Accueil  > Années 1950  > N°642 Août 1950  > Page 491 Tous droits réservés

Élevage des escargots

Un délicieux gastéropode.

— Les escargots accommodés suivant les principes de l'art culinaire, notamment par la méthode bourguignonne, fournissent un plat délectable et très nutritif, puisque leur teneur en matières albuminoïdes est de 16 p. 100.

Or, malgré les apports fournis par le ramassage des coureurs et l'appoint des petits gris, l'approvisionnement des restaurateurs laisse souvent à désirer, surtout durant l'hiver, à l'époque où les bouchés sont réclamés par la clientèle touristique et les particuliers doués d'un solide appétit. Toutefois, comme la chair de l'escargot est d'une digestion assez difficile, les personnes à l'estomac boudeur ne devront le consommer qu'avec modération.

Quoi qu'il en soit, l'élevage du gros blanc (helix pomatia), vulgairement escargot de Bourgogne ou de vigne, ne peut décevoir ceux qui s'y adonneront en observant les principes directeurs ci-après, puisque la vente des bouchés est assurée, après le moussage, à des prix intéressants, pour peu que l'on veuille se donner la peine de s'adresser aux hôteliers et aux maisons de comestibles qui desservent la clientèle riche.

Notions préliminaires.

— L'escargot est hermaphrodite, c'est-à-dire que, possédant les deux sexes, il joue un double rôle, en fécondant et en se faisant féconder par ses congénères. La copulation ayant généralement lieu en mai, chaque escargot effectue sa grande ponte une quinzaine de jours après, en déposant 40 à 50 œufs ronds et gélatineux en terre, dans des trous ou des fissures, lesquels écloront au bout de vingt-cinq jours en donnant naissance à de petits escargots.

Étant doués d'un gros appétit, s'ils disposent d'une nourriture abondante et appropriée, ils pourront être aptes à la reproduction à un an. Dans le cas contraire, il faut deux ans.

En fin de saison, les adultes peuvent fournir une deuxième ponte, moins abondante que la première. Dans tous les cas, il ne faut pas trop compter sur elle, à moins que les froids ne surviennent tardivement.

L'exploitation rationnelle d'une escargotière comprend deux choses : l'élevage proprement dit, qui se pratique dans un terrain ombragé, naturellement frais, ou pouvant être humidifié par des arrosages, et le parcage, où se poursuit l'accroissement, l'engraissement et le moussage des escargots jusqu'à ce qu'ils soient au point pour la consommation.

Pour éviter les évasions, tous les parcs doivent être enclos de grillages galvanisés, de 50 centimètres de hauteur, dont 10 centimètres enfoncés en terre, pouvant être enjambés facilement, la largeur des mailles ne devant pas être supérieure à 19 millimètres dans les parquets d'engraissement. Pour les parquets d'élevage, il est préférable de les enclore de murs pourvus de planchettes à rabat, sur les faces exposées au sud et à l'est, et d'un ruisselet sur les deux autres côtés.

Escargotière d'élevage.

— Avec seulement 200 reproducteurs gros blancs achetés à des ramasseurs au début du printemps, on peut espérer obtenir 8.000 à 10.000 petits escargots, sur un terrain d'une dizaine d'ares, ombragé par des arbres et des murs. Le long des murs, on placera du rocaillage en porte-à-faux pour y localiser la ponte. Le reste du terrain sera bêché, puis on y jettera de la mousse et, pendant les grandes chaleurs, on arrosera à la lance.

Pour éviter les déprédations aux arbres, on entourera le bas des troncs de cônes en fer-blanc renversés. En outre, l'extrémité de planches fixées horizontalement après les murs sera également armée de bandes de fer-blanc empêchant les évasions. Une passerelle en planches surélevées servira pour les visites et la distribution de la nourriture, de manière à ne pas écraser les petits escargots en marchant.

L'appétit des gastéropodes est surtout intense par temps de pluie orageuse. C'est une véritable boulimie. On devra les approvisionner largement, en toutes sortes de fourrages verts (trèfles, vesces, salades diverses, feuilles de choux, betteraves et autres racines découpées en cossettes, épluchures de cuisine, résidus de marché, etc.). De temps à autre, pour activer la croissance, on donnera un peu de son dans une augette peu profonde, mais ce sont les fourrages verts qui constituent les neuf dixièmes de la nourriture. En cas de sécheresse persistante, faire des apports de mousse et l'humidifier par des arrosages à la lance.

Escargotière d'engraissement.

— Les petits escargots, copieusement alimentés, sont déjà en bonne forme lorsqu'ils se bouchent pour l'hivernage. Au printemps suivant, on les ramasse pour les porter dans le parquet, où ils achèveront leur développement. En fin de saison, lorsqu'ils seront bouchés, on pourra les expédier aux clients avec lesquels on aura passé marché. Les livraisons peuvent se faire soit en nature, soit après empâtage, par le procédé usité en Bourgogne, c'est-à-dire qu'après cuisson et nettoyage des coquilles on remet les escargots, puis on procède au bourrage avec une pâte composée de beurre pétri avec persil, échalotes, aulx et oignons hachés finement.

Tous les ans, après l'enlèvement des jeunes, on repeuple le parquet d'élevage avec 200 ou un plus grand nombre de reproducteurs, suivant l'étendue du terrain disponible, et ainsi de suite, de manière à pouvoir livrer un nombre déterminé d'escargots : 10.000, 20.000, et plus, suivant l'importance de l'élevage et les disponibilités de fourrages, en effectuant au besoin des cultures en plein champ.

Petite escargotière de jardin.

— Pour la consommation familiale, il suffit de réserver une petite parcelle du verger ou du potager, à l'endroit le plus ombragé, 50 à 100 mètres carrés entourés d'un grillage à mailles fines, où l'on mettra 10 à 20 escargots adultes. En les nourrissant copieusement, avec les résidus du jardin, de la cuisine, du fruitier, de la cave, etc., on peut espérer obtenir tous les ans 400 à 800 gros blancs, que la maîtresse de maison apprêtera pour ses pensionnaires, sans qu'ils aient coûté un sou à produire.

Mondiage D'ARCHES.

Le Chasseur Français N°642 Août 1950 Page 491