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La culture du poireau

Ce légume condimentaire, très recherché par nos ménagères, est fort anciennement cultivé : c'est une plante vivace, originaire du Midi de l'Europe, très rustique, faisant partie de la famille des liliacées et se distinguant par son bulbe arqué, quelque peu oblong, à odeur forte et à la saveur acre.

Le poireau croît dans tous les climats et même dans tous les sols, et, pour sa culture, il préfère une terre meuble, profonde et anciennement fumée. En l'absence de fumure, on préparera une fumure chimique, à laquelle ce légume est très sensible : avant la plantation, on enfouira dans le sol : superphosphate de chaux, 5 kilogrammes ; chlorure de potassium, 2 kilogrammes, et on répandra en deux fois (au repiquage et un bon mois après) environ 4 à 5 kilogrammes de nitrate de soude. Un binage suivra.

On a remarqué que les engrais liquides, le marc de raisin sont très profitables au poireau.

Les variétés les plus cultivées sont ainsi classées par saison :

— hâtif, bon pour l'été : poireau gros court d'été, poireau gros du Midi, poireau monstrueux d'Elbeuf ;

— rustique, pour l'hiver : poireau très gros de Rouen, poireau monstrueux de Carentan, poireau long de Mézières ;

— tardif, très rustique : poireau de Liège, poireau de Gennevilliers ;

— pour toutes saisons : poireau géant de Verrières.

Pour avoir des produits à peu près toute l'année, voici comment procéder :

1° On repiquera les plants qui ont été semés en pépinière en mars dès qu'ils auront la grosseur d'un tuyau de plume.

2° En juillet et août, on sèmera le poireau long d'hiver de Mézières, que l'on repiquera avant les grands froids pour récolter vers le mois de mai : ainsi la soudure sera assurée.

Repiquage du poireau permettant d'obtenir de gros produits.

— 1° Le repiquage classique a lieu environ deux mois après 1er semis ; déplanter lorsque le poireau a atteint la grosseur d'un crayon, opérer avec précaution, couper l'extrémité des feuilles et la moitié des racines ; repiquer, dans une planche ameublie, à 25 centimètres sur 13 environ, au plantoir, dans des rayons de 5 à 6 centimètres de profondeur. Borner et arroser copieusement au goulot. Cette eau entraînera la terre, les rayons seront ainsi comblés et une partie du poireau sera mieux enterrée. Au bout d'une dizaine de jours, les plants sont vigoureusement repris et le ver les attaque difficilement.
Certains repiquent aussi en quinconce, en espaçant de 15 centimètres dans tous les sens.
Mais, dans tous les cas, ne pas craindre d'enterrer assez profondément le replant, à 0m,12, environ, afin d'obtenir, lors de la récolte, une belle et longue partie blanche.

— 2° Un procédé particulier, qui donne des produits d'exceptionnelle grosseur, est le suivant : se procurer les plants, les abandonner plusieurs jours sur le terrain au soleil (en cas de pluie, les abriter) et ne pas craindre le dessèchement Repiquez alors comme il a été dit ci-dessus et la reprise se fera avec vigueur et on sera émerveillé de la méthode.

Comment obtenir des produits sains.

— Le poireau est d'abord sujet à la maladie de la rouille : elle cause des ravages sérieux, surtout lorsque la plantation est d'importance. On pulvérisera une bouillie cuprique sur le feuillage quand il est jeune. Ne pas hésiter à arracher les pieds atteints.

Mais l'ennemi le plus fréquent et le plus redoutable est la teigne, ou ver du poireau. Ce petit papillon pond sur les feuilles et engendre de nombreuses petites larves blanchâtres, qui creusent des galeries en descendant jusque dans le cœur et jusqu'au collet des racines. Tous les pieds atteints périssent.

On luttera contre le ver du poireau :

Par un traitement préventif : lors du repiquage, on trempera les jeunes plants dans une solution de pyrèthre, ou de « sternol » du commerce, ou dans une solution de 50 grammes de savon noir par litre d'eau, mais les racines n'entreront pas en contact avec ce liquide.

Traitement curatif : il se fait à l’aide d'une solution de pyrèthre que l'on peut aisément fabriquer soi-même : dissoudre 50 grammes de savon de Marseille par litre d'eau et ajouter 50 grammes de poudre de pyrèthre, inoffensive pour les humains et les animaux. Cette solution n'est pas corrosive, mais elle tue instantanément les larves et laisse sur les feuilles des poireaux un enduite collant dont l'odeur éloigne les papillons.

Enfin, si le mal est déclaré, ce qui se reconnaît à ce que la planche est languissante, on coupera immédiatement les tiges au niveau du sol, on brûlera les feuilles avec leurs larves. Biner ensuite et arroser à l'engrais liquide : une eau purinée au 1/10e qui agira simultanément comme insecticide et stimulant végétatif.

Note importante.

— Dans le cas où on se serait aperçu trop tardivement de cet envahissement, il sera procédé à l'incinération de tous les plants atteints et à la désinfection du sol ainsi rendu nu à l'aide du sulfure de carbone (2 kilogrammes à l'are) ou bien au cyanure de calcium granulé (1 kilogramme par ligne de 100 mètres).

Récolte et conservation de ce légume sont des plus simples.

— Plus les poireaux seront jeunes, plus ils seront savoureux ; ne pas les récolter trop gros, les blanchir par buttage. Pour conserver ce légume très rustique, le laisser, en place sec ; dès fin novembre, le mettre en jauge, ce qui abritera en cas de mauvais temps ou facilitera l'arrachage pour la consommation échelonnée.

A. B.

Le Chasseur Français N°645 Novembre 1950 Page 675