Lorsque les lapins sont âgés d'un mois et demi à deux mois,
il devient nécessaire de les séparer de leur mère. C'est, pour des sujets
encore jeunes, un changement de vie important, et qui demande, de la part de
l'éleveur, beaucoup de précautions et d'attention.
On réunira donc les lapins par petits groupes — en séparant
les sexes et en évitant de mélanger des sujets d'âges trop différents. Une cage
d'adulte peut contenir trois lapins au sevrage, mais nous vous conseillons
vivement, surtout si vos portées sont nombreuses, de les réunir par bandes de
dix à vingt têtes, dans de petits parcs suffisamment spacieux (ou de grandes cases).
Toutefois, il n'est pas indiqué de grouper les sujets en bandes trop
nombreuses, car ce qui pourrait être gagné en main-d'œuvre serait perdu par une
vitalité et une croissance moins grandes, sans compter les risques d'épidémie
qui sont alors beaucoup plus à craindre.
La question de l'alimentation est capitale : du jour au
lendemain, les animaux sevrés sont privés de lait, même quand ils ne tètent
presque plus leur mère ; c'est une vie nouvelle, totalement différente de
celle qu'ils ont vécue jusqu'ici, qui les attend. Ce changement, si on n'y
prenait garde, pourrait avoir de fâcheuses répercussions physiques. Une
nourriture agréable, qui se substituera progressivement et non brutalement à
l'alimentation du premier âge, facilitera cette adaptation qui s'impose. Des
aliments de choix aiguiseront l'appétit des jeunes lapins, qui, peu à peu,
s'habitueront à des aliments plus économiques. Donnez-leur à boire, et notez
qu'il est très recommandé d'humecter les pâtées avec du lait, si vous en avez à
votre disposition. Certes, selon les races élevées, la rusticité des jeunes est
plus ou moins grande, mais dites-vous bien que tout lapin ne vous donnera par
la suite entière satisfaction que dans la mesure où il ne souffrira pas des
exigences du sevrage.
Nous vous recommandons aussi d'ajouter un fortifiant
vitaminé aux pâtées. A condition, bien entendu, que ce fortifiant n’ait pas une
odeur telle (cela se produit parfois) qu'il empêche les lapins de manger la
nourriture à laquelle il est mélangé.
Il est indispensable de ne jamais distribuer un repas sans
enlever les restes de la distribution précédente ; il faut changer quotidiennement
l'eau des abreuvoirs, car les lapereaux ont souvent la détestable habitude d'y
uriner. Attention à l'herbe fermentée, qui provoque une diarrhée dangereuse
chez les jeunes. Un éleveur réputé recommandait avec juste raison, pour
habituer les lapins aux fourrages secs, de mélanger foin et verdure dans les
râteliers. Enfin, les repas seront réguliers, en vue d'habituer le système digestif
des lapereaux à une discipline fort profitable pour leur santé, donc pour leur
croissance et leur rendement.
Une hygiène très sévère sera à respecter très rigoureusement :
changement des litières, cases comportant un écoulement des urines,
désinfections fréquentes, et même, en cas d'épidémie, vaccinations préventives.
A l'époque du sevrage, remarquez, parmi les plus précoces et
les plus robustes les sujets qui supportent le mieux ce changement de vie
qu'est le sevrage ; ce sont eux que vous garderez éventuellement comme
reproducteurs, de préférence aux autres, afin qu'ils transmettent à leur descendance
ces qualités de vigueur et de résistance.
Voici quelques conseils qui vous permettront, nous
l'espérons, de ne plus craindre le sevrage des lapereaux, au point de le
retarder sans raison, comme le font certains éleveurs mal avertis. Et soyez
persuadés qu'il est possible de pratiquer le sevrage dès le quarante-cinquième
jour, sans que cela soit aussitôt la cause d'une mortalité inévitable.
DE JEANNEY-CHALENS.
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