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La mission météorologique de l'île Amsterdam

La mission de prospection de l'île Kerguelen est rentrée en France après avoir terminé ses travaux. Le public a été tenu au courant de ses faits et gestes ; par contre, il a été très peu parlé de la mission parallèle qui a été fonder un poste permanent météorologique à l'île Amsterdam. Le Chasseur Français de décembre 1949 ayant fait quelques allusions à cette mission, nous croyons utile de donner quelques détails sur la région où elle exerce son activité et sur les faits qui ont marqué le début de ses travaux.

Les îles Saint-Paul et Amsterdam sont situées à mi-chemin entre Madagascar et l'Australie, à la limite de la zone antarctique. L'île Saint-Paul n'est qu'un cratère de volcan ouvert sur la mer et constituerait une rade magnifique sans les terribles coups de vent qui en rendent le séjour périlleux. L'île Amsterdam, sa voisine, a été choisie comme siège de la station météorologique que la France s'est engagée à établir, il y a déjà quelques années. C'est un îlot rocheux et désert d'environ 6 kilomètres sur 9 kilomètres, dont le point culminant atteint 920 mètres. Les bords de l'île sont escarpés et rendent impossible tout débarquement, sauf en un seul point. Elle est dotée d'une maigre végétation et totalement inhabitée. Un métis de la Réunion y vécut pourtant quelques années, et l'on voit encore les ruines des bâtisses qu'il avait construites. Il laissa en partant un couple de bovins qui se seraient multipliés en assez grand nombre, malgré l'aridité du terrain. Les côtes sont très poissonneuses et souvent habitées par des otaries, sans parler de pingouins et autres oiseaux de mer. Si le froid n'y est pas excessif, le climat est très humide, et les tempêtes d'une rare violence.

La mission chargée d'établir la station est placée sous la direction d'un ingénieur météorologue, M. P. de Martin de Vivies, et comprend une douzaine de membres, météorologues, radiologues, infirmiers, cuisinier ..., auxquels on a adjoint une équipe de travailleurs de la Réunion.

Un bateau, le Sapmer, frété pour le transport de la mission, est arrivé en vue de l'île dans le courant de janvier. Le débarquement, qui était particulièrement périlleux en raison de l'état habituel de la mer et de la côte inhospitalière, exigea les plus grands efforts des membres de la mission et de l'équipage du Sapmer. Il fut pourtant mené à bien, et les pertes de matériel furent légères. Ce succès fut malheureusement attristé par un accident : après le débarquement, un des matelots du Sapmer tombait à la mer à la suite d'une fausse manœuvre et ne pouvait être sauvé.

Le premier soin de la mission fut de mettre hors de portée des plus fortes tempêtes le matériel qu'elle avait apporté. Il était, du reste, considérable : baraquements préfabriqués, vivres, habillements, chauffage pour un an, appareils divers de météo et de radio, enfin une jeep et sa remorque pour lesquelles on avait prévu un radeau pneumatique en vue de faciliter le débarquement. On choisit ensuite l'emplacement de la station, et il fallut construire une piste carrossable pour pouvoir transporter à pied d'œuvre tout le matériel. Malgré tous ces travaux, les premières observations météorologiques élémentaires étaient faites dès le 1er février, et la station de radio était prête à fonctionner dans le courant de mars.

Les dernières nouvelles apportées par le Charcot lors de son passage à l'île mentionnaient de violentes tempêtes, prélude de l'hivernage (début d'avril). La mission se hâtait de mettre la dernière main à son installation dans les baraquements, les tentes devenant inhabitables dès la fin des beaux jours. Aucun passage de bateaux n'étant prévu avant le mois d'octobre, ce n'est qu'à ce moment que nous aurons des nouvelles détaillées de la vaillante mission.

P. PAQUIER.

Le Chasseur Français N°646 Décembre 1950 Page 756