De très nombreux correspondants m'ayant signalé les
déboires qu'ils éprouvent lors de l'éclosion de leurs poussins, j'ai pensé,
étant donné que ces lignes paraîtront en pleine période de naissances, qu'il
serait utile aux aviculteurs, lecteurs du Chasseur Français, de leur
rappeler l'essentiel des précautions à prendre en pareil cas pour mettre de
leur côté toutes les chances de réussite.
Il faut tout d'abord distinguer nettement les éclosions
obtenues selon la méthode naturelle (poules ou dindes) et celles réalisées avec
l'aide de couveuses artificielles. Nous allons parler succinctement de l'un et
de l'autre de ces procédés et de ce qu'il y a lieu de faire, selon le cas :
1° Couvées naturelles.
— La veille de l'éclosion, la couveuse aura la liberté
de retourner sur ses œufs, aussitôt qu'elle aura bu et mangé, sans se soucier
de laisser ou non refroidir les œufs. Pendant son repas, il sera bon d'aplatir
un peu les bords du nid afin d'éviter l'éclosion dans une cuvette trop conique.
Pendant toute la durée de celle-ci, la couveuse ne sera plus
dérangée ; tout au plus pourra-t-on passer très légèrement la main en
dessous des plumes, matin et soir, pour enlever les coquilles vides aux arêtes
toujours coupantes. Il est possible et souhaitable, si l'animal est familier,
de lui présenter un peu de blé ou de maïs dans la main, et de la faire boire.
Dans quelques cas, il sera possible, en agissant avec de
très grandes précautions, d'aider très légèrement un poussin à briser sa
coquille, mais attention à ne pas le faire saigner ; il serait alors perdu
ou, s'il vivait, resterait rachitique. À noter que les éleveurs sélectionneurs
soucieux d'obtenir uniquement des poussins vigoureux n'aident jamais un poussin
en difficulté, estimant que la sélection naturelle doit jouer là dans toute sa
rigueur.
Lorsque l'éclosion est terminée et que les poussins sont
bien secs, c'est alors le moment de les transférer, avec leur mère, dans la
boîte spéciale dite « d'élevage », qu'il est conseillé d'utiliser
pour le premier âge.
2° Incubations artificielles.
— Les utilisateurs de couveuses artificielles sont
souvent effrayés, lorsqu'ils sont débutants, par l'apparente difficulté de
conduite et de surveillance de ces appareils. Ils s'aperçoivent bientôt que
leurs craintes étaient vaines, s'ils ont été attentifs, et sont parfois enclins
à relâcher la surveillance au moment terminal, qui est précisément celui qui
exige le plus de vigilance.
J'ai personnellement employé dans ce cas, à chaque fois avec
succès, une méthode que M. Paul Waroquiez, secrétaire général de la Société
centrale d'aviculture de France, a précisément exposée, avec clarté, dans une
des récentes revues de ladite société. Je ne peux faire mieux que de vous la
résumer dans ces colonnes :
Les œufs ayant été mirés, comme il se doit, les poussins
arrivent alors, en principe tous vivants, au moment de l'incubation : les
uns pour éclore dans quelques jours, les autres seulement vingt-quatre heures
plus tard, après avoir résorbé le jaune fixé à l'abdomen. Le poussin, d'un
petit coup de bec, écaille sa coquille, afin de puiser dans l'air extérieur la
force qui lui permettra de remuer dans sa coquille, qu'il doit découper
circulairement pour pouvoir, par une contraction du cou, faire basculer le
couvercle et se libérer de sa prison.
Faute d'humidité, la membrane qui tapisse intérieurement la
coquille se durcit d'une façon invraisemblable ; les coups de bec des
poussins ne parviennent pas à la percer ou bien, une fois trouée, cette
membrane durcie se resserre sur le sujet, paralyse ses mouvements et le tue.
Il faut savoir, en effet, que les poussins nés les premiers
absorbent à pleins poumons l'humidité de l'air, puis à travers les coquilles
poreuses ils absorbent également avec les autres poussins, en fin de
développement, l'humidité contenue dans les chambres à air des œufs non béchés ;
ce qui, à défaut d'intervention, permet aux premiers éclos de condamner
involontairement leurs semblables à une mort certaine.
Le remède à cette situation est le suivant :
Préparez de l'eau très chaude, quelques éponges neuves ou
désinfectées, des bacs plats en terre cuite et disposez le tout près de la
couveuse. Ouvrez, cette dernière (l'atmosphère de la pièce étant réchauffée,
bien entendu), trempez vos éponges dans l'eau chaude, essorez, placez les
éponges dans les bacs et les bacs dans la couveuse, assez loin des œufs.
Fermez et observez le thermomètre. S'il atteint plus de 40°,
entr'ouvrez légèrement pendant quatre à cinq secondes et refermez aussitôt la couveuse.
Si le thermomètre ne redescend pas au bout de quelques minutes, aérez encore
deux ou trois secondes.
Bientôt les premiers poussins commenceront à se dégager des
coquilles et leurs pépiements seront perceptibles de l'extérieur. Six à sept
heures après le calme indispensable à l'éclosion, revenez avec une corbeille ou
un panier garni de chiffons de laine et avec une casserole d'eau bouillante.
Ouvrez à nouveau la couveuse, ramassez rapidement les
poussins éclos, sauf les derniers-nés, et jetez à terre les coquilles vides.
Ces opérations doivent se faire avec dextérité, mais sans brutalité, dans une
pièce à 20/22° centigrades.
Enlevez les éponges, pressez l'eau tiède qu'elles
contiennent, trempez-les dans l'eau bouillante, essorez un peu, et replacez-les
dans leurs bacs. Refermez la couveuse.
Comme lors de la première mise en place, surveillez le
thermomètre ; aérez rapidement, s'il y a lieu, dans les mêmes conditions.
Recommencez encore une fois l'ensemble de ces opérations six heures plus tard.
Cette méthode vous permettra de diminuer considérablement la mortalité à
l'éclosion et d'obtenir de beaux poussins lourds, et vigoureux.
R. GARETTA.
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