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Menaces sur les peupleraies

Les boisements de peupliers, qui, en raison de la rapidité de croissance de ces arbres, voient leur vogue grandir partout où les conditions de sol leur sont favorables, sont malheureusement soumis aux attaques d'un grand nombre de parasites qui, soit dévorent le feuillage et peuvent dangereusement affaiblir la vitalité des arbres, soit s'attaquent au bois lui-même, en le rendant impropre à certains des usages prévus ou en favorisant la pénétration, par les plaies, de maladies qui compromettent la vie des peuplements.

Contre les uns et les autres, certaines précautions peuvent être prises qui permettent de réduire au minimum les dangers résultant de la présence des parasites.

Nous nous occuperons aujourd'hui, en premier lieu, des insectes, et plus spécialement de ceux qui s'attaquent au bois.

Tous ont un mode de vie un peu analogue et des larves, en général, de couleur blanc jaunâtre, bien qu'appartenant à des groupes très différents.

Parmi les coléoptères, ce sont les « saperdes », le charançon « cul blanc », les « agrilus ».

Parmi les lépidoptères, ce sont les « sésies », le « gâte-bois ».

Parmi les diptères, des mouches de la famille des Agromyzidae.

Les saperdes.

— Ce sont des coléoptères longicornes bien reconnaissables à la longueur de leurs antennes.

La grande saperde (Saperda carcharias L.) est un gros insecte de 2cm,5 à 3 centimètres de long, de couleur noire, masquée par un revêtement velouté de poils courts de teinte fauve clair. Le noir n'apparaît plus, sur les élytres de l'animal, que comme une ponctuation disséminée.

La femelle dépose, au printemps, en juin ou juillet, le plus souvent dans les fissures de la base des jeunes troncs de cinq à vingt ans, des œufs isolés, d'où sortent bientôt des petites larves blanches. Plusieurs larves peuvent parfois, sur chaque tige, creuser une galerie de section ovale, qui remonte dans l'intérieur du bois. L'occupant de chaque galerie élargit sa demeure sur toute la longueur, au fur et à mesure de sa croissance, et repousse régulièrement vers l'extérieur, en reculant, les débris de son industrie, sous forme de petits copeaux. Leur accumulation à la base de l'arbre, et au voisinage de l'orifice, révèle la présence de l'ennemi.

Au bout de deux années, la larve, ayant atteint 4 centimètres, se transforme bientôt en un nouvel insecte parfait qui, après quelques dégâts sans importance pratiqués aux feuilles et écorces jeunes, est bientôt prêt à pondre.

C'est d'abord avant ce moment qu'il faut défendre nos plantations. La ponte est, en effet, évitée lorsque l'animal trouve sur l'écorce de la base des troncs (sur une hauteur de 0m,50 à 1 mètre, selon les cas) un revêtement continu de goudron. Malheureusement, la croissance rapide des peupliers disloque assez vite ce revêtement protecteur, qui ne doit donc être appliqué que très peu avant le vol des insectes.

Lorsque, comme nous l'avons vu plus haut, le parasite signale sa présence dans la place, il est difficile de l'atteindre au fond de sa galerie. L'empaler avec un fil de fer fin devient une opération longue et coûteuse. Dans son tunnel vide de débris ou à peu près, et c'est une circonstance heureuse, les gaz asphyxiants peuvent l'atteindre. Divers produits peuvent en produire facilement (grâce à l'humidité du bois frais) et seul subsiste un problème de mise en œuvre pratique.

Un fragment de carbure de calcium introduit au début de la galerie, que l'on obturera par un tampon de glaise, donnera rapidement naissance à de l'acétylène très efficace. Cherchant un procédé plus rapide, applicable à de grandes plantations, une société allumettière italienne a réalisé une sorte d'allumette enduite d'un fuseau de gélatine, adapté au calibre de la galerie, et contenant au moins du phosphure de zinc. L'hydrogène phosphore provenant de la décomposition en atmosphère humide réalise ici aussi la destruction recherchée.

La petite saperde (Saperda populnea L.), atteignant au maximum 1cm,5, limite ses dégâts à des bois de plus petite dimension. C'est surtout sur les branches ou sur les jeunes plants de pépinières que des renflements importants signalent sa présence.

L'insecte a des élytres de teinte sombre, qui portent chacun une rangée longitudinale de quatre ou cinq taches jaunâtres. La femelle, après avoir, à coups de mandibules, tracé quelques rides transversales sur une petite plage d'écorce, limite ensuite cette zone par une incision de l'écorce en forme de fer à cheval ouvert vers le haut, qui révélera, en cours de cicatrisation, une attaque de l'année, puis dépose son œuf au milieu de cette zone, dans une petite excavation, entre bois et écorce.

Dans le tissu cicatriciel qui se forme, en réaction contre la présence de l'œuf et de la larve, et provoque le renflement du rameau, cette dernière trouve, au début, une nourriture appropriée, avant de pénétrer dans la moelle sur 4 à 5 centimètres de longueur. Ces galeries, imposantes pour le diamètre des tiges, posent un grave problème au sujet des plants de pépinières ou des jeunes boisements. Elles peuvent, ou entraîner leur mort, ou provoquer des ruptures. Aucun moyen pratique de protection n'existe, et l'extermination régulière des parasites en place doit être poursuivie par l'enlèvement des branches ou le recépage des plants contaminés.

Le charançon cul blanc.

— C'est, scientifiquement, le Cryptorhynchus lapathi L. Il peut atteindre 1 centimètre de long et se reconnaît facilement à ses élytres rugueux, dont la moitié postérieure porte un revêtement complet farineux, blanc ou blanc rosé.

L'insecte ronge, au printemps, des plages d'écorce et dépose ses œufs dans des fissures sur les jeunes tiges. Les larves circulent d'abord sous l'écorce, puis pénètrent dans le bois, par des galeries atteignant parfois 10 centimètres. Comme ci-dessus, au bout de deux ans, la larve, qui, courbée en arc comme toutes celles des charançons, se reconnaît facilement, a terminé son développement et donne bientôt naissance à de nouveaux adultes.

Les dégâts de ceux-ci provoquent des cicatrisations d'aspect très souvent chancreux et l'insecte pourrait bien être, hélas, un des propagateurs actifs du chancre du peuplier là où il existe.

Aucun moyen pratique de destruction des larves n'a pu être mis en œuvre jusqu'à maintenant en raison de leur petite taille. Il faut éliminer soigneusement tous les rameaux ou tiges atteintes.

Les agrilus.

— Ce sont de petit buprestes de plusieurs espèces, très élancés, de teintes métalliques, et dont les larves aplaties, à tête élargie en massue, creusent entre bois et écorce des galeries sinueuses, souvent en zig zags parfaits.

Ce sont des hôtes des plants en mauvaises conditions de végétation et qui concourent beaucoup à accélérer leur mort.

Tous les insectes que nous venons d'examiner sont très souvent, en outre, les hôtes des souches fraîches, vestiges des exploitations récentes. Ces souches sont toujours, après ces exploitations, des foyers de multiplication d'insectes ou de maladies et doivent être détruites.

Elles pourraient être badigeonnées de goudron pour empêcher les pontes, mais les insectes déjà par hasard installés n'en subiront aucun dommage.

Un seul moyen est radical : la destruction par le feu. Ceci peut d'ailleurs être économiquement réalisé en brûlant, sur ces souches, tous les débris de l'exploitation et les brindilles. C'est d'ailleurs une recommandation valable aussi pour enrayer en même temps la multiplication d'autres insectes qui feront l'objet d'études ultérieures.

LE FORESTIER.

Le Chasseur Français N°642 Août 1950 Page 489