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Alimentation minérale du bétail

Les minéraux indispensables.

— Il ne suffit pas de fournir au bétail, quel qu'il soit, des rations équilibrées en matières azotées et hydrocarbonées, c'est-à-dire en protéine, fécule ou amidon, en cellulose, en graisse, etc., évalués sous l'angle de leur assimilabilité. Il faut aussi que ces aliments contiennent les principes minéraux rentrant dans la constitution des tissus viandeux et osseux, en quantité suffisante pour assurer le fonctionnement des organes vitaux et pour combler les vides occasionnés par la production des fœtus, du lait et des œufs exportés.

Pour constituer la charpente d'un veau, d'un porcelet, par exemple, pendant toute la durée de la gestation, sachant qu'un kilogramme d'os contient 320 grammes de calcium et 80 grammes de phosphore, comme ces minéraux ne sont guère assimilables que dans la proportion d'un tiers, par les apports de la nourriture, on peut les estimer à 360 et à 270 grammes respectivement pour chacun de ces minéraux.

Ces quantités théoriques ne varient guère pendant toute la période de l'accroissement des jeunes, jusqu'à l'engraissement. L'élaboration de la viande en exige également des quantités considérables et, outre ces éléments phosphocalciques, les animaux en accroissement et en production exigent d'autres minéraux, notamment de la soude, de la potasse, du fer, etc. Mais c'est évidemment le phosphore et le calcium qui ont le plus d'importance, car leur absence ou leur insuffisance dans l'alimentation est à la base des déficiences qui occasionnent des troubles de reproduction, du rachitisme et des anomalies dans les sécrétions, s'il s'agit de vaches laitières, ou dans l'ovulation, s'il s'agit de volailles pondeuses.

Si on analyse les os d'animaux bien constitués, n'ayant pas eu à souffrir d'une insuffisance phosphocalcique, la proportion relative de ces deux minéraux est environ le double de celle de l'osséine, soit 60 grammes pour 30 grammes d'os desséchés, tandis qu'elle peut descendre à 30 grammes pour les minéraux et atteindre 50 grammes d'osséine chez les sujets rachitiques.

Sans doute toutes les denrées consommées par le bétail contiennent du phosphore et du calcium, mais en quantités extrêmement variables. Certains aliments étant très pauvres en ces minéraux, il est absolument nécessaire de faire des apports de phosphate de chaux, sous une forme aussi assimilable que possible, en introduisant des poudres préparées pour cet objet dans la ration du bétail et en incorporant des poudres à faire pondre dans la pâtée des volailles pondeuses.

Composition comparée.

— Si les fourrages verts ainsi que les bons foins, plus particulièrement ceux des légumineuses (luzerne, trèfle, etc.) sont relativement riches en phosphore et en calcium, d'autres denrées, notamment les racines et les tubercules, sont extrêmement pauvres, ainsi qu’il résulte des analyses effectuées sur toutes les nourritures consommées par les animaux domestiques. On peut s'en rendre compte à l'examen du tableau ci-après. Les chiffres indiquent la teneur moyenne, en grammes, et par kilogramme, en phosphore (P) et en calcium (Ca) :

Principales denrées. Phosphore. Calcium.
Betteraves fourragères 0gr,30 0gr,20
Pommes de terre 0gr,60 0gr,08
Mélasse de sucrerie 0gr,40 2gr,10
Sérum de fromagerie 0gr,50 0gr,80
Maïs en grain 2gr,70 0gr,20
Avoine 3gr,80 0gr,70
Orge 4gr,00 0gr,20
Son de froment 6gr,00 1gr,20
Tourteaux (assez variable) 4 à 5 gr 1 à 3 gr

Rectifications qui s'imposent.

— D'après cette énumération succincte, on constate que, si on donne journellement à une vache 40 kilogrammes de betteraves, elles n'apporteront que 8 grammes de calcium, quantité notoirement insuffisante pour les besoins de la lactation et ceux des fœtus en gestation. Il est donc nécessaire, si on veut éviter le rachitisme des veaux, la déminéralisation du lait et le tarissement anticipé des laitières, d'incorporer dans la mêlée une bonne poudre phosphocalcique, car les apports du foin et des tourteaux ne suffiraient pas pour combler le déficit en sels minéraux.

Mais il ne faut pas oublier que la teneur en calcium de la ration doit toujours être supérieure à celle du phosphore, plus ou moins suivant le genre de production poursuivi. En principe, le rapport entre les deux minéraux se rapprochera le plus possible de 1 pour le phosphore et de 3 pour le calcium.

Faute d'observer cette prescription, les femelles risquent de se décalcifier au profit de leur fœtus, pendant toute la durée de la gestation, leur lait s'appauvrira et se réduira pendant l'allaitement. C'est pour la même raison qu'on observera tant d'accidents dans l'élevage des porcelets. Mais c'est encore chez les femelles exploitées pour la production du lait que les plus grands préjudices sont constatés, du fait de l'insuffisance des minéraux phosphocalciques.

Dans tous les cas, on tiendra compte que les minéraux fournis par les grains ne sont pas très assimilables, et l’on fera bien d'en forcer la dose pendant la période de stabulation.

Lorsqu'on nourrit à la betterave ou à la mélasse, comme ces denrées sont très riches en potasse, on salera les aliments afin de contrarier l'action débilitante de cet alcali, ainsi que ses effets laxatifs.

Si, en même temps que les rations équilibrées, on incorpore à la ration des vitamines A, dites de croissante, des vitamines D, antirachitiques, soit sous la forme concentrée soit simplement avec des fourragea verts, ou, à défaut des grains germés, on évitera tous les vices de nutrition, et les animaux seront en parfait état de production.

Ce qui vient d'être dit au sujet du gros bétail s'applique également aux volailles, surtout aux poules et aux canes pondeuses, qui exportent avec leurs œufs des quantités considérables de calcaire. Chaque coquille, dont le poids moyen est de 7 grammes, est composée de 98 p. 100 de carbonate de chaux associé à 1 p. 100 de phosphore, le reste comprenant du fer, du chlorure de sodium, du gluten animal, etc.

Aussi, lorsque la nourriture est à base de grains, de pommes de terre et d'issues, on donnera aux pondeuses des coquilles d'huîtres finement moulues, la quantité assimilée tous les ans par une seule poule ne devant pas être inférieure à un kilogramme. C'est le seul moyen d’empêcher la production des œufs hardés et la déminéralisation des poules.

C. ARNOULD.

Le Chasseur Français N°650 Avril 1951 Page 233