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Les engrais humiques

La fertilisation des sols a été, pendant des siècles, maintenue par l'emploi exclusif des engrais organiques. L'utilisation du fumier remonte aux temps les plus reculés.

Au cours du siècle dernier, le rôle des matières organiques a été mis en doute, la théorie nouvelle supposait que l'alimentation des végétaux étant assurée exclusivement avec des substances minérales, la présence de matières organiques dans le sol était inutile.

Les travaux de Dumont et de nombreux autres agronomes ont démontré qu'en raison de leur rôle sur les propriétés physiques, chimiques et biologiques des sols les matières organiques ne pouvaient disparaître de ceux-ci sans provoquer une diminution de la production et même entraîner à la longue la stérilité.

Les engrais humiques doivent donc figurer dans la fumure. Les principaux engrais humiques sont les différents fumiers et les composts.

Fumiers.

— Le fumier est constitué par des matières organiques (paille, feuilles, etc. ...) qui, soumises à une température élevée, due à la fermentation de la masse, se transforment en humus.

On distingue deux sortes de fumiers : les fumiers naturels, formés par les déjections animales mêlées à la litière, et le fumier artificiel, obtenu en provoquant la fermentation de la paille après addition de sels minéraux.

La composition et les propriétés des fumiers naturels diffèrent suivant leur origine. Le fumier de cheval est plus sec et plus chaud que celui des bovins. Le fumier de volailles et de lapins est très chaud et à décomposition rapide.

Quant au fumier artificiel, il est obtenu par fermentation de la paille. On dispose à cet effet un lit de paille de 0m,60 à 0m,80 d'épaisseur sur une surface plane. Un fort arrosage est ensuite donné.

On utilise, en moyenne, 2.400 litres d'eau par tonne de paille. La répartition de l'eau gagne à être faite en trois fois, matin, midi et le soir.

La mouillure terminée, on apporte en surface un lit de fumier naturel ou de fumier artificiel déjà préparé ; on épand ensuite le mélange nutritif qu'on fait pénétrer dans la masse par un léger arrosage. Au bout de trois à quatre jours, la fermentation est déclarée et la température peut atteindre en certains points 40 à 50°.

Lorsqu'elle est uniforme dans toute l'étendue du tas, on tasse la paille en piétinant, on arrose de nouveau copieusement.

Trois ou quatre jours plus tard, on effectue un nouveau chargement de paille d'égale épaisseur, et on répète les opérations précédentes à l'exclusion de fumier. Quatre à cinq chargements successifs peuvent ainsi être effectués.

Parmi les mélanges nutritifs utilisés, la formule suivante est souvent employée :

Sulfate d'ammoniaque 30 kg.
Phosphate bicalcique 30 ==
Sulfate de potasse 20 ==

Vingt kilogrammes de ce mélange sont nécessaires pour traiter une tonne de paille.

Le fumier artificiel a les mêmes emplois que le fumier naturel.

Dans la pratique courante, des apports de 300 à 400 kilogrammes de fumier à l'are avec fumure minérale complémentaire peuvent être considérés comme suffisants.

Composts.

— Tous les déchets organiques peuvent, par la décomposition, donner naissance à des matières fertilisantes riches en humus. Ces résidus doivent être soigneusement mélangés, puis humidifiés ; la quantité d'eau à utiliser en la circonstance doit être limitée par la nécessité de laisser pénétrer l'air dans la masse en décomposition.

Pour éviter l'acidification du milieu, ce qui aurait pour effet de neutraliser l'action des microbes humificateurs, on mélange les matériaux avec une bonne terre argileuse dans la proportion de 2 à 3 kilogrammes de terre par mètre cube. L'utilisation d'un engrais azoté est indispensable pour obtenir une parfaite humification. La dose moyenne sera de 2 à 3 kilogrammes de sulfate d'ammoniaque par mètre cube.

L'épaisseur du tas de compost ne doit pas excéder 0m,50 à 0m,60 pour permettre la pénétration de l'air dans toutes les parties. En outre, il y aura lieu, au début de la préparation, d'ensemencer le compost par l'addition de 20 à 30 kilogrammes de fumier ou de compost ancien par mètre cube. Il sera également nécessaire, durant la période de fermentation, de pratiquer deux ou trois retournements afin de faciliter l'aération. À la suite de chacun de ces remaniements, un arrosage devra être donné.

Un compost ainsi traité peut être utilisé au bout de trois à quatre mois.

La dose à employer est de 200 à 300 kilogrammes à l'are. Comme les fumiers, les composts doivent être surtout envisagés comme amendements humiques. Leur action fertilisante doit être complétée par l'apport d'une fumure minérale.

A. GOUMY,

Ingénieur horticole.

Le Chasseur Français N°646 Décembre 1950 Page 736