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Courrier cynégétique

Un vœu.

— L'Association des chasseurs de Luchapt (Vienne), réunie en assemblée générale pour 1950, considère que, dans l'état actuel des choses, la bonne marche des associations communales est un des moyens les plus puissants de restaurer la chasse, restauration dont la France a le plus grand besoin, mais que jusqu'à présent l’État ne leur apporte aucune aide, particulièrement du coté financier sans lequel rien de sérieux ne saurait être entrepris.

Elle considère qu'il serait pourtant facile à l'État de les aider puissamment sans qu'il lui en coûte rien. En effet, les sommes recueillies sur les permis départementaux à 1.000 francs sont ainsi réparties :

    400 sont affectés à l'État, qui se taille ainsi la part du lion ;
    300 à la commune où a été délivré le permis ;
    240 à la Fédération départementale de chasse ;
    60 au Conseil supérieur de la chasse.

Il n'y a donc, sur 1.000 francs payés par nous, que 300 seulement qui soient affectés au service de notre sport cynégétique. L'Association estime que les sommes de plus en plus lourdes versées par les chasseurs ne sont pas faites pour alimenter tel ou tel budget particulier qui n'a rien à voir avec la chasse, mais bien pour améliorer les conditions où celle-ci se pratique. Elle estime que si, à l'époque lointaine où les principes de cette répartition ont été adoptés, il était concevable de faire bénéficier les communes d'une part des sommes versées par leurs citoyens, puisque les Associations communales n'existaient pas encore, il en est tout autrement aujourd'hui, où il y a de moins en moins de communales rurales qui n'aient leur association.

En conséquence, les chasseurs de Luchapt émettent à l'unanimité le vœu que, partout où existe une telle association, la ristourne des 300 francs lui soit faite, et non plus au budget municipal. Là où n'existerait pas d'association (ce qui est de plus en plus rare en dehors des villes), les sommes recueillies par l'État formeraient une masse d'ensemble à répartir ensuite entre toutes les associations existantes, au prorata du nombre de leurs sociétaires. Ainsi seraient sauvegardés les intérêts des chasseurs urbains qui se trouveraient bénéficier indirectement de cette disposition, puisque c'est dans les communes rurales qu'ils exercent leur sport.

L'Association communale de Luchapt souhaite que cette mesure soit incluse dans les dispositions de la loi en préparation et comptent sur l'action des parlementaires de la Vienne et l'appui de la grande presse cynégétique pour faire aboutir ce vœu.

Le Président : Albert GANEVAL.

Un délit de Chasse peut coûter cher.

— Pour délit de chasse au phare, à l'aide d'un tracteur agricole, le sieur H ..., cultivateur à Escamps, s'est vu condamner le 22 août 1950, par le tribunal correctionnel d'Auxerre, aux peines ci-après : un mois de prison avec sursis ; 40.000 francs d'amende sans sursis ; confiscation du fusil pour 15.000 francs et du tracteur pour 150.000 francs ; permis général, interdiction de chasse durant cinq ans et 25.000 francs de dommages-intérêts à la Fédération des Chasseurs, partie civile.

Tous les chasseurs de France, et ceux de l'Yonne en particulier, ne peuvent qu'applaudir à ces sanctions et souhaiter que tous les tribunaux de répression s'inspirent d'un tel exemple.

(Communiqué par la Fédération départementale des Chasseurs de l'Yonne.)

Hérissons « culottés».

— Mon voisin, M. Cesbron, de la vallée de Rochefort, possède une chienne qui mit bas récemment ; on ne lui laissa qu'un seul chiot. Dans la nuit du 4 au 5 août, M. Cesbron fut réveillé par les abois de la chienne qui couche à l'écurie ; voulant se rendre compte du motif de cette alerte, M. Cesbron se rendit à l'écurie ; il aperçut un gros hérisson qui traînait le jeune chiot ; le visiteur indésirable fut aussitôt occis ; mais le surlendemain, dans la matinée, nouvelle alerte : c'était un deuxième hérisson qui faisait à son tour un « coup de main » sur le chiot. Il subit le sort du premier.

Jusqu'ici, j'avais bien vu des hérissons s'attaquer aux poussins, mais aller chercher un petit chien dans les pattes de sa mère est assurément moins banal !

L. BRAULT, Rochefort-sur-Loire.

Une ancêtre des carabines à répétition.

— Dans un récent article, M. Pierre Mélon nous entretenait agréablement d'une carabine suisse à deux coups dans le même canon. Cette arme n'est pas unique dans son principe. On peut voir au Musée de la Tour de Londres une arme dont l'étiquette porte cette inscription : « Carabine à chien et à capsule tirant quatre charges superposées par le moyen d'une platine à glissière, invention breveté du sieur Risto, canon gravé ». Sur ce canon, on peut lire : « Cap. Risto Pat. W. Mills Maker, 120 High Holborn London ». Cette arme date d'environ 1830. Le calibre semble être à peu près 10 millimètres. Elle diffère de celle utilisée par M. Mélon en ce qu'il n'y a qu'une platine, avec un seul ressort et un chien ; cette platine coulisse sur une glissière de bronze, avec deux crans intermédiaires la bloquant de façon à percuter successivement les quatre cheminées. Je n'ai rien pu savoir du chargement, mais il doit rappeler celui décrit par M. Melon, la chambre, cependant, étant cylindrique de bout en bout. Cette arme semble avoir passablement servi.

R. CREEL, abonné, Ussel (Corrèze).

Pigeon voyageur bagué et faucon.

— Le 29 mai, le jeune Marcel Brugier, surveillant un nid de rapaces sur mon domaine de la Cygne, a blessé un des parents qui a pu s'enfuir. Il apportait aux petits un pigeon voyageur fraîchement tué. Bague aluminium I 48, France 10993. Bague caoutchouc rouge 860.

Le nid contenait deux jeunes. Il ne s'agit ni de buses ni de busards, ni d'autours, ni de hobereaux, ces derniers trop petits pour charrier en plein vol un pigeon. D'après correspondance avec M. Abel Boyer, secrétaire général de la Société nationale de fauconnerie, il pourrait s'agir, sans certitude, soit de faucons pèlerins, soit de faucons laniers, l'un et l'autre très rares en France.

Albert GANEVAL, Luchapt (Vienne).

Quand la perdrix chasse le chien.

— Un de mes amis, cultivateur, relevant les sarments de sa vigne pour les attacher, a été témoin du fait suivant : son chien, un basset, qui l'accompagnait, prospectait tous les coins de la vigne. Tout à coup, il vint vivement se réfugier, la queue basse, dans les jambes de son maître, poursuivi par une perdrix rouge, plumes hérissées et ailes écartées. Elle ne fit demi-tour qu'à deux mètres de mon ami et s'éloigna en surveillant du coin de l'œil l'homme et le chien.

L'explication de cette scène fut rapidement trouvée : à quelques dizaines de mètres de là, la perdrix, avait une nichés de petits à peine éclos.

Nous sommes habitués à voir une poule couveuse sauter au nez d'un chien et le poursuivre, mais ce geste est vraiment étonnant de la part d'une perdrix.

C. BROSSARD, abonné, Mervent (Vendée).

N. D. L. R. — Geste moins étonnant que ne le suppose notre abonné, car M. Fraillon, apiculteur à Pouilly-sur-Serre, nous signale un incident identique survenu à son chien, de taille moyenne.

Le renard manifeste-t-il sa douleur ?

— Abonné au Chasseur Français depuis 1896 j'ai lu maintes histoires de chasse où il était question de « cris d'un renard blessé ».

Or je suis à mon quarante-sixième- permis, j'ai été un passionné de la destruction des nuisibles, et, de ma vie, je n'ai entendu crier un renard blessé. Mes observations s'étendent sur une durée de cinquante années, et je relève dans mes notes les constatations suivantes :

... Goupil, forcé par deux courants (corniauds), est coiffé par ses poursuivants ; j'assiste à un véritable écartèlement de la bête : pas un cri.

... L'an dernier, un coup de fusil brise les reins d'un renard qui se traîne devant les chasseurs, mais pas le moindre gémissement. Vers la même époque, je blesse un renard qui, après force cabrioles, s'enfuit, traverse une cour de ferme, où il est achevé par la maîtresse du logis, à coups de barre de fer : pas un cri.

... En juillet 1923, à 4 heures du matin, chassant au grand duc à l'orée d'un bois, le tintamarre des pies attire un renard qui se présente sous bois à ma droite. Je lui lance un coup de fusil ; la bête agonise dans le fourré sans une plainte, qui aurait attesté la valeur de mon coup de feu.

... par temps de neige, je découvre au bois une trace suspecte qui me conduit à un renard traînant un piège. Une poursuite mouvementée doit raviver la douleur ; cependant, pas un cri.

... dans les déterrages, j'ai souvent capturé les bêtes vivantes par un « chignonnage à la main » ; jamais un cri, jamais un aboi de la bête capturée.

Mais écoutez encore ce que Ronsard écrivait en 1560, en parlant d'une chasse seigneuriale :

« Au lieu d'un cervier (loup) ce fut un maslin fourré (renard) qui s'adonna, et ceste beste ne crisait point en ce faisant escharper par les mastins. »

Que conclure ? Le renard aurait-il une sensibilité différente de celle du chien ou du loup ? Il semble qu'une solution de continuité du système nerveux l'empêche d'extérioriser sa douleur. Qui nous donnera une explication plausible ?

G. FOUCAULT.

Le Chasseur Français N°646 Décembre 1950 Page 718