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L'épagneul Papillon

Ce petit chien d'allure vive a de très harmonieuses proportions, il est racé, délicat, avec une tête expressive de forme normale, deux grands yeux intelligents, un cou gracieusement arqué mais solide, des pattes fines terminées par des pieds élégants.

Malgré sa taille réduite, c'est un chien normal dans toutes les parties de son corps, très robuste, qui supporte le froid et n'est pas incommodé par la chaleur ; il s'accommode d'une vie sédentaire et s'adapte à la campagne merveilleusement : il chasse volontiers, pourchasse les oiseaux, harcèle les rats, tout ceci en jouant, mais le retour atavique est là : c'est un ancien chien de chasse, réduit de taille.

Dans sa classification du chien, Pierre Mégnin nous dit que ce chien appartient au type braccoïde. Quelle que soit sa taille, l'épagneul a toujours un poil long, soyeux, plutôt plat, parfois ondulé, mais jamais ébouriffé. Des franges abondantes garnissent les oreilles, les cuisses et le bord postérieur des pattes. Le poil est toujours ras sur le crâne, le museau et la face antérieure des membres. La queue tend à se ramener sur le dos en forme de yatagan, mais, au repos, elle est horizontale et généreusement pourvue de poils longs.

Cette race comprend deux variétés : la première connue sous le nom d'épagneuls nains continentaux, à oreilles tombantes, attachées au sommet du crâne et de moyenne longueur ; la deuxième sous le nom d'épagneuls papillons, à oreilles obliques, mais droites, portées de telle façon qu'elles font penser aux ailes déployées d'un papillon.

L'origine de ce petit chien est des plus anciennes. D'où vient-il ? On le dit importé d'Espagne ; c'est la version des vieux auteurs, et ils ont l'étymologie pour eux. Mais l'épagneul était aussi connu en Chine avant Jésus-Christ !

Dans un remarquable ouvrage sur les épagneuls continentaux, le baron Houtart étudie cette race d'après les peintres et les artistes de tous les pays qui nous ont laissé à travers les siècles l'image de cet élégant petit chien.

Son ancêtre est l'épagneul pur. Tiziano Vecelli, dit le Titien, l'a fait connaître mieux que tout autre : « Cet épagneul est petit, mais pas jusqu'à l'extrême ; tout proche de la souche primitive, il reste rustique et ne révèle par rien les anomalies d'une sélection exagérée ou les déformations de fantaisie. Le crâne est large entre les oreilles attachées assez haut et pas trop grandes, non étroitement collées aux joues ; il est légèrement arrondi sans prendre trop d'ampleur, la cassure assez forte, mais pas brusque, le museau suffisamment consistant pour être empoigné. Du point d'attache des oreilles à l'extrémité de la truffe, la ligne se rétrécit régulièrement en forme de coin, avec toutefois un certain renflement à hauteur des yeux dont la pointe extrême marque précisément le point culminant.

» Ces yeux sont plutôt ovales que ronds, ni trop grands, ni trop distants, puisque aucune monstruosité crânienne ne les rejette loin l'un de l’autre. Pour la même raison ne sont-ils pas proéminents. Le corps est étoffé, plutôt allongé que carré, sans avoir l'aspect boudiné, car la poitrine est profonde, ni l'apparence bassette, parce que les membres sont gracieux, bien que solides. La queue, non raccourcie, est pendante au repos, mais, à l'action, se ramène hardiment au-dessus du dos, sans le toucher, ni s'enrouler. »

Au XVIe siècle cet épagneul était très répandu aux Pays-Bas, à en juger par de nombreuses figurations.

L'infante Isabelle possédait de petits épagneuls qu'elle élevait ; en 1622, elle chargea Rubens d'offrir à Marie de Médicis un petit chien de cette race. Rubens reproduisit deux fois ce petit animal dans les toiles qu'il consacra à la reine mère.

Murillo nous représente aussi ce petit chien de salon ; le type est resté fidèlement le même, nous le retrouvons encore aujourd’hui, mais réduit de taille. Ce petit chien est donc élevé parallèlement aux Pays-Bas, en Allemagne, en France et en Espagne.

Avec le temps, le chien s'affina, et Mignard, qui est son peintre attitré, nous en donne maints exemples avec ses portraits d'Henriette d'Orléans, de Marie de Bourbon et du grand dauphin entouré de sa famille. Le Roi Soleil et ses proches sont souvent accompagnés de ces petits épagneuls bondissants, panache au vent, tout près de notre épagneul sélectionné actuel. Mme de Pompadour eut aussi son petit épagneul, et, au XVIIe siècle, les peintres nous montrant ce gracieux animal abondent.

Puis, à la fin du XIXe siècle, apparut un petit épagneul à oreilles droites portées obliquement que l'on appela épagneul papillon. On connaît mal l'origine de cette transformation, mais le fait est là, et il faut l'accepter !

Est-ce une anomalie que des éleveurs ont fixée ? Ou bien ces petits chiens ont-ils été croisés avec des races mexicaines du genre « chihuahua » qui portent de grandes oreilles obliques ?

La robe de ce charmant petit chien est toujours de couleur délicate ; c'est sans doute ce qui a charmé et inspiré tant de peintres. Elle est rarement toute blanche, et, dans ce cas, la pigmentation doit être excellente ; elle est quelquefois mouchetée ou avec de larges taches blanche et limon, rouge et blanc, noir et blanc, sable et blanc ou tricolore, le blanc dominant généralement avec une tache blanche descendant du front, ceci déterminant le corps du papillon. La truffe bien noire et les yeux très foncés, entourés de marron ou de noir brillant, tranchent dans l’ensemble, donnant au chien une expression vive et hardie.

Le poil est soyeux, sans sous-poil, fin, doux, flottant, abondant et brillant, en grande quantité, surtout au cou, à la poitrine et aux cuisses.

Les chiennes mettent bas facilement, elles sont d'excellentes mères. Cette race n'a pas besoin d'être choyée, et il est tout à fait facile d'en conduire l'élevage.

Actuellement, il y a peu d'éleveurs en France de cette race d'épagneuls, mais ils sont très beaux ; c'est en Belgique qu'ils sont le plus répandus.

Ils furent introduits en Angleterre il y a une trentaine d'années ; leur beauté et leurs manières charmantes les mirent bien vite à la mode.

La taille de ce petit chien varie : elle est de 15 à 28 centimètres ; son poids est très variable également, de 1kg,500 à 5 kilogrammes.

Vers six mois il est adulte.

De caractère gai, vif, joueur, pas grognon ni méchant, il aboie juste pour prévenir à l'approche des nouveaux venus. Extrêmement fidèle et très facilement propre, c'est 1e chien d'appartement idéal.

L'épagneul papillon est donc une variété de l'épagneul nain continental sélectionné, tous les points du standard sont les mêmes, qu'il soit question de la tête, du corps ou de la fourrure ; seules les oreilles marquent la différence entre elles.

A. PERRON.

Le Chasseur Français N°639 Mai 1950 Page 274