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Courrier cynégétique

Chasseurs spoliés de leurs armes.

M. le Dr Marion, président de l’Association des chasseurs spoliés de leurs armes à Saint Étienne, nous fait part des difficultés auxquelles se heurtent les démarches entreprises par l’Association.

La plainte contre X … déposée au Parquet de Saint-Étienne, a été classée, aucune faute n'ayant pu être relevée contre des particuliers, et la juridiction civile n’ayant pas qualité pour poursuivre les administrations. Il faudrait donc avoir recours au Conseil d'État. Mais le bénéfice de l'assistance judiciaire a été refusé à l'Association. Une requête a été adressée au Président de la République, qui avait promis de soumettre la question au Président du Conseil ; mais trois ou quatre ministères se sont succédés sans qu'une solution ne soit intervenue.

M. le Dr Marion nous informe en outre qu'il a, pour raisons personnelles, abandonné la présidence de l'Association.

Sept putois d'un coup !

Au début d'août, mon garde, M. Michel Dauchy, de Vieux-Berquin (Nord), apercevait au cours de sa tournée un putois qui se réfugiait dans un aqueduc à 150 mètres de la forêt de Dieppe ; le passage lui paraissant fréquenté, il revint avec du carbure de calcium, pensant bien obliger les occupants de l'aqueduc à sortir. En effet, incommodés, deux putois ne tardaient pas à se présenter, mais, reçus à coup de carabine et blessés à la tête, ils battirent en retraite. Finalement, les occupants de l'aqueduc succombaient tous à l'asphyxie : il y avait une femelle et six jeunes presque aussi gros que leur mère ; des carcasses de garennes, des plumes de volaille, de perdreaux et de ramiers garnissaient le repaire.

P. DELFORGE, abonné.

Un vieux et bon fusil.

C'est sans contredit celui que l’on appelle familièrement chez nous le « père Constumer », qui vient d'atteindre ses quatre-vingt-trois ans, et qui, depuis un demi-siècle, remplit l’emploi de garde-chasse. Étonnant de verdeur et de jeunesse, ce doyen vient encore, au cours d'une récente partie de chasse, de porter à son actif un sanglier.

P. BERNARD, abonné.

Albinisme.

Plusieurs cas d'albinisme total nous sont encore signalés :

M. Paris, abonné charentais, en partie de chasse avec des amis, a vu se lever une compagnie de perdreaux dont quatre entièrement blancs. D’une couvée recueillie dans les environs par un syndicat de chasseurs et mise sous une poule, sont éclos également deux perdreaux blancs.

M. Henri Royer, du Vaucluse, a eu l'occasion, au cours de l'été, d'assister aux ébats d'une hirondelle entièrement blanche, qui faisait du reste très bon ménage avec ses compagnes.

Enfin, M. Fournier de Mers-les-Bains (Somme), a eu l'occasion de constater la présence d'un moineau entièrement blanc dans un groupe qui venait piller son jardin.

A propos de la tularémie.

A la suite de nombreux articles parus dans la presse concernant la tularémie, le Dr Vœrther, de Vic-sur-Seille (Moselle), tient à donner son avis, dont il prend la responsabilité, au sujet de cette maladie qui passionne actuellement les fervents du sport cynégétique.

Il dit :

« Après toutes les stupidités qui ont affolé les gens au temps des pissenlits, les mêmes rumeurs circulent au sujet d'une maladie, la « tularémie ». Certes, il convient de prendre quelques précautions contre cette maladie. N'écoutons pas les racontars et disons-nous que tous les ans des milliers de lièvres sont mangés, et cependant à peine quelques cas de maladie ont été signalés par la presse (2 cas en Moselle à l'heure actuelle).

La tularémie est une maladie importée d'Amérique, qui est due à un bacille spécial qui, en attaquant surtout les rongeurs (lièvre, rat) et les animaux à fourrure (renard, mouton), n'épargne pas dans certains cas les oiseaux (canard sauvage, sarcelle). Les animaux en sont atteints de la fin de l'automne au début du printemps. La transmission d'animal à animal et d'animal à homme se fait par contact direct ou très souvent indirect (puce, punaise, tique). Après une période silencieuse de deux à neuf jours, le sujet contaminé est pris de frissons (comme dans la grippe) puis se produit une réaction ganglionnaire dans la région du point d'inoculation, etc. Si le traitement est institué dans les premiers jours, la guérison totale s'obtient généralement au bout de cinq jours. Cependant, même sans traitement, la guérison s'obtient spontanément en six semaines, le taux de mortalité n'étant que de trois pour cent (sans traitement). En conclusion, nous pouvons dire que c'est une maladie extrêmement bénigne, et il semble qu'il est certes plus dangereux de manger des conserves, boire du lait frais ou boire l'eau du robinet que de tuer un lièvre et déguster un bon civet. En cas de doute sur la santé de l'animal, il faut le prendre avec des gants et, s'il est malade, le foie sera toujours tacheté de points jaunes. Toute bête avec ce foie caractéristique devra être rejetée. Mais il est bon de savoir que même un lièvre atteint de tularémie, bien cuit, est absolument comestible. »

(Communiqué de M. Lebrun, président de la Société de chasse de Vic sur Seille).

L’hirondelle est-elle « un oiseau de température » ?

Dans le Courrier cynégétique du mois d'août 1950, le capitaine Gaudiche explique le départ précipité des hirondelles dans la région de Cannes, au cours du mois d'août 1949, par la chaleur et l'absence de nourriture. Cette explication, si attrayante qu'elle soit par sa simplicité, semble cependant insuffisante.

D'abord parce qu'on pourrait lui opposer les autres faits que le capitaine rapporte lui-même, relatifs à la mort de ces oiseaux dans le Nord au mois de mai 1949. Or ces catastrophes étaient bien dues à l'absence de nourriture et au temps froid. J'ai pu malheureusement observer ces faits moi-même en Allemagne, où je me trouve actuellement. Bien plus que la chaleur, le froid, dans nos pays, raréfie les insectes, il semble donc erroné de penser que le séjour des hirondelles — comme des insectivores — dans leur habitat d'été soit conditionné uniquement par la présence de la nourriture et les conditions climatiques. En ce cas, pourquoi les hirondelles n'auraient-elles pas abandonné le Nord, quand les moyens de subsistance vinrent à leur manquer totalement ? Il serait vain, semble-t-il, d'alléguer ici la présence des nourrissons qui auraient forcé les parents à rester auprès de leur nid, si l'on sait la puissance de l'instinct de migration, qui contraint souvent les parents à abandonner leurs couvées trop tardives. (Il serait peut-être intéressant de savoir si les hirondelles ne l'ont pas fait aussi à Cannes au mois d'août 1949.) De tels faits ne sont pas rares, non seulement chez les hirondelles de fenêtre, mais aussi chez les martinets, qui les précèdent en un temps encore bien plus favorable.

Car c'est bien cette puissance instinctive elle-même qu'il faut considérer comme facteur essentiel de la migration. Et la distinction allemande entre « oiseau de température » et « oiseau d'instinct », si grossière soit-elle, semble à cet égard assez suggestive. On rangerait dans la première catégorie les migrateurs imparfaits, forcés d'abandonner momentanément leurs territoires de couvée par suite du manque temporaire de nourriture. Tels l'étourneau, le cygne chanteur et certaines espèces de canards. On rangerait dans la seconde les oiseaux qui émigrent régulièrement quelle que soit la température, tels la caille, la tourterelle des bois, le rossignol, les diverses espèces de fauvettes.

Or il est bien établi que l'hirondelle ne peut, en aucune façon, être rangée parmi les «oiseaux de température ». Leur retour dans nos régions ne coïncide pas toujours avec une saison favorable, à tel point que quelques-unes sont ainsi parfois victimes de leur témérité. Et si leur présence dans l'Esterel a pu être officiellement constatée le 15 janvier 1950, ce cas correspond à un accident, à une « ratée » de l'instinct qui ne peut servir à expliquer les cas généraux. Quant à leur départ de Cannes au mois d'août, il ne s'agit peut-être là que de déplacements locaux analogues à ceux qu'effectuent ces oiseaux lors des fauchaisons, des vendanges, etc., et non d'une migration proprement dite.

Expliquer la migration dans toute son ampleur par les conditions climatiques ou d'existence seules reviendrait à expliquer une maison par ses matériaux, explication aussi incomplète de ce phénomène que celle qui consiste à faire intervenir uniquement les facteurs physiologiques (sécrétions de l'hypophyse, de la glande thyroïde, des gonades).

Julien CREPIN, Constance.

Le Chasseur Français N°648 Février 1951 Page 79