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Le traitement d'hiver des arbres fruitiers

Pendant la période de repos hivernal, les arbres n'ont plus d'organes sensibles comme pendant la belle saison. Aussi est-il possible d'utiliser, pour les nettoyer, des solutions beaucoup plus concentrées qu'on ne saurait le faire au cours de la période de végétation.

Il est d'autant plus indiqué de traiter les arbres pendant l'hiver qu'à cette époque, les travaux du jardin subissent forcément un ralentissement très net, donnant au jardinier avisé le répit nécessaire pour bien faire ce travail.

Ce n'est d'ailleurs pas du temps perdu ; ainsi qu'on l'a constaté ces temps derniers, les arbres rapportent en proportion des soins qu'on veut bien leur donner et la production des arbres mal soignés devient de plus en plus insignifiante.

But du traitement d'hiver.

— D'abord, de brûler les mousses et les lichens qui, se développant sur les troncs et les principales branches, entravent les fonctions de respiration en partie dévolues aux écorces, puis gagnent les petits rameaux, en paralysant complètement la végétation.

Ensuite, de détruire les larves ou les œufs d'un certain nombre d'insectes nuisibles aux arbres, et même aussi quelques insectes parfaits qui s'abritent, pendant l'hiver, sous ces mousses et sous ces lichens ainsi que dans les anfractuosités des écorces.

Et, enfin, de chercher à agir contre les organes de reproduction de certains champignons, notamment le Clasterosporium, qui cause la maladie criblée des feuilles des arbres à fruit à noyau, et les Fusicladium, qui provoquent la tavelure des fruits à pépins. Mais en ce qui concerne, tout au moins, cette dernière maladie, le traitement d'hiver ne semble être qu'accessoire, les traitements de printemps et d'été restant les traitements principaux.

Précautions à prendre avant de traiter.

— Autant que possible faire, au préalable, la toilette des arbres. Cette toilette comprend :

    1° L'enlèvement du bois mort.

    2° La suppression des branches en surnombre dans les têtes, qui empêchent l'air et la lumière d'y pénétrer. Il faut faire des coupes nettes, à l'aide de la serpe plutôt qu'avec la scie.
    Si l'on emploie ce dernier instrument, avoir bien soin de rafraîchir ensuite les plaies avec la serpe.

    3° L'enlèvement des nids de chenilles apparents sur les arbres et sur les haies voisines, en prenant la précaution de les brûler immédiatement.

    4° Le grattage des vieilles écorces et des parties de troncs où la mousse, très épaisse, ne pourrait être qu'en partie brûlée par les solutions utilisées pour les traitements.

    5° La taille, s'il s'agit d'arbres habituellement soumis à cette opération. Mais, si le temps est favorable au traitement, il est préférable de traiter avant de tailler.

Formules les plus usuelles de traitement d'hiver.

— Suivant les parasites à combattre, l'outillage que l'on possède, le temps dont on dispose, on pourra s'adresser à l'une ou à l'autre des formules ci-après, qui, toutes, ont des avantages et des inconvénients, mais sont cependant efficaces.

a. Bouillie au permanganate de potasse.

    Eau 100 litres.

    Permanganate de potasse agricole 300 à 600 grammes.

    Chaux 3 kilogrammes.

    Faire dissoudre le permanganate dans un peu d'eau très chaude. Préparer le lait de chaux et y verser la solution de permanganate en remuant constamment, puis compléter à 100 litres.

    Cette bouillie s'emploie au pulvérisateur. Elle n'endommage pas les appareils qu’il convient cependant de rincer à la fin du traitement. Son prix de revient est assez modique, son efficacité parfaite pour la destruction des mousses et des lichens. Quand ces parasites existent en grande abondance, il convient d'employer la dose maximum de permanganate.

b. Solution de sulfate de fer.

    Eau 100 litres.

    Sulfate de fer 20 à 25 kilogrammes.

    Préparation très facile. Appliquer au pinceau si l'on n'a pas de grandes quantités d'arbres à traiter, avec un pulvérisateur plombé dans le cas contraire.

    Prix de revient peu élevé. Efficace contre mousses et lichens, mais fort peu insecticide.

c. Solution de formol.

    Eau 100 litres.

    Formol Codex à 30 p. 100 2 kilogrammes.

    Préparation instantanée. Grande facilité d'emploi au pulvérisateur. Prix de revient comparable à celui du sulfate de fer. Grande efficacité contre mousses et lichens, faible contre les insectes.

    Mais difficulté de contrôler l'exécution du traitement sur les arbres, la solution de formol étant incolore et n'agissant qu'à la longue. Se réserver, en conséquence, la possibilité de faire un second traitement, en effectuant le premier de bonne heure.

d. Lait de chaux.

    Eau 100 litres.

    Chaux en pierre 20 kilogrammes.

    Éteindre la chaux en versant l'eau goutte à goutte et ajouter ensuite la quantité d'eau nécessaire.

    À appliquer au pinceau, parfois au pulvérisateur, après grattage des écorces.

    Prix de revient peu élevé ; efficacité relative. Traitement de plus en plus délaissé actuellement.

    En tout cas, ne jamais faire un traitement mixte avec de la chaux et du sulfate de fer, chacun des deux produits annulant l’action de l'autre.

e. Solution dans l'eau d’une huile d'anthracène émulsionnée ou encore d'une huile blanche (Wolck-antilichen ou autre).

    Dosage variable selon le produit, indiqué par le fabricant. Préparation rapide. Grande facilité d'emploi. Grande efficacité contre mousses, lichens et insectes, y compris les cochenilles et kermès, mais prix de revient sensiblement plus élevé que celui des traitements précédents.

f. Solution d'un produit du commerce à base de colorants organiques (Elgétol, Ivernol, Isosartrol, etc.).

    Dosage variable, en général 1 kilogramme pour 100 litres d'eau. Préparation et emploi faciles. Prix de revient encore abordable. Grande efficacité contre mousses, lichens, insectes, à l'exception de quelques cochenilles et kermès.

g. Solution d'un produit mixte à base, d'une part, d'huile blanche, et, d'autre part, d'un colorant organique (Volck jaune ou autre).

    Dosage variable, en général 2 litres pour 100 litres d'eau. Préparation et emploi très faciles. Efficace contre tous parasites. L'un des meilleurs produits pour le traitement d'hiver.

Recommandations particulières.

— Il semble toujours préférable d'établir un cycle de trois ou quatre années pour l'application de ces traitements, certains d'entre eux ayant une efficacité plus grande contre certains parasites, d'autres fatiguant quelque peu les écorces.

Les traitements d'hiver doivent, d'ailleurs, être obligatoirement complétés, pour les arbres à fruits à pépins, par un, et préférablement par deux, trois traitements ou plus, faits au printemps et en été, avec une bouillie cupro-arsenicale ou autre, et aussi par des traitements d'été contre les pucerons.

Temps à choisir pour traiter.

— Il ne faut pas traiter par la pluie, l'eau diluant immédiatement les produits et diminuant beaucoup leur action. Il ne faut pas non plus traiter par la gelée, ni par grand vent, car, dans ce dernier cas, on perd beaucoup de produit.

Il ne faut pas manquer de mettre à profit les journées de temps couvert et relativement doux, sans pluie ni vent violent, celles-ci étant particulièrement rares en hiver.

La période comprise entre le 25 novembre et le 15 décembre est la plus favorable lorsqu'il s'agit d'arbres négligés depuis plusieurs années, plus ou moins couverts de mousses et de lichens, tandis que, pour des arbres propres, parce que régulièrement traités, sur lesquels le traitement est surtout dirigé contre les insectes, les mois de février et mars et même, pour ceux à végétation tardive, le début d'avril conviennent mieux.

E. DELPLACE.

Le Chasseur Français N°646 Décembre 1950 Page 738