Accueil  > Années 1950  > N°644 Octobre 1950  > Page 594 Tous droits réservés

Signification des championnats

e titre de champion est la plus haute récompense qui puisse être attribuée à un chien ; il ne signifie pas toutefois que le sujet qui en est titulaire soit le meilleur de sa race. Pour avoir cette signification, il faudrait qu'il soit le couronnement d'un concours général où serait distingué par ce titre le meilleur d'entre les meilleurs. Tel n'est pas le cas, en pratique, ainsi que nous allons le voir, sans que cette constatation enlève aucun mérite à celui qui a obtenu le titre de champion.

Il y a deux catégories de championnats : le championnat de beauté, auquel peuvent prétendre les chiens de toutes races, et le championnat de travail pour les seules races de service (garde et chasse).

Chacun de ces championnats comporte deux degrés : le championnat national et le championnat international.

Le titre de champion national de beauté est attribué au chien qui a mérité, au cours d'expositions, trois certificats d'aptitude au championnat (C. A. C.), avec, au moins, deux juges différents. Pour les chiens de travail, il faut, en outre, qu'ils aient remporté une récompense en concours d'utilisation. Le C. A. C. ne peut-être attribué par un juge qu'à un sujet classé 1er prix en classe ouverte avec le qualificatif « excellent » ; il ne peut donc être attribué qu'un seul C. A. C. pour les mâles et un seul pour les femelles dans une même exposition. Mais le qualificatif « excellent » ne suffit pas, par lui-même, pour l'attribution du C. A. C. ; il faut, dit le règlement, que le sujet soit « tout à fait exceptionnel ». Ce point important, qui a pour objet, en somme, de réserver le championnat aux prototypes de la race, montre, une fois de plus, que l'esprit des règlements est meilleur que l'usage ou l'interprétation que l'on en fait parfois. On s'est ému dernièrement de la facilité avec laquelle certains juges octroient des C. A. C. ; c'est rendre service à l'élevage que se montrer parcimonieux de cette récompense qui doit être et rester exceptionnelle. Les exposants mécontents de ne pas l'obtenir devraient savoir qu'elle sanctionne un sujet d'exception.

Le juge se borne donc à proposer un chien au titre de champion. C'est la Société centrale canine qui, après homologation et, notamment, après examen de la régularité de cette attribution, décerne le titre de champion. Seuls peuvent être promus à ce titre les chiens de race pure inscrits à un livre d'origine officiellement reconnu. L'enquête implique donc, a priori, la vérification des origines et l'authenticité du pedigree.

Le titre de champion national de travail est attribué au chien qui a mérité trois certificats d'aptitude au championnat avec deux juges différents, dans des concours d'utilisation correspondant à ses fonctions (field-trials pour chiens de chasse, concours de défense ou de garde pour les chiens de police et de berger, etc. ...). Il faut, en outre, qu'il ait obtenu dans une exposition un classement correspondant à l'attribution du qualificatif minimum « bon ».

Le C. A. C. de travail sanctionne, également, non seulement un travail excellent, mais de mérite exceptionnel. Comme pour le championnat de beauté, le C. A. C. de travail ne constitue qu'une proposition du juge, et c'est la Société centrale canine qui homologue et décerne le titre, dans les mêmes conditions. La remarque faite ci-dessus pour le C. A. C. de beauté vaut également pour celui de travail : il ne doit, ou ne devrait, être décerné que tout à fait exceptionnellement. La générosité dans cette attribution risque de tromper gravement les éleveurs recherchant des géniteurs ayant remporté des C. A. C. de travail, si ce dernier n'a sanctionné qu'une exhibition correcte, sans plus.

Lorsqu'en exposition ou en concours d'utilisation deux chiens sont d'à peu près égal mérite exceptionnel, le juge peut décerner le C. A. C. à l'un et la Réserve de C. A. C. à l'autre. La Réserve (qui peut aussi accompagner un prix, ou même une première mention très honorable) signifie qu'en cas de disqualification du sujet qui est classé avant, le titulaire de Réserve prend sa place et sa récompense.

Les règlements d'attribution des championnats internationaux ont été modifiés par la Fédération cynologique internationale, le 13 septembre 1948.

Ces nouveaux règlements stipulent les conditions suivantes :

A. Pour le championnat international de beauté : le chien doit avoir obtenu quatre certificats d'aptitude au championnat international de beauté (C. A. C. I. B.), dans trois pays différents, sous trois juges différents, s'il s'agit de races non soumises aux épreuves de travail.

S'il s'agit de races de chasse ou autre utilité, pour lesquelles des épreuves pratiques sont organisées sous le patronage de la F. C. I., ces chiens doivent avoir obtenu :

a. Dans deux pays différents, sous deux juges différents, deux certificats d'aptitude au championnat international de beauté (C. A. C. I. B.) ;

b. Un premier, deuxième ou troisième prix (ou réserve du 2e prix) dans une épreuve internationale de travail où le certificat d'aptitude au championnat international de travail (C. A. C. I. T.) est mis en compétition (auparavant, on validait les 4es prix et réserves de 3es prix). Des modalités particulières sont prévues pour les épreuves de grande quête réservées aux chiens de races anglaises.

Les C. A. C. I. B. sont mis en compétition dans certaines expositions seulement, désignées chaque année par la F. C. I. Il peut en être décerné un seul au plus beau mâle et un seul à la plus belle femelle, toutes classes réunies, de chaque race, pour autant qu'ils soient de mérite exceptionnel et âgés de quinze mois au minimum le jour du jugement.

B. Pour le championnat international de travail (chien de chasse et utilité pour lesquels des épreuves pratiques sont organisées) : le chien doit avoir obtenu, à n'importe quel âge, deux C. A. C. I. T. dans deux pays différents, accompagnant deux premiers prix d'épreuves de travail dans un concours international patronné par la F. C. I. Comme pour les C. A. C. I. B., les C. A. C. I. T. sont donc réservés à certains concours désignés chaque année par la F. C. I.

En outre, à l'âge minimum de quinze mois, le chien doit avoir obtenu, dans une Exposition internationale patronnée par la F. C. I., au moins le qualificatif « très bon » ou, dans les pays ignorant cette qualification, un 2e prix en classe ouverte.

Le règlement spécifie, en outre, que le C. A. C. I. T. ne pourra être décerné qu'à des chiens montrant au travail un mérite exceptionnel dans des épreuves de travail ouvertes aux chiens de tout âge, chiens et chiennes concourant ensemble. Il ne peut être attribué qu'un seul C. A. C. I. T. par épreuve.

C. Le titre cumulatif de « champion de travail et de beauté » peut être attribué aux chiens remplissant à la fois les conditions des deux championnats. Mais ils le recevront, en outre, s'ils ont remporté dans les conditions ci-dessus deux C. A. C.I. T., dans deux pays différents, et deux C. A. C. I. B., dans deux pays différents, sous deux juges différents, à condition que l'ensemble de ces quatre distinctions internationales ait été remporté dans trois pays différents.

Bien entendu, les candidats doivent être inscrits à un livre d'origines reconnu par la F. C. I. ; c'est ce dernier organisme qui vérifie et homologue les propositions. Les juges, auteurs de ces dernières, n'ont pas à procéder eux-mêmes à ces vérifications et doivent faire leurs propositions en se basant uniquement sur le mérite absolu des chiens. Il n'est pas prévu de « Réserve de C. A. C. international ».

Enfin le titre de champion international ne peut être décerné par le bureau de la F. C. I. que lorsqu'un délai de un an au moins s'est écoulé entre les jugements qui ont valu la première et la dernière distinction donnant droit au titre.

De la complication de ces règlements il résulte que leurs auteurs ont voulu donner au titre de champion international une valeur tout à fait exceptionnelle ; ils ne pouvaient aller plus loin. Le but n'est pas, et ne peut matériellement être, d'attribuer le titre de champion international au meilleur sujet de la race, mais à ceux d'entre les meilleurs qui remplissent les conditions exigées. Il peut y avoir plusieurs champions pour une même race.

La nécessité d'obtenir les C. A. C. I. sous des juges différents, en des pays différents, est une garantie que le titre sanctionne des mérites exceptionnels ; mais, pour cela aussi, il faut, évidemment, que les juges ne perdent pas de vue ce caractère exceptionnel du titre et se montrent avares de leurs propositions.

Il est toutefois regrettable que la restriction, faite par le règlement, de l'attribution des C. A. C. I. dans les seules manifestations désignées à cet effet, ait pour conséquence de priver de leurs chances des chiens aptes à mériter le titre, dont les propriétaires ne peuvent exposer les frais élevés des déplacements nécessaires.

Dans son esprit, ledit règlement suppose sans doute que l'annonce de l'attribution possible du C. A. C. I. attirera à la manifestation désignée tous les sujets susceptibles de briguer cette récompense. Or, en fait, il n'en est rien. Pour un candidat au C. A. C. I. qui peut se déplacer à cet effet, il en est de nombreux qui ne peuvent le faire. Mais le défaut le plus grave de cette organisation réside dans le fait que si, par hasard, tous les postulants possibles au C. A. C. I. se trouvaient réunis dans une même compétition désignée pour cette attribution, un seul d'entre eux, dans chaque sexe, pourrait se voir attribué la distinction. Cela tient à la formule des concours que nous avons dénoncée dans un article précédent. Or il résulte des règlements susdits que le championnat ne sanctionne pas le meilleur sujet, mais prétend sanctionner tous les meilleurs remplissant certaines conditions d'aptitude. Il faut choisir : examen ou concours ; nous l'avons dit déjà, seul l'examen répond à l'intérêt de l'élevage ; le règlement des championnats devrait être assoupli de façon à permettre l'accès de cette haute distinction à tous les chiens qui la méritent et de ne pas la réserver à ceux-là seuls dont les propriétaires ont les moyens de la briguer.

En ce qui concerne le championnat international de travail, on peut regretter, d'autre part, que l'exigence d'un « mérite exceptionnel » ne soit sanctionnée par aucune instruction précise ; elle est laissée à l'entière appréciation du juge ; mais il n'est dit nulle part que tel travail, qui, dans une compétition ordinaire, mériterait un C. A. C., doit, pour mériter un C. A. C. I. T., comporter autre chose, par exemple telle ou telle performance ou qualité. En fait, le C. A. C. I. T. est souvent attribué à tout chien ayant mérité un C. A. C. ordinaire, si la manifestation n'avait pas été désignée pour le titre international. Si cette façon de faire n'est pas en contradiction avec le règlement, elle revient, en somme, à sacrer champion international tel chien dont la supériorité de mérite, par rapport aux titulaires de simples C. A. C. nationaux, réside dans le fait de s'être prodigué à l'Étranger.

Si c'est bien là l'esprit du championnat international de travail, on ne peut en conclure qu'il confère à son titulaire une valeur intrinsèque nettement supérieure à celle du sujet nanti du simple championnat national.

Jean CASTAING.

Le Chasseur Français N°644 Octobre 1950 Page 594