De même que la suie, les cendres doivent être récupérées par
l'amateur jardinier, car elles constituent un excellent engrais horticole, mais
il faut tenir compte de la nature des cendres obtenues ; de plus,
certaines précautions sont à observer quant à leur emploi au potager.
Les cendres de bois, de par leur nature, constituent
un excellent engrais contenant la quasi-totalité des éléments chimiques
indispensables aux plantes, à savoir l'acide phosphorique, la potasse et la
chaux. Mais il faut distinguer les cendres de bois vierges ou, comme l'on dit
plus communément, « non lessivées », et les cendres « lessivées ».
En ce qui concerne les premières, l'acide phosphorique
oscille entre 2 et 5 p. 100, et il est présent sous la forme de phosphate
tricalcique — c'est-à-dire celle des puissants gisements naturels
d'Algérie, de Tunisie et du Maroc ; cette forme de phosphate est insoluble
dans l'eau et, par suite, inassimilable de cette manière, mais néanmoins il
donne d'excellents résultats dans les sols acides comme le sont les terres
granitiques ou celles nouvellement défrichées. Les acides du sol transforment
alors ce phosphate tricalcique insoluble en phosphate bicalcique soluble, donc
assimilable.
Quant à la potasse des cendres, elle est combinée à l'acide
carbonique. La teneur en cet élément fertilisant de premier ordre est d’environ
10 p. 100, et c'est la présence du carbonate de potasse dans les cendres
de bois qui les fait considérer et classer comme engrais potassique. Cette
teneur des cendres en élément potassique varie avec leur origine : les plus
riches sont les cendres de genêts ; et, si l'on considère une même essence
de bois, les cendres des ramilles et des rameaux sont supérieures à celles
obtenues avec le bois du tronc.
En bonne moyenne, on peut dire que les cendres de bois non
lessivées sont aussi riches, à égalité de poids, que les engrais potassiques
les moins purs obtenus par les mines de potasse d'Alsace (sylvinite, chlorure
de potassium, sulfate de potasse), sans cependant en posséder les inconvénients
(déliquescence et forte causticité). Ce qui, au plus haut point, est
intéressant en ce qui concerne le carbonate de potasse des cendres de bois non
lessivées, c'est qu'il est retenu par le pouvoir absorbant du sol, c'est-à-dire
qu'il ne risque point d'être entraîné par les eaux ; de plus, il est
assimilable, c'est-à-dire qu'il peut être absorbé tel et directement par les
racines des végétaux, sans qu'il lui soit besoin de subir aucune transformation ;
enfin, il est un élément actif de la nitrification se déroulant dans le sol.
Bref, le carbonate de potasse, élément potassique de premier choix, donne aux
cendres une grande valeur fertilisante.
Quant à la chaux, elle existe également dans les cendres de
bois non lessivées, sous la forme de carbonate de chaux : il en résulte
que ces cendres sont de nature alcaline et que leur emploi est nettement
indiqué dans les sols manquant de calcaire.
Ajoutons enfin que les cendres de bois non lessivées
contiennent en outre quelques éléments minéraux jouant un rôle actif et heureux
sur la végétation, comme la magnésie.
En ce qui concerne les cendres, de bois lessivées, elles ont
été plus ou moins appauvries, et l'élément fondamental, à savoir le carbonate
de potasse, a vu son pourcentage ramené à 1,5 ou 2. On compensera évidemment en
augmentant les doses.
Pratique de l'utilisation des cendres de bois.
— On les recueillera précieusement et on les conservera
soigneusement à l'abri de l'humidité, en local sec, dans de vieilles caisses,
de vieux tonneaux.
La meilleure méthode d'utilisation consiste à les enfouir
soit au moment du labour d'automne, soit au moment du bêchage de printemps ;
nous avons vu que le carbonate de potasse se dissout dans les liquides du sol,
ce qui évite toute cause de brûlure aux plantes, et qu'il est retenu grâce aux
propriétés absorbantes de la terre.
La dose à utiliser varie avec la nature même du sol :
en terre légère, on peut tabler sur 20 à 25 hectolitres à l'hectare (un
hectolitre de cendres vierges pèse autour de 55 kilogrammes) ; en terre
forte, on peut aller jusqu'à 35 à 40 hectolitres.
Mais, dans le cas d'enfouissement au bêchage de printemps,
il est prudent de ne pas forcer la dose : 5 à 6 kilogrammes à l'are
suffisent largement. On ne répandra jamais les cendres sur les semis ou les
plants repiqués ou bouturés pour éviter de graves brûlures ; en effet, en
recouvrant les graines ou en touchant les plants, le carbonate de potasse, qui
est caustique, forme une solution concentrée pouvant causer de graves dégâts.
Les cendres de charbon (houille, boulets, anthracite,
etc.), bien que pauvres comparativement aux précédentes, ne doivent cependant
pas être négligées. Elles peuvent rendre plus légères les terres lourdes,
fortes : elles agissent favorablement sur la nature physique et chimique
du sol en le rendant plus perméable, moins compact, grâce à leur richesse en
chaux et en sable. Si l'on veut augmenter leur valeur fertilisante, il suffit
d'employer en même temps un engrais convenable, approprié au sol et aux
cultures envisagées. On enfouira convenablement au moment du bêchage et on aura
soin de bien mélanger au sol.
On peut enfin utiliser les cendres de boulets ou de houille
pour recouvrir les allées en remplacement du sable, et toutes les cendres
peuvent entrer, de façon heureuse, dans la constitution des composts, car elles
aident activement à la fermentation.
BOILEAU.
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