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Météorologie

Givre, verglas, brouillard

Dans un nuage ou un brouillard, les gouttelettes d'eau peuvent se trouver dans un milieu où la température est inférieure à zéro, et cependant ne pas se congeler. On dit que l'eau est en surfusion.

C'est un état d'équilibre physique éminemment instable. Un courant aérien qui agite l'ensemble ou un corps étranger (lui-même à 0°) qui entre en contact avec lui suffisent à amener immédiatement la transformation des gouttelettes et gouttes en autant de glaçons. Ces glaçons constituent le givre.

Nous avons tous vu sur les arbres, par les temps de brouillard froid, une couche de glace de faible épaisseur : ce sont les gouttelettes en surfusion qui se sont brusquement congelées au simple contact de l'arbre, lui-même assez refroidi.

On voit par là que le givre, pas plus que la rosée ou la gelée blanche, ne tombe du ciel comme la pluie ou la neige.

Le dépôt glacé qui se forme sur les vitres d'un appartement n'est généralement pas du givre, car les vitres d'un appartement habité et chauffé sont rarement à 0°.

Les formations de givre telles que nous les connaissons couramment, surtout dans nos régions, ne sont pas de bien grande importance. À l'origine, il s'agit d'un brouillard, et la quantité d'eau contenue dans un brouillard n'est pas considérable ; de plus, par temps de brouillard, il n'y a que peu de vent, ou même pas du tout.

Mais en montagne, et plus généralement en altitude, il ne s'agit plus de brouillard, mais de nuages beaucoup plus denses ; le vent les renouvelant sans cesse, les quantités d'eau en surfusion amenées au contact du rocher froid sont beaucoup plus importantes et les quantités de givre beaucoup plus considérables.

Qui n'a entendu parler du terrible givrage des avions en vol ? Lorsqu'un appareil s'engage dans un nuage en surfusion, il déclenche immédiatement la congélation, d'abord par l'agitation que causent sa vitesse de déplacement et le remous de son hélice, puis par la brusque immixtion du corps froid qu'il est dans un milieu qui ne demande qu'à se congeler.

De plus, comme il ne reste pas en place, il va à la rencontre de nouvelles masses qui n'attendent que lui pour se transformer en glace. L'avion peut donc, en quelques secondes, se trouver couvert en grande partie d'une carapace d'une trentaine de centimètres d'épaisseur. La surcharge subite qui en résulte a causé assez de catastrophes pour que je n'aie pas besoin de dire un mot de plus.

L'eau en surfusion n'est pas toujours brouillard ou nuage. Elle peut se transformer en pluie comme l'eau ordinaire.

Il tombe alors une pluie d'eau en surfusion, c'est de cette pluie si froide qu'on dit : c'est de la neige fondue.

Si la température du sol est relativement douce, ce n'est qu'une pluie plus froide que d'habitude, mais, si la température est égale ou inférieure à zéro et si le sol, les arbres, etc., sont à cette même température, la pluie en surfusion se congèle brusquement dès qu'elle entre en contact avec eux et tout se trouve, sur-le-champ, recouvert d'une couche de glace régulière, dure et transparente, qui est le verglas.

Le verglas peut se former parfois en quantité si considérable que les petites branches, et même les moyennes, se cassent sous son poids. Le même accident arrive aux lignes télégraphiques ou électriques.

Il ne faut pas qualifier verglas toutes les formations de glace constatées par temps froid après les chutes de pluie ou de neige.

Souvent, quand il pleut par temps froid, l'eau de pluie se « prend » dès son contact avec le sol, si la température de celui-ci est inférieure à zéro. Elle forme une couche de glace qu'on appelle improprement verglas. C'est de l'eau glacée, exactement comme cela se produirait si on répandait l'eau d'un arrosoir à la même heure, au même endroit.

Ce faux verglas n'a ni la consistance, ni la durée du vrai. La pluie, plus chaude que zéro, continue à tomber et fait fondre la glace à mesure qu'elle se forme, ce qui l'empêche de prendre de l'épaisseur, puis, à la longue, cette arrivée continuelle d'eau relativement tiède finit par échauffer le sol et la couche glacée disparaît entièrement.

De même, quand, après une chute de neige, le temps devient froid, la couche de neige superficielle se gèle et on parle encore de verglas. C'est aussi faux dans ce cas que dans celui de la pluie : il s'agit de neige glacée, certes aussi dangereuse pour l'équilibre que le vrai verglas, mais aussi éloignée de lui dans la réalité qu'une chevelure brune « oxygénée » l'est d'une chevelure naturellement blonde.

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Avant de mettre le point final à ces lignes sur les précipitations, je voudrais dire un mot du brouillard. À vrai dire, il ne s'agit pas là d'une précipitation, mais son cousinage avec la rosée fait qu'il n'est pas déplacé d'en parler ici.

Le brouillard, comme les nuages est constitué d'une infinité de gouttelettes d'eau, mais beaucoup, plus petites que celles qui forment les nuages et, beaucoup plus espacées.

Comme nous voyons le brouillard de très près, les gouttelettes nous paraissent très serrées. Tout est relatif. Un espacement, d'un petit millimètre entre chacune représente, bien souvent, plus de mille fois le diamètre de chacune des gouttes. À l'échelle, nous aurions le même écartement en séparant par des espaces de 10 mètres, dans tous les sens, des billes de 1 centimètre de diamètre !

Le brouillard est causé par le refroidissement de la couche d'air qui entoure le sol ou la mer.

Si l'air était parfaitement calme, on aurait probablement de la rosée, et, suivant le degré de refroidissement du sol, de la gelée blanche, mais si l'air est agité verticalement, c'est-à-dire si des mouvements d'ascendance créent une certaine turbulence, le refroidissement n'est pas localisé aux couches immédiatement au contact du sol, il gagne en altitude en perdant en intensité, et on a une formation de brouillard sur plusieurs mètres d'épaisseur. Si la turbulence était trop forte, l'air serait trop agité et il n'y aurait rien du tout : ni rosée, ni gelée, ni brouillard.

Nous voici rendus au terme de cette superficielle étude sur « les précipitations ».

Au cours de ces quatre articles, je ne me suis pas proposé plus que d'habitude d'éblouir mes lecteurs ; j'ai voulu tout simplement les éclairer sur des phénomènes naturels courants et leur fournir quelques précisions qu'ils cherchaient peut-être sans savoir où les trouver.

PYX.

Le Chasseur Français N°636 Février 1950 Page 124