e titre de champion est la plus haute récompense qui
puisse être attribuée à un chien ; il ne signifie pas toutefois que le
sujet qui en est titulaire soit le meilleur de sa race. Pour avoir cette
signification, il faudrait qu'il soit le couronnement d'un concours général où
serait distingué par ce titre le meilleur d'entre les meilleurs. Tel n'est pas
le cas, en pratique, ainsi que nous allons le voir, sans que cette constatation
enlève aucun mérite à celui qui a obtenu le titre de champion.
Il y a deux catégories de championnats : le championnat
de beauté, auquel peuvent prétendre les chiens de toutes races, et le
championnat de travail pour les seules races de service (garde et chasse).
Chacun de ces championnats comporte deux degrés : le
championnat national et le championnat international.
Le titre de champion national de beauté est attribué au
chien qui a mérité, au cours d'expositions, trois certificats d'aptitude au
championnat (C. A. C.), avec, au moins, deux juges différents. Pour
les chiens de travail, il faut, en outre, qu'ils aient remporté une récompense
en concours d'utilisation. Le C. A. C. ne peut-être attribué par un
juge qu'à un sujet classé 1er prix en classe ouverte avec le
qualificatif « excellent » ; il ne peut donc être attribué qu'un
seul C. A. C. pour les mâles et un seul pour les femelles dans une
même exposition. Mais le qualificatif « excellent » ne suffit pas,
par lui-même, pour l'attribution du C. A. C. ; il faut, dit le
règlement, que le sujet soit « tout à fait exceptionnel ». Ce point
important, qui a pour objet, en somme, de réserver le championnat aux
prototypes de la race, montre, une fois de plus, que l'esprit des règlements
est meilleur que l'usage ou l'interprétation que l'on en fait parfois. On s'est
ému dernièrement de la facilité avec laquelle certains juges octroient des C. A. C. ;
c'est rendre service à l'élevage que se montrer parcimonieux de cette
récompense qui doit être et rester exceptionnelle. Les exposants mécontents de
ne pas l'obtenir devraient savoir qu'elle sanctionne un sujet d'exception.
Le juge se borne donc à proposer un chien au titre de
champion. C'est la Société centrale canine qui, après homologation et,
notamment, après examen de la régularité de cette attribution, décerne le titre
de champion. Seuls peuvent être promus à ce titre les chiens de race pure
inscrits à un livre d'origine officiellement reconnu. L'enquête implique donc,
a priori, la vérification des origines et l'authenticité du pedigree.
Le titre de champion national de travail est attribué au
chien qui a mérité trois certificats d'aptitude au championnat avec deux juges
différents, dans des concours d'utilisation correspondant à ses fonctions (field-trials
pour chiens de chasse, concours de défense ou de garde pour les chiens de police
et de berger, etc. ...). Il faut, en outre, qu'il ait obtenu dans une
exposition un classement correspondant à l'attribution du qualificatif minimum
« bon ».
Le C. A. C. de travail sanctionne, également, non
seulement un travail excellent, mais de mérite exceptionnel. Comme pour le
championnat de beauté, le C. A. C. de travail ne constitue qu'une
proposition du juge, et c'est la Société centrale canine qui homologue et
décerne le titre, dans les mêmes conditions. La remarque faite ci-dessus pour
le C. A. C. de beauté vaut également pour celui de travail : il
ne doit, ou ne devrait, être décerné que tout à fait exceptionnellement. La
générosité dans cette attribution risque de tromper gravement les éleveurs
recherchant des géniteurs ayant remporté des C. A. C. de travail, si
ce dernier n'a sanctionné qu'une exhibition correcte, sans plus.
Lorsqu'en exposition ou en concours d'utilisation deux
chiens sont d'à peu près égal mérite exceptionnel, le juge peut décerner le C. A. C.
à l'un et la Réserve de C. A. C. à l'autre. La Réserve (qui peut
aussi accompagner un prix, ou même une première mention très honorable)
signifie qu'en cas de disqualification du sujet qui est classé avant, le
titulaire de Réserve prend sa place et sa récompense.
Les règlements d'attribution des championnats internationaux
ont été modifiés par la Fédération cynologique internationale, le 13
septembre 1948.
Ces nouveaux règlements stipulent les conditions suivantes :
A. Pour le championnat international de beauté :
le chien doit avoir obtenu quatre certificats d'aptitude au championnat
international de beauté (C. A. C. I. B.), dans trois pays
différents, sous trois juges différents, s'il s'agit de races non soumises aux
épreuves de travail.
S'il s'agit de races de chasse ou autre utilité, pour
lesquelles des épreuves pratiques sont organisées sous le patronage de la F. C. I.,
ces chiens doivent avoir obtenu :
a. Dans deux pays différents, sous deux juges
différents, deux certificats d'aptitude au championnat international de beauté
(C. A. C. I. B.) ;
b. Un premier, deuxième ou troisième prix (ou réserve
du 2e prix) dans une épreuve internationale de travail où le
certificat d'aptitude au championnat international de travail (C. A. C. I. T.)
est mis en compétition (auparavant, on validait les 4es prix et
réserves de 3es prix). Des modalités particulières sont prévues pour
les épreuves de grande quête réservées aux chiens de races anglaises.
Les C. A. C. I. B. sont mis en
compétition dans certaines expositions seulement, désignées chaque année par la
F. C. I. Il peut en être décerné un seul au plus beau mâle et un seul
à la plus belle femelle, toutes classes réunies, de chaque race, pour autant
qu'ils soient de mérite exceptionnel et âgés de quinze mois au minimum le jour
du jugement.
B. Pour le championnat international de travail
(chien de chasse et utilité pour lesquels des épreuves pratiques sont
organisées) : le chien doit avoir obtenu, à n'importe quel âge,
deux C. A. C. I. T. dans deux pays différents, accompagnant
deux premiers prix d'épreuves de travail dans un concours international
patronné par la F. C. I. Comme pour les C. A. C. I. B.,
les C. A. C. I. T. sont donc réservés à certains concours
désignés chaque année par la F. C. I.
En outre, à l'âge minimum de quinze mois, le chien doit avoir
obtenu, dans une Exposition internationale patronnée par la F. C. I.,
au moins le qualificatif « très bon » ou, dans les pays ignorant
cette qualification, un 2e prix en classe ouverte.
Le règlement spécifie, en outre, que le C. A. C. I. T.
ne pourra être décerné qu'à des chiens montrant au travail un mérite
exceptionnel dans des épreuves de travail ouvertes aux chiens de tout âge,
chiens et chiennes concourant ensemble. Il ne peut être attribué qu'un seul C. A. C. I. T.
par épreuve.
C. Le titre cumulatif de « champion de travail et de
beauté » peut être attribué aux chiens remplissant à la fois les
conditions des deux championnats. Mais ils le recevront, en outre, s'ils ont
remporté dans les conditions ci-dessus deux C. A. C.I. T., dans
deux pays différents, et deux C. A. C. I. B., dans deux
pays différents, sous deux juges différents, à condition que l'ensemble de ces
quatre distinctions internationales ait été remporté dans trois pays
différents.
Bien entendu, les candidats doivent être inscrits à un livre
d'origines reconnu par la F. C. I. ; c'est ce dernier organisme
qui vérifie et homologue les propositions. Les juges, auteurs de ces dernières,
n'ont pas à procéder eux-mêmes à ces vérifications et doivent faire leurs
propositions en se basant uniquement sur le mérite absolu des chiens. Il n'est
pas prévu de « Réserve de C. A. C. international ».
Enfin le titre de champion international ne peut être
décerné par le bureau de la F. C. I. que lorsqu'un délai de un an au
moins s'est écoulé entre les jugements qui ont valu la première et la dernière
distinction donnant droit au titre.
De la complication de ces règlements il résulte que leurs
auteurs ont voulu donner au titre de champion international une valeur tout à
fait exceptionnelle ; ils ne pouvaient aller plus loin. Le but n'est pas,
et ne peut matériellement être, d'attribuer le titre de champion international
au meilleur sujet de la race, mais à ceux d'entre les meilleurs qui remplissent
les conditions exigées. Il peut y avoir plusieurs champions pour une même race.
La nécessité d'obtenir les C. A. C. I. sous
des juges différents, en des pays différents, est une garantie que le titre
sanctionne des mérites exceptionnels ; mais, pour cela aussi, il faut,
évidemment, que les juges ne perdent pas de vue ce caractère exceptionnel du
titre et se montrent avares de leurs propositions.
Il est toutefois regrettable que la restriction, faite par
le règlement, de l'attribution des C. A. C. I. dans les seules
manifestations désignées à cet effet, ait pour conséquence de priver de leurs
chances des chiens aptes à mériter le titre, dont les propriétaires ne peuvent
exposer les frais élevés des déplacements nécessaires.
Dans son esprit, ledit règlement suppose sans doute que
l'annonce de l'attribution possible du C. A. C. I. attirera à la
manifestation désignée tous les sujets susceptibles de briguer cette
récompense. Or, en fait, il n'en est rien. Pour un candidat au C. A. C. I.
qui peut se déplacer à cet effet, il en est de nombreux qui ne peuvent le
faire. Mais le défaut le plus grave de cette organisation réside dans le fait
que si, par hasard, tous les postulants possibles au C. A. C. I.
se trouvaient réunis dans une même compétition désignée pour cette attribution,
un seul d'entre eux, dans chaque sexe, pourrait se voir attribué la
distinction. Cela tient à la formule des concours que nous avons dénoncée dans
un article précédent. Or il résulte des règlements susdits que le championnat
ne sanctionne pas le meilleur sujet, mais prétend sanctionner tous les meilleurs
remplissant certaines conditions d'aptitude. Il faut choisir : examen ou
concours ; nous l'avons dit déjà, seul l'examen répond à l'intérêt de
l'élevage ; le règlement des championnats devrait être assoupli de façon à
permettre l'accès de cette haute distinction à tous les chiens qui la méritent
et de ne pas la réserver à ceux-là seuls dont les propriétaires ont les moyens
de la briguer.
En ce qui concerne le championnat international de travail,
on peut regretter, d'autre part, que l'exigence d'un « mérite exceptionnel »
ne soit sanctionnée par aucune instruction précise ; elle est laissée à
l'entière appréciation du juge ; mais il n'est dit nulle part que tel
travail, qui, dans une compétition ordinaire, mériterait un C. A. C.,
doit, pour mériter un C. A. C. I. T., comporter autre
chose, par exemple telle ou telle performance ou qualité. En fait, le C. A. C. I. T.
est souvent attribué à tout chien ayant mérité un C. A. C. ordinaire,
si la manifestation n'avait pas été désignée pour le titre international. Si
cette façon de faire n'est pas en contradiction avec le règlement, elle
revient, en somme, à sacrer champion international tel chien dont la
supériorité de mérite, par rapport aux titulaires de simples C. A. C.
nationaux, réside dans le fait de s'être prodigué à l'Étranger.
Si c'est bien là l'esprit du championnat international de
travail, on ne peut en conclure qu'il confère à son titulaire une valeur
intrinsèque nettement supérieure à celle du sujet nanti du simple championnat
national.
Jean CASTAING.
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