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L'aquarium d'appartement

Les poissons vivipares

Pourquoi n'ai-je encore rien dit des « vivipares » ?

... Parce que l'aquariophilie semble assez développée en France pour qu'il n'y ait pas lieu de traiter ce sujet ...

Il apparaît cependant que cette famille de poissons n'est pas parfaitement connue de chacun, malgré sa rusticité et l'extrême facilité de sa conservation, de sa reproduction continuelle et de l'élevage des jeunes en aquarium.

Cette famille de poissons, originaire de l'Amérique centrale, offre la particularité d'émettre des petits vivants, et relativement gros, à peu près conformes dès la naissance à l'image des parents. Ce caractère, inaccoutumé chez les poissons, présente beaucoup d'attrait pour les débutants en aquariophilie ; et l'on peut admettre que, dans la plupart des cas, c'est avec ces poissons que s'effectuent les débuts dans la carrière illimitée de l'amateur.

Cette viviparité n'est qu'apparente, en ce sens qu'elle correspond plus exactement à une réelle ovoviviparité — comparable à celle de la vipère, — alors qu'elle atteint un degré de perfection bien plus élevé chez certains poissons de mer à squelette cartilagineux.

Les espèces de « vivipares » sont nombreuses, encore qu'il soit vraisemblable que toutes n'ont pas encore été déterminées. Mais, en fait, les marchands de poissons d'aquarium n'offrent guère que quatre genres ou espèces et certains de leurs hybrides, dont les noms ont été vulgarisés pour l'usage courant :

    — Xipho (Xiphophorus Helleri) ;
    — Platy (Platypoecilus maculatus) ;
    — Gupi (Lebistes reticulatus) ;
    — Molly (Mollienesia sphenops, M.latipinna, M. velifera).

(Ces deux dernières espèces, magnifiques, sont devenues à peu près introuvables depuis la guerre.)

Pratiquement, tous ces poissons ont les mêmes besoins et les mêmes exigences. Nous ne les examinerons que dans leur ensemble :

La température de l'eau ne devrait pas descendre au-dessous de 20° C. (Disons, dès lors, que beaucoup d'aquariophiles tiennent leurs poissons à une température trop basse, dans un aquarium trop petit, avec une nourriture insuffisante en qualité et en quantité.)

La nourriture devrait se composer de menus animaux et végétaux aquatiques : ces poissons se portent tout à fait bien avec un régime composé de larves, de crustacés, d'algues et de plantes, complété par un apport éventuel de féculents. Ce sont de vrais omnivores, si bien que beaucoup d'amateurs ont l'habitude fâcheuse de ne servir à ces poissons que des poudres préparées dans le commerce. Certes, ces préparations peuvent être fort utiles lorsqu'elles sont de bonne qualité, mais leur emploi exclusif est à déconseiller.

La qualité de l'eau ne dérange guère nos « vivipares ». En raison de leurs affinités et de leur habitat naturel, ils supportent un milieu plus ou moins acide ou alcalin. Leur tolérance est si grande que ceux qui sont le plus largement euryhalins, les mollys, par exemple, passent sans transition de l'eau douce à l'eau de mer et y vivent, sans reproduire toutefois. Les gupis eux-mêmes reproduisent et se développent dans l'eau saumâtre à 50 p. l00. Il est possible qu'ils supportent bien un plus fort dosage ... Seule la trop grande dureté de l'eau est à éviter.

La fécondation a lieu, chez la plupart de ces espèces, à distance, au moyen de l'organe spécialisé du mâle, dû à une importante modification de la nageoire anale. Les femelles sont fécondées pour plusieurs parturitions successives. Les pontes se répètent à des intervalles d'un mois environ, selon l'espèce, la température et l'alimentation.

Les jeunes sont relativement gros ou très gros, selon les espèces. Leur nombre varie, selon les cas, de 10 à 150 à chaque ponte.

Il convient, naturellement, de prendre certaines dispositions pour que les parents, affamés, ne dévorent pas leur progéniture : de ce côté, il est suffisant de nourrir fortement, avec des proies variées. Accessoirement, on devra garnir l'aquarium de végétation fine, où les jeunes trouveront un refuge.

L'élevage conçu de façon méthodique appartient plus spécialement aux professionnels ; car il faut convenir que l'amateur n'est pas outillé pour élever dans des conditions parfaites les quelques milliers d'alevins qu'il peut récolter au cours de l'année. Du moins, il obtiendra toujours des résultats suffisants ; et, en tenant compte des principes indiqués, il n'aura aucune difficulté à regarnir son aquarium avec les plus beaux sujets de son propre élevage.

J. GARNAUD.

Le Chasseur Français N°637 Mars 1950 Page 190