la Bretagne, de la Marche et du Limousin, les sables de
Hollande, du Danemark et de la Silésie.
Ce sont donc presque uniquement des tubercules provenant de
ces régions qu'il y a lieu d'utiliser pour l'ensemencement de nos champs. En
effet, dans toutes les autres contrées, lorsque l'on replante pendant plusieurs
années des tubercules récoltés sur place, il se produit, malgré une sélection
rigoureuse, un phénomène dont les causes ne sont pas encore parfaitement
précisées, qui n'est autre que la dégénérescence.
En dehors du choix de la région d'origine des tubercules de
semence, il faut également porter attention au choix de la variété. En France,
les services officiels ont établi un catalogue de toutes les variétés de notre
pays avec mention des différentes appellations sous lesquelles on les connaît
dans les diverses régions de culture.
Nous citerons comme variétés hâtives : Marjolin
Têtard, précoce et de qualité excellente. Belle de Fontenay ou Hainaut,
une des meilleures, très hâtive, productive et de bonne conservation, Hollande
de Roskoff ou Mayette ou Quarantaine de la Halle, précoce et
très appréciée sur les marchés.
Parmi les demi-hâtives : la Belle de Juillet, ou
Juli à chair jaune, à tubercule en amande d'excellente qualité, Ergold,
très résistante aux maladies, ce qui ne nuit en rien à sa qualité, Royal Kidney,
productive de qualité moyenne.
Comme variétés tardives, nous nous devons de signaler :
la Saucisse, à peau rouge vif, chair jaune, très productive, qualité
très bonne, une des représentantes des pommes de terre que les Américains
appellent aérodynamiques. Ils désignent ainsi les tubercules ovales avec yeux
plats dont la surface lisse facilite l'épluchage et diminue la quantité de
déchets.
A. GOUMY,
Ingénieur horticole.
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