Une race appréciée.
— Le mouton de la Charmoise a été créé de toutes pièces
par Malingié, dans le courant du siècle dernier, en faisant saillir des brebis
berrichonnes et solognotes par des béliers de Kent qu'il acheta en Angleterre.
Telle est l'origine de la belle race ovine française qui compte aujourd'hui un
nombre considérable d'éleveurs, convaincus de sa supériorité comme race à deux
fins, à la chair exceptionnellement fine et d'un rendement très élevé en viande
nette.
Au début, les premiers sujets issus du croisement se
trouvaient quelque peu disparates, c'est-à-dire en état de variation
désordonnée, quant aux formes et aux aptitudes. Mais, pendant la seconde moitié
du siècle dernier, Malingié eut de nombreux successeurs qui, ayant apprécié la
valeur de ses métis, s'efforcèrent d'en fixer les caractères zoologiques et
zootechniques. Dans ce but, ils se groupèrent en syndicat, et c'est grâce à lui
que les métis solognots x kent berrichons devinrent des Charmois réputés, pouvant
prendre place dans toutes les régions, qu'elles soient riches ou pauvres.
En outre, ainsi que l'a fait judicieusement remarquer M. Ferté
père, le Charmois est doublement apprécié de la boucherie, du fait de la
qualité de sa viande et de la faible proportion de suif qu'elle contient,
comparé à la chair. Elle est notoirement inférieure à celle que l'on rencontre
chez la plupart des autres races ovines.
Standard de la Charmoise.
— Le syndicat du mouton de la Charmoise, dont le siège
se trouve être au 41 de la rue La Fayette, à Paris (9e), a dressé
ainsi qu'il suit la monographie de la race :
Tête : petite, blanche ou rosée, parfois havane,
faciès plan et élargi.
Oreilles : petites, minces, droites, mobiles,
pas de cornes.
Cou : court et assez gros.
Dos : horizontal.
Poitrine : ample, côte ronde.
Croupe : large.
Gigot : rebondi.
Membres : blancs, courts, minces, écartés, bien
d'aplomb et dénudés.
Pigmentation : aussi faible que possible.
Toison : blanche, fine ; longueur de la
mèche, 83 millimètres : diamètre de la fibre, 34,2 microns ;
résistance, 11gr,3 ; indices de l'allongement, 0,367 ; poids,
de 3 à 6 kilogrammes chez les béliers, de 2 à 5 kilogrammes chez les brebis.
Taille moyenne : 0m,56 environ.
Poids désirable : 70 à 100 kilogrammes (béliers) ;
40 à 65 kilogrammes (brebis). Le mouton Charmoise est à la fois producteur de
viande et de laine. C'est une race fine, élégante, au corps harmonieux, à la
culotte ample, au gigot très développé.
Précocité : remarquable, croissance terminée
entre dix-huit et vingt mois.
Aptitude à l'engraissement : bonne, puisque les
jeunes peuvent prendre de la graisse à leur naissance.
Autres remarques : mouton sobre, vite rassasié,
facile à nourrir, d'une vigoureuse santé, peu impressionnable et très bon
marcheur.
Un mouton passe-partout.
— En créant la Charmoise, Malingié avait surtout en vue
de créer une race capable de vivre aussi bien dans les pays riches que dans les
pays pauvres, c'est-à-dire qu'elle devait pouvoir s'adapter à toutes les
situations, être capable de s'entretenir et même de tirer un bon profit des
maigres pâturages.
Sans doute, le rendement ne peut pas être comparé à celui
pouvant être obtenu par le rationnement normal, ni après la suralimentation,
mais le mouton cherché devait pouvoir vivre au ralenti sans souffrir et
supporter des régimes quelque peu déficients.
Dans la pratique courante, les agneaux charmois âgés de
quatre à cinq mois pèsent 35 kilogrammes de poids vif, soit les deux tiers de
ce qu'ils pèseront une fois adultes. Ils sont sensiblement les mêmes que ceux
des southdown, malgré que, chez ces derniers, les adultes soient un peu plus
forts.
D'autre part, les brebis charmoises sont très précoces. On
peut sans inconvénient les faire saillir à un an, et c'est une marcheuse
infatigable, capable de parcourir de grands trajets sur les pâturages escarpés,
à végétation clairsemée.
Au point de vue fécondité, les femelles de cette race
défient tout concurrence. M. Ferté, du Soissonnais, est parvenu à obtenir cinq
agneaux en trois ans. M. Leroy, dans sa bergerie du Pignon, se contente de
produire trois agneaux en deux ans, en faisant varier les époques de la lutte.
Ces résultats ne pourraient pas être obtenus sans risques
avec les races anglaises, par exemple, ayant été soumises depuis un temps immémorial
à des régimes d'exception et manquant de rusticité. On peut en dire autant du
mérinos.
C.ARNOULD.
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