Le mois dernier, nous étions en Armagnac, pays coupé par des
vallées de direction générale sud-nord, verdoyant, vallonné; beaucoup de
vignobles donnant des vins rouges et blancs, mais surtout la fameuse liqueur
qui porte son nom.
Maintenant, rejoignons la Garonne par l'une des quelconques
vallées aboutissant au fleuve.
La région de Moissac est réputée la capitale du chasselas,
mais les vignobles de ces cépages commencent bien en aval d'Agen et sont
établis sur les coteaux de chaque côté de la rivière.
Nous sommes dans le haut Languedoc (Haute-Garonne, Tarn, Tarn-et-Garonne).
A notre gauche s'étendent les plateaux calcaires du Quercy, bordés au nord ou
traversés par le Lot. Cette région fournit des vins rouges appréciés obtenus
avec le Malbec ou Cot, et susceptibles de vieillissement ;
ils sont connus sous le nom de cru Cahors.
La région du haut Languedoc fournit des vins de table, les
rouges sont obtenus avec le Malbec, le Morastel, le Gamay ;
les blancs sont obtenus avec la Clairette.
Enfin citons hors de cette région, dans l'Aveyron, les vins
de Marcillac, vignoble planté en Pinot de Bourgogne.
A Toulouse, nous quittons la Garonne pour nous diriger vers
Narbonne. Dans le Lauraguais, nous franchissons le col de Naurouze, col un peu
aplati dont l'altitude ne dépasse guère 200 mètres et qui donne le passage à la
route, à la voie ferrée et au canal. Mais là, le climat change, nous entrons
dans la région rhodanienne, l'olivier commence à apparaître, laissant deviner
la Provence.
Le col est la porte du bas Languedoc (Aude, Hérault, Gard).
A gauche de Carcassonne, nous avons le vignoble réputé du Minervois (canton de
Minerve), planté avec les cépages de la région de Narbonne ; cette
dernière produit dans ses sols argilo-calcaires des vins riches en alcool (10°
à 14°). Ces vignobles sont plantés avec le Grenache, le Carignan,
le Terret, l’Aspiran et le Morastel.
Au sud de Carcassonne, nous devinons la cité médiévale du
même nom, restaurée.
Les vins de montagne sont produits sur les contreforts des Cévennes
(Costières du Gard, Lusignan).
La région de Montpellier produit de bons vins de coteaux
comme ceux de Saint-Georges obtenus avec le Cinsant ; citons
également les vins de Murviel-le-Haut, Montpellier, Laverune, Cournonterral.
Enfin la grande production est obtenue avec les vins de plaine
encépagée, surtout avec le fameux Aramon, le plus productif de tous les
cépages, et les hybrides Bouschet, le Carignan, le Grand Noir,
la Calmette, le Mourvèdre, l’Espar.
Les vignobles à vins blancs sont encépagés avec la Clairette
(Paulian, Clermont, Fontès, etc.), puis avec le Piquepoil blanc et le Bourret.
Dans la région de Limoux, nous trouvons une production de
vins mousseux naturels appelée Blanquette de Limoux, obtenus avec le Mauzac
blanc. Très curieux, ce cru constitué en 1531 par les abbés de Saint-Hilaire
et qui donne un vin coloré d'un beau jaune, plus fruité que les vins de
Champagne, ses grands frères.
Au sud de cette région du bas Languedoc, nous trouvons le
Roussillon, adossé aux Pyrénées. Outre les vins de table, la région produit des
vins de liqueur (Lunel, Rivesaltes), dont les cépages de base sont le Muscat
d'Alexandrie, le Maccabeo et la Malvoisie blanche. La finesse
de ces vins est due au sous-sol calcaire du Crétacé inférieur.
Par contre, Banyuls, ainsi que Port-Vendres et Collioure ont
leurs vignobles établis sur des terrains cristallins faisant partie du massif
du Canigou.
Si nous longeons la côte dans la direction de la Provence,
nous trouvons sur les cordons littoraux sablonneux des vignes non greffées.
Comme nous le savons, le phylloxéra se développe difficilement dans le sable.
Après Sète, nous trouvons le vignoble de Frontignan,
produisant des vins de liqueur réputés. Continuant notre route, nous arrivons à
la Camargue et à la Crau, où nous trouvons des vignobles plantés en Aramon
sur des terres préalablement dessalées.
La côte provençale est formée de deux terrains bien
différents : le calcaire, du Rhône à Ollioules et d'Antibes à la frontière ;
de Ollioules à Antibes, ce sont les monts des Maures et l'Esterel, d'origine
cristalline et volcanique.
Partout nous avons d'excellents vins de table. Bandol donne
des vins secs, nerveux, fins ; Roquevaire, La Ciotat, Cassis produisent
des vins liquoreux avec le Muscat d'Alexandrie, auquel on adjoint l’Ugni
blanc et la Clairette.
Enfin, tout l'arrière-pays est producteur de bons vins de
table.
Quittons la Provence et remontons la vallée du Rhône ; nous
trouverons partout des vignobles bien exposés et quelques crus réputés.
Le Vaucluse, au terrain calcaire très caillouteux, donne des
vins alcooliques, bouquetés, comme Châteauneuf-du-Pape, de la Northe, de
Sorgues, de Vaudieu, vins produits par le Cinsaut, avec le Terret,
le Grenache, et la Petite Syrah.
Dans le Gard, citons le vignoble de Tavel et dans l'Ardèche,
à Saint-Péray, les vins champagnisés de ce nom obtenus avec la Roussette
et la Marsanne.
A partir de Privas, la rive droite du fleuve sera constituée
par les terrains granitiques et volcaniques, et la rive gauche par des terrains
tertiaires apparentés aux formations calcaires des Alpes.
Sur la rive gauche (en face de Tournon), on trouve un
affleurement granitique en forme de dôme ovale qui porte le nom de montagne de
l'Ermitage. Les vignobles donnent avec la Syrah et quelques cépages
locaux des vins rouges réputés et des vins blancs provenant de vignobles encépagés
avec la Marsanne et la Roussanne.
Plus au nord (au sud-ouest de Vienne), sur la rive droite,
on trouve des vignobles à Ampuis-Condrieu ; près de cette dernière
localité se trouve le vignoble célèbre de Côte-rôtie, obtenu avec la Syrah,
à laquelle on associe parfois le Viognier.
Si nous pénétrons en Savoie, nous trouvons des vignobles
dans les parties des vallées bien abritées, comme la Drôme, l'Isère et leurs
affluents ; le vignoble se trouve parfois en altitude et la vigne est
conduite en hautains ; les cépages principaux sont la Mondeuse, le Peloursin,
le Prin blanc (cépage blanc), le Provareau, et quelques autres.
Enfin, à Die, sur la Drôme, on produit avec la Clairette
un vin mousseux estimé.
Nous arrivons ainsi à Lyon, ancienne capitale des Gaules, et
nous pénétrons dans le Beaujolais. Nous arrivons d'abord dans le bas
Beaujolais, composé de terrains alluvionnaires calcaires, donnant de bons vins
de table légers, fruités, moyennement alcoolisés ; ils sont fournis par
les cantons de Villefranche, Bois-d'Oingt et d'Anse. Les vignobles sont plantés
en Gamay rouge du Beaujolais et fournissent les vins renommés de
Fleurie, Villé, Morgon, Chenas, Juliénas, La Chapelle-de-Guinchay et Romanèche,
cette dernière localité comprenant les crus célèbres de Moulin-à-Vent et Thorins.
Plus au nord, le haut Beaujolais est établi sur des terrains
tout différents ; ce sont des sols granitiques, des contreforts à l'est du
massif du Morvan. Ces terrains sont dépourvus de chaux. Là, le Gamay
acquiert de grandes qualités et fournit de très bons vins de table.
Avant d'entrer en Bourgogne, il nous faut visiter les
vignobles du Jura, qui s'étendent sur onze des trente-deux cantons formant le
département. Citons les vignobles d'Arbois, de Château-Chalon, de l'Étoile, le
reste formant les côtes du Jura. Les cépages cultivés sont au nombre de cinq.
Le Pinot Chardonnay, appelé aussi Melon d'Arbois, donne le vin
blanc ; le Savignin donne des vins jaunes. Les vins rouges sont
obtenus avec le Trousseau, le Ploussard, et enfin le Pinot
noir ou gris.
On trouve également des vignobles dans la Haute-Saône et
dans l'Ain.
Revenons sur les rives de la Saône ; au nord du
Beaujolais, nous trouvons le Maconnais aux sols calcaires, lesquels donnent
avec le Chardonnay de très bons vins, dont les principaux centres sont
Pouilly (qu'il ne faut pas confondre avec Pouilly-sur-Loire), Solutré, Chaintré.
Les vins blancs ordinaires sont obtenus aussi avec le Chardonnay, mais
associé au Melon, et les vins rouges avec le Gamay.
En continuant toujours vers le nord, nous entrons dans « la
côte chalonnaise », dont le cru principal est le Mercurey ; le
vignoble de ce cru est encépagé avec le Pinot.
On cultive aussi le Gamay et, comme cépages blancs, l’Aligoté,
le Melon, le Chardonnay. Le meilleur vin obtenu avec ce dernier
se trouve à Rully.
Arrêtons-nous à Chalon-sur-Saône. Le mois prochain, nous
visiterons l'ancien pays des Burgondes : la Bourgogne, puis nous pensons
terminer ce voyage.
V. ARNOULD,
Ingénieur agronome.
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