Parmi toutes les races de lapins — et elles sont
nombreuses — il en est une tout à fait spécialisée, tant par ses
caractères extérieurs que par son but pratique : l'angora. Le lapin
angora, tout couvert de poils longs et soyeux si appréciés par les filateurs, a
en effet l'incontestable supériorité sur les autres lapins de produire une
toison d'un prix élevé, tout en gardant une chair excellente. Le revenu d'un
clapier composé de lapins angoras étant supérieur à celui d'un clapier dont les
sujets sont destinés à la consommation, on voit l'intérêt qu'il y a à étudier
les détails d'un tel élevage.
Comme les autres lapins, les angoras ont les mêmes besoins,
les mêmes exigences. On devra veiller à ce que les cases qui les abritent
soient d'une propreté constante et parfaite, pour qu'ils ne souillent pas leurs
toisons. Notons aussi que le lapin angora, pour produire une laine de qualité,
doit habiter seul dans sa case. Éviter aussi les râteliers, le foin et les
verdures pouvant tomber sur le dos des lapins : préférer l'utilisation
d'augettes un peu profondes.
Le poil du lapin angora est d'une pousse extrêmement rapide.
Si on n'épilait pas certains sujets pendant un an, leur poil pourrait atteindre
de 15 centimètres à 22 centimètres de long. Mais dans les élevages de
production commerciale et non destinés à obtenir des sujets d'exposition, on
épile les sujets tous les deux ou trois mois, lorsque le poil atteint de 6 à 8
centimètres de long.
Quand les jeunes sont sevrés, on fait la première
récolte de poil. Une seconde récolte a lieu deux mois et demi plus tard. Puis,
les récoltes sont régulièrement espacées. Quand une femelle va mettre bas, on
ne lui enlève jamais le poil qui se trouve sous le ventre, sur la poitrine et
sur les épaules.
On récolte le poil par épilation, c'est-à-dire par arrachage
(le procédé de tonte est moins recommandable). Le poil est réuni dans de grands
sacs de papier. Mais, auparavant, on le classe par catégories, selon la qualité
et la longueur.
Il faut compter environ une heure pour épiler un lapin. On
nettoie préalablement le poil, on le démêle avec une brosse spéciale, ou mieux,
avec un souffleur. On arrache délicatement le poil par petites touffes. Quand
on rencontre des poils feutrés ou emmêlés, on les coupe avec des ciseaux et on
les met de côté pour ne pas les mélanger avec ceux de qualité supérieure.
Entre les diverses épilations, on a intérêt, pour que le
poil reste soyeux, à le brosser à intervalles réguliers.
Quand la laine est classée selon sa qualité, on peut la
vendre à des filateurs ou à une coopérative d'achat spécialisée. Pour garder au
poil toute sa valeur, il ne faut surtout pas le presser dans les sacs et le
serrer. Et, pour éviter que les mites ne l'attaquent, ce qui pourrait se
produire dans le cas où l'on n'en aurait pas assez pour le vendre après chaque
récolte, on a intérêt à garder les sacs de papier le contenant dans des
récipients hermétiques, si possible en métal.
Nombreux, parmi les lecteurs intéressés, sont ceux qui
désireraient connaître quelques règles générales rappelant les principes
généraux de cet élevage. Voici ce que dit un éleveur des plus expérimentés et
des plus compétents :
— L'hérédité affecte la production du poil, et il y a
possibilité de sélectionner pour un haut rendement.
— La production est plus élevée en hiver qu'en été et,
pour cette raison, il est important de peser chaque récolte pour éviter les
erreurs.
— L'alimentation a une influence sur le rendement. Elle
doit fournir suffisamment de protéine, de minéraux et de vitamines. Ainsi
l'addition d'une petite quantité d'huile de foie de morue a augmenté de 13 p. 100
le rendement en poil.
— Les femelles donnent un plus fort rendement que les
mâles. Les chiffres obtenus dans certaines stations d'essai sont de 368 grammes
pour les femelles et de 311 grammes pour les mâles.
— Les lapins légers donnent plus de poil,
comparativement, que les lapins pesants. Le rendement dépend de la surface du
corps plutôt que du poids. Deux lapins de 5 livres chacun donneront plus de
laine qu'un lapin de 10 livres.
— L'âge n'affecte pas la production du poil, une fois
que le lapin est rendu à maturité, soit à l'âge de huit mois.
— La présence de plumets ou touffes de poils au bout
des oreilles est associée à un rendement élevé. Ce caractère est dominant et
donc facile à fixer dans un élevage.
— Un logement confortable, le plancher en treillis et
l'usage de bons râteliers bien droits préviennent les pertes de poils.
E. de JEANAY-CHALENS.
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