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Textiles africains

La ramie

La ramie est une plante textile employée déjà dans les temps les plus reculés. Les Égyptiens l'utilisaient dans la préparation de leurs momies. C'est une plante originaire des Indes. Elle est quatre fois plus résistante que le lin et huit fois plus que le coton. La fibre de ramie se prête à tous les procédés de filature et de tissage. On peut en faire des cordages, des drisses, du fil, des tissus, des tapis et des tuyaux. Des chemises de travail, des draps, des costumes d'été, des tissus d'ameublement, et même des filets de pêche. La ramie est brillante comme la soie, se lave comme le coton, ne se rétrécit pas au lavage, et sa résistance dépasse même celle du nylon.

Or la ramie, quoique étant une plante tropicale, pousse fort bien dans le Sud marocain, où la Compagnie chérifienne des textiles a entrepris des essais sur une propriété de 100 hectares située entre Taroudant et Agadir, non loin des Ouled-Theïma. Toutefois cette plante a besoin de certaines techniques de culture qui n'ont pas été respectées, et il s'en est suivi quelques désillusions dues à certaines incompétences en matière d'exploitation d'agriculture coloniale, comme c'est souvent le cas.

On aurait obtenu, sur une parcelle de 25 hectares, un rendement d'une tonne et demie à deux tonnes à l'hectare. Alors qu'en Amérique on ne fait que trois récoltes dans l'année, dans le Sud marocain on peut en obtenir quatre on cinq.

La ramie se plante sous forme de rhizomes et elle reste vivace durant dix ans. Elle est assez exigeante en irrigation, puisqu'il faut environ 12.000 et 14.000 litres d'eau par hectare, et elle ne s'accommode pas d'une eau salée. C'est précisément cette question de nature et de quantité d'eau qui est à l'origine des désappointements dus à cette culture dans le Sud marocain. Ainsi, une eau chargée de 200 milligrammes de chlorure provoque la destruction de la plante.

En dépit de ces exigences, on pourrait obtenir — soit au Maroc, soit en Mauritanie, soit dans d'autres colonies françaises d'Afrique — de la ramie produite à un prix équivalent au jute d'importation. On la traite en vert et on oriente les cultures dans ce sens ; c'est la méthode employée en Amérique.

Les U. S. A. ont 3.000 hectares en Louisiane et 4.000 hectares en Floride ; ils se disposent à en complanter 4.000.000 dans les États voisins du golfe du Mexique.

La ferme expérimentale de la Compagnie chérifienne des textiles expérimente en même temps le chanvre. Mais le chanvre produit au Maroc est grossier, et son prix est trop élevé. La fibre de lin y est trop courte. C'est pourquoi on s'oriente sur la culture de la ramie, qu'on voudrait entreprendre sur des milliers d'hectares.

En raison du statut juridique du Protectorat français au Maroc, il serait préférable d'envisager toutes ces cultures à l'embouchure du Sénégal.

A. GÉROMIMI DE SAINT-PÈRE.

Le Chasseur Français N°645 Novembre 1950 Page 694