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Les pins indigènes

Essences de reboisement

Les pins se distinguent très facilement des sapins par leurs aiguilles longues insérées par groupes de deux, trois ou cinq sur de petits rameaux courts. De plus, les cônes coriaces, ligneux, sont caractérisés par un « écusson » losangique très net fréquemment terminé par une petite pointe.

Les pins se distinguent également des sapins par leurs exigences écologiques : d'abord ce sont des essences de pleine lumière, parfaitement aptes au premier boisement d'un terrain nu. Ensuite, ce sont des essences toujours très frugales, s'accommodant des sols les plus pauvres. Enfin tous les pins résistent aux gelées de printemps, même ceux qui, comme le pin maritime, sont sensibles au froid d'hiver. Ces qualités en font des essences particulièrement précieuses pour le reboisement.

La culture des pins présente certaines particularités : le semis direct réussit en général bien, notamment pour le pin maritime. En pépinière, il est nécessaire de prendre des précautions contre la fonte des semis. Si l'on procède par plantation, les plants, repiqués à un an, doivent toujours être utilisés jeunes, deux ans, trois ans au maximum. Les plants âgés sont toujours de reprise particulièrement difficile.

On peut diviser les pins utilisés pour le reboisement en deux grands groupes d'après leur aire naturelle.

1° Les pins indigènes dans la France continentale comprennent : les pins sylvestres, le pin maritime, le pin à crochets, le pin d'Alep. Tous ces pins sont caractérisés par leurs feuilles groupées par deux (pins à deux feuilles) ;

2° Les pins que nous considérons comme essences introduites : le groupe des Laricios, à deux feuilles, comprend deux espèces principales : le pin noir d'Autriche et le pin Laricio de Corse.

Le pin Weymouth à cinq feuilles ;

Le pin de Monterey ou pin remarquable à trois feuilles.

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Nous consacrerons le présent article au premier groupe, réservant le second groupe pour un prochain article.

Les pins sylvestres (Pinus sylvestris).

C'est à dessein que nous employons le pluriel, car il existe de nombreuses races, de valeur et d'exigences écologiques très différentes : pour un reboisement, il est essentiel de choisir une race appropriée et de se préoccuper de l'origine des graines utilisées.

On distingue deux grands groupes de pins sylvestres, un groupe de races nobles, de très belle forme, mais de croissance assez lente : ces races comprennent les races nordiques (pin de Riga) et les races des Vosges. En France, elles sont indiquées pour les reboisements à effectuer en montagne ; la cime est aiguë, le tronc droit, élancé et parfaitement élagué. Ces races fournissent un bois de sciage de première qualité.

À côté de ces races nobles existent des races de plaine, à croissance plus rapide, mais beaucoup plus branchues, à tronc parfois flexueux. Ces races fournissent un bois noueux qui ne donne qu'un sciage de qualité médiocre. Les individus les plus droits peuvent être utilisés, après injection au sulfate de cuivre, comme poteaux télégraphiques. La seule bonne race de plaine de reboisement, à tronc droit, est la race de Haguenau utilisable dans toute la France, sauf en montagne, les cimes trop larges ne résistant pas à la neige. Toutes les autres origines (Darmstadt, montagnes méridionales) doivent être proscrites.

Les pins sylvestres sont facilement reconnaissables à leurs troncs rouges à la partie supérieure, à leurs aiguilles aplaties, glauques, vrillées sur elles-mêmes ; ils peuvent être employés dans les sols les plus médiocres, drainés ou non, sauf les sols calcaires qui leur conviennent mal. On peut avoir recours au semis direct sur sol préalablement labouré ou à la plantation à l'aide de plants de deux ou trois ans repiqués.

Le pin maritime (Pinus pinaster).

C'est la grande essence de mise en valeur des Landes de Gascogne trop connue pour qu'il soit nécessaire d'insister ici ; on reconnaît le pin maritime à ses aiguilles longues, très rigides, à ses très gros cônes, à son écorce profondément crevassée. Il en existe deux variétés : celle des Landes, à fût plus ou moins flexueux, et celle de Provence, à fût plus droit, à cime plus dense, mais plus exigeante en chaleur. Le pin maritime craint les froids d'hiver; il ne résiste pas, surtout à l'état jeune, aux gelées de -20° à -25° ; pour cette raison, on ne peut l'employer qu'au sud de la Loire, sauf dans les provinces de l'Ouest (sud de la Bretagne, Maine, Anjou), où les fortes gelées sont moins à craindre. C'est un calcifuge strict à n'utiliser que sur les sols siliceux dépourvus de calcaire assimilable (Landes).

Signalons que sa rapidité de croissance est nettement supérieure à celle du pin sylvestre, et son bois, de meilleure qualité que celui des sylvestres de plaine, est propre à de multiples usages ; dans les régions à climat chaud et lumineux, il peut être gemmé.

L'installation se fait, en général, par semis direct, après culture du sol par bandes, ce qui rend son emploi particulièrement économique.

Le pin à crochets (Pinus montana uncinata).

Il ne faut pas le confondre avec les pins rampants et nains, originaires de l'Europe centrale, utilisables seulement pour la fixation des sols instables (dunes). Il se reconnaît à l'écusson saillant « en crochet » des écailles du cône.

Le pin à crochets n'est intéressant, par suite de la lenteur de sa croissance, que dans certaines stations très défavorables. En effet, cette essence, très frugale, très résistante au froid, vit aux dépens de l'azote atmosphérique, grâce à l'association de ses racines avec certains champignons fixateurs d'azote. Elle améliore ainsi le sol, mais ne doit être utilisée que dans les stations les plus déshéritées (landes très acides, tourbières) et en haute montagne, seule ou en mélange avec l'Épicéa.

Le pin d'Alep (Pinus halepensis).

Excellente essence de mise en valeur des garrigues méditerranéennes en sol calcaire. Elle ne peut être utilisée ailleurs, car elle gèle à -10°.

Conclusion.

— Malgré leurs avantages, leur frugalité, la facilité de leur installation, les pins présentent, s'ils sont employés seuls, un inconvénient grave : essences de lumière, ils ne suppriment pas le sous-bois (en particulier, les espèces de la lande), car leur couvert est trop clair ; ils donnent naissance à des peuplements très combustibles et ils dégradent le sol par leur humus très acide. Il est donc indispensable de les utiliser en mélange avec des feuillus (Chêne rouge, Châtaignier, Aunes), ce qui améliore le sol et augmente considérablement la résistance du peuplement à l'incendie.

LE FORESTIER.

Le Chasseur Français N°645 Novembre 1950 Page 680