J'ai indiqué, dans mes derniers articles, la vogue
extraordinaire dont jouissait actuellement le surf-casting sur les plages
sableuses ; il est bon maintenant de parler du matériel.
La canne sera, en général, constituée par un bambou assez
fort, long de 4m,50 environ ; pour des commodités de transport,
le bambou pourra être en deux parties, mais, le plus souvent, les pêcheurs
locaux utilisent une canne en un seul morceau. Pour choisir cette canne, il
faut étudier sa longueur et sa puissance. Sa longueur va, comme nous l'avons
dit, de 3m,50 à 5 mètres. Toutefois, lorsqu'on lancera d'une jetée,
on pourra se contenter d'une longueur plus courte : 2m,50 à 2m,80
environ. En effet, sur les digues et les jetées, il y a souvent des obstacles à
proximité, et il importe de pouvoir lancer avec le moins de volée possible ;
sur une plage, au contraire, on a derrière soi un grand espace libre et,
devant, des brisants particulièrement violents. Il faut donc lancer au-dessus
de ces brisants et, d'autre part, il faut pouvoir, en tenant la canne
verticale, maintenir la ligne haute et bien dégagée du ressac, ce qui implique
une canne longue.
Donc, je résume : pour la pêche d'une digue ou d'une
jetée : canne de 2m,50 à 2m,80 ; pour la pêche
sur une plage : canne d'au moins 4 mètres et pouvant aller jusqu'à 5
mètres.
Quelle doit être la puissance de la canne ?
Cette puissance ne doit pas être calculée suivant le poids
de poisson qu'elle aura à tirer, mais suivant le poids qu'on aura à lancer. Une
formule simple donnée par Decantelle indique la règle à choisir : « L'effort
subi par une canne lors du lancer est égal à dix fois le poids projeté ;
l'effort subi par une canne lors de la manoeuvre d'un poisson ne dépasse que
rarement le 1/10 du poids de ce poisson. »
En Méditerranée, où la marée est nulle et les courants
faibles, un plomb de 100 à 150 grammes est largement suffisant, de sorte qu'une
canne pouvant supporter sans effort exagéré un poids de 1 kilo à 1kg,500
convient parfaitement.
Sur les côtes de la Manche et de l'Océan, surtout en période
de vives eaux, le courant est assez fort, et, de plus, on doit souvent lancer
contre le vent, le plomb atteint fréquemment 200 et même 250 grammes. Dans ce
cas, il faut que la canne puisse supporter sans effort exagéré un poids de 2kg,500,
et elle peut sortir un poisson de 20 à 25 kilos.
Je ne conseille guère le bambou refendu, non point — et
loin de là — qu'il ne soit bon, mais parce qu'il est cher et que,
travaillant dans des conditions pénibles, on risque de l'abîmer ; d'autre
part, de même que pour le greenhart, il est difficile d'avoir une canne
atteignant les 4m,50 demandés.
Je conseille donc simplement le grand bambou ordinaire, d'un
diamètre de 4 centimètres à la base et d'au moins un centimètre au bout.
Évidemment, cette canne doit être pourvue de viroles et d'anneaux en agate ou
en acier inoxydable ; je ne conseillerai pas les anneaux de porcelaine,
parce qu'ils sont trop fragiles. Enfin, sur les plages sableuses, il est bon de
munir la canne d'un petit piquet pointu en acacia, qui permettra de l'enfoncer
dans le sable.
Il est utile de munir la canne d'un bon moulinet bien fixé ;
toutefois, dans bien des régions, on se contente d'attacher à la canne un
moulinet par une lanière en caoutchouc bien serrée. C'est le moulinet qui sera
la principale dépense du pêcheur ; il ne faut pas hésiter à y mettre le
prix. Sur les jetées de la Manche, et notamment à Boulogne, on emploie encore
le moulinet classique, en contre-plaqué, souvent muni d'un roulement à billes ;
il est excellent mais demande une main expérimentée et est souvent sujet à la
perruque, si on ne commence pas à freiner avec le pouce au moment où le plomb
va toucher l'eau. Mais, en bonnes mains, il permet des lancers magnifiques,
atteignant 50 et 60 mètres.
Le plus simple, mais aussi le plus coûteux, sera de se munir
d'un gros moulinet à tambour fixe. Je signale comme étant les plus pratiques
(réclame non payée) le Luxor-mer, le Rumer et le Robur. Inutile de présenter le
Luxor-mer et le Rumer qui ont, en outre, le gros avantage de pouvoir être
utilisés en rivière pour la pêche à la carpe, au brochet et au saumon. Quant au
Robur, outre son prix moins élevé, il a l'avantage d'être extrêmement rustique
et de permettre le lancer comme un tambour fixe et la récupération comme un
moulinet axial ordinaire, ce qui est plus rationnel ; il a également
l'avantage, de par sa rusticité, de pouvoir tomber dans le sable, sans pour
cela s'enrayer ; mais il ne peut être employé que pour la pêche en mer.
La ligne de mer doit être suffisamment fine, solide et
résister à l'eau de mer. On a longtemps employé le lin et le coton, que l'eau
de mer n'attaque guère ; toutefois, les lignes en lin et en coton exigent
d'être séchées après la pêche, ce qui présente un inconvénient pour le pêcheur
fatigué de son expédition ; aussi, de plus en plus, le nylon est-il
employé.
Il faut enrouler sur le tambour du moulinet 150 mètres de
nylon 50 ou 60 centièmes ; à l'extrémité du nylon sera placé un émerillon
de forte taille ; on fixera à celui-ci le bas de ligne, qui sera en principe
toujours en nylon de même diamètre que celui de la ligne elle-même. Ce bas de
ligne sera en rapport avec la longueur de la canne : long de 2 mètres
environ pour la canne utilisée sur les jetées, il atteindra 3 mètres sur les
cannes de plage. Et pratiquement, pas de fil d'acier, sur lequel les boucles
peuvent être fatales au cours du lancer, sauf dans certains cas de pêche au
squale.
Les avançons seront en nylon, sauf dans quelques cas
particuliers de pêche au squale ou au congre, où l'on pourra employer l'acier
câblé souple.
Pour empêcher les avançons de s'accrocher dans le bas de
ligne, il faudra les monter en potence et les choisir assez courts ; sur
les plages de la Manche, on utilise des clippots, qui sont des petites
baguettes rigides en métal qui se fixent instantanément sur le bas de ligne.
Sur les côtes de l'Océan, le clippot n'est pas employé ; on préfère monter
directement l'avançon sur la ligne.
Quant aux hameçons, ils dépendent, évidemment, du poisson
que l'on veut capturer ; pour les poissons plats, tels que le turbot, la
sole, la plie, on peut utiliser des hameçons à corps minces et de petites
tailles, allant du n°5 au n°000 ; pour les poissons normaux, allant de 1 à
2 kilos, on emploiera des hameçons à allure carrée en acier forgé de 1cm,50
environ ; pour les congres ou les gros poissons, il faut des hameçons de 3
à 4 centimètres en acier et munis d'un émerillon.
Sur les fonds présentant des obstacles rocheux, on emploie
des plombs ronds et plats, sans fil de cuivre ; sur les côtes sableuses,
les plombs pèseront de 200 à 3000 grammes et seront munis de 4 fils de cuivre
souple longs chacun de 8 à 10 centimètres environ et qui serviront à ancrer la
ligne sur le fond meuble.
Passons maintenant aux accessoires. Je n'insisterai pas sur
le sac à pêche. Pour les appâts, je conseille fortement une caissette en bois
ayant 2 ou 3 compartiments, contenant d'un côté les vers, tels que les
arénicoles, de l'autre côté les coquillages, tels que la palourde ou le lavagnon.
Il sera utile, pour la pêche aux squales ou aux gros
poissons, d'être muni d'une gaffe semblable à celle employée pour la pêche au
saumon, et qui servira à harponner le poisson au moment où il commence à
échouer sur le sable.
N'oublions pas, enfin, un bon couteau en acier inoxydable,
avec une lime pour affûter les hameçons ; il ne s'agit pas, en effet, de
fourrer ses doigts dans la bouche d'un petit squale ou de prendre à pleine main
un poisson venimeux.
Pour la pêche des gros poissons en bateau, on pourra,
évidemment, employer une canne courte (1m,50 à 1m,80) en
bambou refendu ; cette canne peut servir pour la pêche du petit thon ou du
congre ; comme elle ne sert pas au lancer, elle peut être munie, à la
place de l'anneau de tête, d'une petite poulie, afin de diminuer l'usure de la
ligne.
LARTIGUE.
|