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Les ravageurs des potagers

La taupe.

— C'est un petit mammifère fusiforme, recouvert d'une épaisse fourrure soyeuse, qui vit en terre, où il creuse un gîte et des terriers. Bien que la taupe soit insectivore, et qu'elle se nourrisse en grande partie de lombrics, de larves et d'insectes divers, elle n'en est pas moins nuisible aux potagers, en culbutant les semis et en déchaussant les plantes repiquées.

Pour ces raisons, les taupes sont indésirables dans les Jardins et l'on s'efforcera de les détruire. Mais, comme cet animal est méfiant, doué d'une ouïe fine et d'un odorat subtil, il convient de connaître ses mœurs pour le capturer.

C'est dans les terrains un peu frais et humifères, riches en proies vivantes, que les taupes se plaisent et se multiplient à la cadence annuelle de trois à quatre fois leur population. Les galeries qu'elles creusent aboutissent à un nid, A, comprenant une cavité confortable, en terre battue, tapissée de feuilles et de mousse, décelée en surface par un gros tumulus. G, appelé taupinière, constituée par les déblais extraits du gîte par les galeries d'expulsion. M, N, O.

Au nid aboutissent les galeries de chasse, C, D, qui vont se rapprochant de la surface du sol, et que les taupes creusent dans toutes les directions, souvent fort loin, pour y chercher leur nourriture. De place en place, on aperçoit de petits tumulus, ou taupinées, P. Des galeries de sûreté ou de fuite, B. E., permettent aux taupes de s'échapper, dans le cas où on voudrait les prendre au gîte, lequel est d'ailleurs très profond.

C'est surtout le matin, vers neuf heures, et le soir, vers quinze heures solaires, que les taupes se mettent en chasse et qu'on peut les voir pousser des taupinées à des endroits souvent éloignés de leur nid.

Les moyens de capture les plus employés sont les pièges à ressort, dont il existe différents modèles. On distingue le piège simple, le piège double et le piège à ressort outrepassé,

Avoir soin de passer les pièges à la flamme, avant de les poser, de manière à masquer l'odeur des mains, que l'animal percevrait. Ne pas piéger dans les galeries de chasse, peu fréquentées, mais dans les galeries principales, C, D, aussi près que possible du gîte habité. La tendue se fait en plein milieu des galeries mises à jour, que l'on recouvre ensuite de mottes de terre, puis de terre fine.

On peut aussi capturer les taupes à l'affût, à l'aide d'un hoyau que l'on rabat vivement au moment où elles poussent leurs taupinées, vers neuf heures et quinze heures. Pour réussir, il faut avoir le pas léger et la main leste et s'armer de quelque patience. Mais le moyen le plus expéditif, c'est encore l'empoisonnement à la strychnine, à la noix vomique ou à l'extrait de scille. Ce dernier produit n'est pas dangereux pour les animaux domestiques. Dans tous les cas, l'amorçage se fait en coulant de place en place, dans les galeries, des tronçons de vers coupés (lombrics), après avoir trempé leurs extrémités dans le poison. Saisir les vers avec une pince et, après les avoir déposés dans les galeries, le plus près possible des gîtes, on couvre d'une motte de terre l'orifice mis à jour. En répétant l'appâtage à plusieurs reprises au printemps, on arrive à se débarrasser des taupes.

Taupin.

— Coléoptère long de 10 à 14 millimètres, qui se détend brusquement, d'un coup sec, lorsqu'on le saisit. Il existe plusieurs variétés de taupins, mais le plus préjudiciable est le taupin des moissons, dont la larve fluette, dure et de couleur jaune, est désignée sous le nom de ver fil de fer.

La larve du taupin ronge les racines de la plupart des légumes, que l'on voit sécher sur pied (salades, fraisiers, plants repiqués de choux, etc.). Elle s'attaque également aux racines de carottes, de navets, aux tubercules de pommes de terre, etc.

On devra détruire tous les adultes et les vers fil de fer que l'on découvrira en effectuant les diverses façons culturales. L'insecte, à ses deux états, étant un hivernant du sol, il ne peut être détruit que par les vapeurs asphyxiantes, dégagées par le sulfure de carbone, le sulfocarbonate de potassium et les produits de synthèse : H. C. H., S. P. C. et D. D. T.

Le meilleur moment pour épandre ces insecticides sur les labours est le printemps, trois semaines environ avant les semis ou les plantations. Après leur épandage, on donne un crochetage croisé, dans les deux sens, afin d'enfouir les produits à la profondeur de 6 à 10 centimètres. Les larves meurent avant leur transformation en insectes parfaits.

A la dose de 10 à 15 kilogrammes de H. C. H., de S. P.C. ou de D. D. T., non seulement on détruit les taupins dans la proportion de 80 à 90 p. 100, mais aussi les vers blancs, les tipules, les altises, les charançons, les pyrales, les noctuelles, etc. L'action est toujours plus marquée dans les terres sableuses que dans les terres fortes.

Tipule potagère.

— L'insecte parfait ressemble à un grand moustique, caractérisé par la longueur extraordinaire de ses pattes. La tipule pond sur le collet de la majeure partie des plantes potagères. La larve, désignée sous le nom de ver jaquette de cuir, se nymphose en terre, après avoir fait périr les légumes, aux dépens desquels elle a vécu pendant sa vie larvaire.

Le seul traitement efficace consiste en la production des vapeurs asphyxiantes dans le sol, soit par sulfuration avant l'hiver, soit par l'application des produits de synthèse, comme pour les taupins. L'enfouissement du plâtre à haute dose, qui produit de l'hydrogène sulfuré, contribue également à la disparition des tipules.

Ver de terre.

— Le ver de terre (lombric), qui abonde dans les terrains humifères, un peu humides, cause d'importants dommages. Géophage invétéré, le lombric vit aux dépens de l'humus et des matières minérales qu'il assimile, en rejetant ces excréments en forme de tortillons.

En outre, le ver de terre s'attaque aux jeunes plantules qu'il dévore, ce qui nuit aux semis et aux repiquages, surtout sur les parcelles terreautées.

La meilleur moyen de détruire les lombrics, c'est d'arroser la surface du terrain infesté avec une solution légère de sulfocarbonate de potassium. Ce sel liquide, à 40° Baumé, s'emploie en dilution, à raison de cinq litres par hectolitre d'eau. L'épandage se fait à l'aide d'un arrosoir à pomme, de préférence lorsque la terre est bien imbibée d'eau, à la dose de 40 à 50 litres à l'are.

Sous l'action de l'hydrogène sulfuré et du sulfure de carbone dégagés, les vers remontent à la surface du sol pour mourir. Les arrosages copieux des tas de terreau les débarrassent de tous les parasites qui y ont élu domicile.

A. LEGUME.

Le Chasseur Français N°649 Mars 1951 Page 161