L'ensemble des forêts coloniales françaises couvre 90
millions d'hectares. À savoir : Indochine, 25 millions ; Afrique
Équatoriale française, 20 ; Côte-d'ivoire, 11 ; Madagascar, 9 ;
Guyane, 7.
L'aspect est commun : arbres à fortes dimensions et
grande variété d'essences. Les indigènes incendient certaines parties de la
brousse et le reboisement s'effectue naturellement. C'est une erreur de croire
que tous les massifs sont exploitables industriellement. Certains sont trop éloignés
de voies d'évacuation. De 20 à 25 millions pourraient être exploités
immédiatement. En 1930, les exportations étaient déjà de 550.000 tonnes, mais
en régression en 1931 par le ralentissement des exportations d’acaou (Côte
d’Ivoire), et d'oukoumé (Gabon).
Les méthodes d'exploitation sont assez primitives et les conditions
d'embarquement laissent à désirer. Quelques instalations ont été néanmoins établies,
notamment à Grand-Bassam (Côte-d'Ivoire). Jetée métallique à Port-Bouet. En raison
de l’éloignement et du coût du fret, il serait recommandé d'envisager
l'outillage moderne des exploitations de bois africains pour suppléer au manque
de main-d'œuvre. D'autre part, les bois subissent des altérations au cours des
transports. Il serait alors peut-être profitable d'installer sur place, soit
aux ports d'évacuation, soit aux centres de communications, soit aux lieux de
production, soit encore aux terminus des trains de rivière, des installations
d'ouvrage du bois (menuiserie, ébénisterie, etc.) fournissant non plus les billes
brutes, mais des pièces brutes de construction et de fabrication (meubles,
contreplaqué, pièces de charpente, etc.), le finissage s'effectuant dans la métropole
(polissage, assemblage, collage et vernissage). Le bois ainsi œuvré serait plus
à l'abri des intempéries, plus facilement transportable, et partant surtout
coûterait moins cher au fret.
On pourrait, également, concevoir des installations mobiles
de petites usines se déplaçant d'un endroit à l'autre, réduisant encore le transport
de la grosse bille de 25 à 30 mètres. La force motrice serait alors fournie par
moteurs à gazogène (bois des forêts). Il suffirait de quelques ouvriers
spécialisés pour le sciage, le découpage, et le calibrage mécanique suivant les
données des demandes. Bon nombre de bois coloniaux deviendraient ainsi plus abordables
dans l'ameublement et meilleurs en qualité que les bois d’Europe.
Le Havre reçoit les trois quarts des bois coloniaux. Les importations
annuelles en France sont d'environ 200.000 tonnes. Ces bois trouvent dans l’industrie
deux emplois : l'ébénisterie et le déroulage. Déjà en ébénisterie, ils
sont préférables et préférés aux bois étrangers. La décoration moderne les utilise
(acajou, bossé, babingua, limbo noir, makoré, palissandre, zingana).
L'industrie du contreplaqué emploie l’okoumé (120.000 tonnes par an), l'avoussamba,
l'avodiré (constructions navales, carrosseries, tonnelleries, etc.).
Il faut souligner l'impérieuse nécessité d'utiliser sur
place le bois colonial sous forme de charbon de bois et d'agglomérés comme
« carburant forestier ».
Pour travailler les bois coloniaux, un outillage approprié
est nécessaire. Le sciage au ruban a été adopté, ainsi que le sciage
circulaire. Il conviendrait de pousser la mise au point du séchage mécanique.
La principale zone forestière d'Afrique française se trouve
le long du golfe de Guinée en partant de la Casamance (enclave limitrophe de la
Gambie britannique) au Congo (sud de Pointe-Noire). La profondeur varie entre
200 et 400 kilomètres jusqu'au Cameroun, puis progresse sans limite au Gabon
jusqu'à l'Oubangui.
En ayant ainsi une vue générale de cette partie de
l'Afrique, on distingue nettement la poussée du grand désert vers l'Océan, dont
il a été question dans un article précédent : « Le dessèchement du
Centre africain ».
Une grande richesse pour l'économie nationale se trouve dans
cette partie de l'Afrique. Il faut l'exploiter rationnellement vers la côte et
la conserver précieusement aux abords des savanes, car elle est l'élément
essentiel et le défenseur naturel de toutes cultures.
R. GERONIMI DE SAINT-PÈRE.
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