Différenciation.
— Ces deux méthodes de reproduction, le croisement
et le métissage, sont souvent confondues l'une avec l'autre. En réalité,
le croisement n'est autre chose que l'accouplement d'un sujet mâle avec un
sujet femelle appartenant à deux races différentes, dans le but d'obtenir des
métis dont les aptitudes zootechniques sont intermédiaires entre celles des
races qui les ont engendrés.
Les métis de première génération sont des demi-sang. Si on
accouple ces demi-sang avec l'une des races initiales, on obtient des 3/4 de
sang et, en continuant le croisement dit « continu » avec un mâle de
même race, les produits deviennent des 7/8, puis des 15/16 de sang, etc. À
partir de ce moment, les sujets présentent les caractères raciques du mâle
importé, ce qui permet la substitution d'une race peu productive par une autre
qui l'est davantage.
C'est le procédé le plus économique, dans les élevages des
races chevalines, bovines, porcines, caprines, ovines et tous les animaux de
basse-cour, pour augmenter les aptitudes à la production du travail, de la
viande, du lait, des oeufs, de la laine, des fourrures, des plumes, etc.
Le métissage consiste en l'accouplement des métis entre eux,
dans le but d'obtenir une race nouvelle, aussi homogène que possible. Cette méthode
est assez instable, quant aux résultats qu'on en obtient, en raison de la
suprématie de certains caractères, dits dominants, sur d'autres, appelés
dominés, qui finissent à la longue par s'effacer. Bien souvent les produits ne
se ressemblent guère ; ils sont en état de variation désordonnée.
Au point de vue pratique, le croisement pour l'obtention des
demi-sang peut être recommandé, parce que les métis de première génération
gagnent en force, en vigueur, en précocité; en rusticité et en productivité sur
les races dont ils proviennent et, si l'on peut préconiser le croisement
continu, les résultats sont souvent décevants dans le métissage, à moins qu'il
soit conduit avec maîtrise, par des éleveurs au courant des lois zoologiques et
zootechniques, pour fixer les caractères utilitaires.
Le simple croisement.
— Effectué dans le but d'augmenter la productivité du
bétail, petit et gros, mais seulement dans le cas où on n'aurait pas intérêt à
conserver les races pures, le croisement simple peut donner des résultats
satisfaisants, qu'il s'agisse d'animaux de travail ou de rente.
Ainsi, pour avoir des chevaux forts, rustiques et courageux,
on fera saillir les juments du pays par des étalons plus robustes, plus râblés
et plus musclés, par exemple par des Ardennais, aptes au travail de la terre,
résistants à la fatigue et peu exigeants sous le rapport de la nourriture.
Si l'on veut augmenter la lactation des vaches, on fera
intervenir un géniteur de race laitière (Hollandaise, Flamande, Normande,
etc.), en choisissant celle qui convient le mieux aux différentes affectations,
production du lait en nature, fabrication du beurre ou des fromages. Les métis
obtenus seront sensiblement plus productifs que les vaches du pays, le
rendement annuel en lait pouvant dépasser de 1.000 litres et davantage celui
fourni par les races plus ou moins dégénérées par le défaut de soins et le
manque de sélection.
S'il s'agit de porcs, l'accouplement des truies communes
avec un verrat Craonnais ou Yorkshire communiquera à la descendance une
rusticité et une précocité qui feront gagner un temps précieux sur le
développement des sujets destinés à la charcuterie et sur leur futur
embonpoint. On obtiendra encore de meilleurs résultats en croisant les
Yorkshire avec les Craonnais. La grande précocité et l'aptitude à prendre le
gras s'allieront heureusement avec la rusticité et la fécondité des Craonnais,
pour l'obtention des poids lourds et l'augmentation du pourcentage de la viande
sur le lard et la graisse.
Chez les moutons, c'est la même chose. Ainsi les Dishley,
bêtes à viande, et les Mérinos, bêtes à laine, fourniront des métis Dishley-Mérinos
aptes aux deux productions. Leur chair sera de qualité irréprochable et leur
laine, d'une grande finesse, aura beaucoup de valeur.
Un bouc alpin fortement charpenté, croisé avec des chèvres
communes, améliorera grandement la lactation et le poids de la descendance chez
les métis de première génération.
Une lapine de race commune, couverte par un mâle géant des
Flandres ou autre, donnera des lapereaux de poids moyen, plus rustiques et plus
prolifiques que le géniteur.
Les poules communes, cochées par des coqs de grande taille
ou par des coqs de race pondeuse, fourniront des poulets plus étoffés et des
poulettes meilleures pondeuses que ne le sont les volailles de ferme. Il est
même possible, avec des races sélectionnées et bien fixées, tant pour la viande
que pour l'œuf, d'augmenter leur productivité dans les deux sens par le croisement.
Ainsi, en mettant dans un parquet de Bresses un coq Leghorn, par exemple, on
remarquera que les poulettes de demi-sang verront leur ponte se déclencher un
mois plus tôt que celle des sujets de race pure, considérés séparément, et que
la descendance sera encore plus rustique et plus vigoureuse.
Même remarque en ce qui concerne les autres volailles,
canards, oies, dindons, pintades, etc. Le croisement permet d'obvier aux
insuffisances de la production et de revigorer toutes les espèces, à condition
de s'en tenir aux métis de première génération. C'est le meilleur moyen de lutter
contre la consanguinité et la dégénérescence qui subsistent dans la plupart des
élevages.
Mais, si l'on continue le métissage, comme les caractères et
les aptitudes ont une tendance à retourner vers l’un ou l'autre des types mis en
présence, on devra, pour équilibrer la production dans le sens que l'on a en
vue, faire intervenir comme géniteur un mâle dont les caractères n'ont été ni
affaiblis ni dominés par les caractères de la race dominante.
C. ARNOULD.
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